Philippe Delerm, c’est la Première gorgée de bière…, c’est l’artisan du quotidien, c’est un regard particulier qui se pose sur des choses banales et les illumine, c’est une poétique, une légèreté. C’est du moins ce que j’ai cru retenir de l’enthousiasme général autour de cet auteur : les « mais si, tu verras c’est génial », les « j’ai adoré, ça donne la pêche » et compagnie. Du côté critique, c’était déjà un autre son de cloche. « De la littérature avec rien ». Je ne sais plus où j’ai lu cette affirmation sèche et snob. En tout cas, c’est encore un exemple de la farouche opposition de la critique et du lectorat. Il était donc nécessaire de se faire un avis propre sur la question.
Des textes extrêmement courts, deux pages, trois parfois, jamais quatre. Un format terriblement bref, peu courant et qui fait penser au blog ; d’ailleurs, les thèmes d’inspiration s’y prêteraient parfaitement. Car oui, c’est du quotidien : la douche estivale, les pieds nus dans l’herbe, le soleil qui tombe sur une terrasse, la cuillerée de miel, la sonnerie de téléphone, autant de sujets possibles pour cet écrivain qui préfère le minuscule et l’instant. Entièrement axés sur les sensations et les souvenirs, ses chroniques se veulent universalistes : toucher chacun par l’emploi systématique du « on », la généralisation pour moyen ultime. Parfois, le texte est d’une telle justesse que chaque phrase semble emplie de cette absolue vérité, de l’expression parfaite du moment. Écrit pour être ressenti personnellement. C’est également le défaut majeur du recueil : à force de vouloir tomber juste, ça tombe à côté, tant l’évocation est précise et, paradoxalement, individuelle malgré la généralisation. Une phrase trop lourde, quelques lettres de trop, ou encore un mot inhabituel trop repris, et la fragile construction mentale s’effondre en laissant un goût amer.
La sieste assassinée, de Philippe Delerm, Gallimard (Folio)
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