C’est le compte Instagram Gynéco & Féminisme qui a donné l’alerte le dimanche 8 mai 2022. Dans le programme du congrès Pari(s) Santé Femmes qui doit se tenir cette semaine à Paris, le nom du professeur Émile Daraï apparaît.
S’il vous est familier, ce n’est pas seulement en lien avec son expertise de l’endométriose et des cancers pelviens à l’hôpital Tenon, à Paris. En septembre 2021, le professeur Émile Daraï a été accusé de viols et de violences par des patientes et plusieurs plaintes ont été déposées.
Depuis, un rapport de l’enquête interne menée par l’AP-HP rendu en novembre 2021 a recueilli vingt témoignages de patientes, faisant état de gestes brutaux et d’une absence de prise en compte du consentement et de la douleur pendant les consultations gynécologiques :
« Certaines patientes rapportent également avoir demandé que l’examen soit interrompu et disent ne pas avoir été entendues. »
Des externes rapportent par ailleurs des consultations « “dures”, voire “violentes” et que cela est notoire ».
À l’issue de cette enquête, l’AP-HP et Sorbonne Université ont mis en retrait le professeur Émile Daraï de ses responsabilités de chef de service et de responsable pédagogique.
Émile Daraï présent à un congrès de gynécologie, malgré des plaintes pour viol
Ce lundi 9 mai, le signalement du compte Gynéco et Féminisme a été repris par plusieurs activistes féministes, dont Alice Coffin et Rokhaya Diallo :
Le professeur Émile Daraï doit effectivement participer à une première table ronde ce mercredi 11 mai, organisé par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français.
En outre, une deuxième participation est prévue, cette fois le jeudi 12 mai, pour une séquence portant sur le cancer du col de l’utérus, cette fois à l’initiative de la Société Française d’Oncologie Gynécologique.
Face aux réactions, le CNGOF, qui organise l’une des séquences où intervient le spécialiste, a réagi par un communiqué de presse laconique pour rappeler son attachement à la présomption d’innocence :
« Le CNGOF conscient de l’émoi suscité par la présence du Pr Emile Daraï lors de son congrès national tient à rappeler :
1 – que le Pr E. Daraï n’a pas, à ce jour, été condamné par la justice française et que la présomption d’innocence est un principe fort de notre pays,
2- que si le Pr E. Daraï a été démis de ses fonctions de chef de service, il est autorisé à travailler par la justice française et par ses employeurs, l’Assistance Publique Hôpitaux de Paris (HP-HP) et Sorbonne Université,
3 – que le Pr E. Daraï, spécialiste reconnu de Gynécologie, continue à publier et à être invité dans les congrès internationaux. »
« Jusqu’où va la confraternité ?»
Une mobilisation se met déjà en place pour protester ce mercredi contre la présence d’un médecin accusé de violences gynécologiques au congrès Pari(s) Santé Femmes. Un rassemblement aura lieu aux abords de l’événement pour « dénoncer cette mise en avant dans un colloque prestigieux, alors que le professeur Daraï a 25 plaintes au pénal mais aussi le fait que le CNGOF ne s’est jamais prononcé en faveur de la suspension temporaire de ce professeur. », explique Sonia Bisch, porte-parole du collectif StopVOG auprès de Madmoizelle.
« Jusqu’à combien de plaintes vont-ils le protéger ? Même l’honneur de leur colloque ne compte pas… Jusqu’où va la confraternité ? La santé des femmes mérite mieux. »
La militante déplore les conséquences pour l’ensemble des victimes de violences gynécologiques et obstétricales d’une telle exposition de la part des organisateurs de Pari(s) Santé Femmes : « Quand on subit des violences de la part d’un grand ponte, d’une personne qui est reconnue, ça pousse au silence. » Il n’est pas question pour elle de remettre en question le principe de la présomption d’innocence, mais bien de garantir la sécurité des patientes.
Sonia Bisch, porte-parole du collectif StopVOG, rappelle que la présence d’Emile Daraï avait été programmée puis annulée dans la première version du congrès initialement prévu en janvier 2022. Mais celui-ci a été repoussé et voilà que le nom du professeur ressurgit. La militante suppose que la baisse d’attention médiatique à l’égard de l’affaire a permis d’inviter à nouveau le spécialiste.
L’enquête judiciaire suite aux 25 plaintes contre le professeur Emile Daraï est actuellement toujours en cours.
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Crédit photo : Capture photo (Stop VOG)
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