Garantir le droit à l’IVG en l’inscrivant enfin dans la Constitution, l’idée est sur toutes les lèvres depuis la révocation de Roe v Wade aux États-Unis en juin 2022. Depuis, c’est la sénatrice écologiste Mélanie Vogel qui s’est par exemple emparée du sujet en présentant une proposition de loi constitutionnelle le 19 octobre dernier, proposition qui a finalement été rejetée.
Ce mercredi 9 novembre, un amendement porté par la députée et présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale Aurore Bergé a finalement été adopté en commission des lois et devra être examiné la semaine du 28 novembre à l’Assemblée nationale.
On était à deux doigts de se dire « une bonne chose de faite »… mais c’était avant de voir le contenu du dit-texte.
Un amendement qui exclut les hommes trans de la protection du droit à l’IVG
C’est Sébastien Tuller, responsable des questions LGBTQI+ pour l’ONG Amnesty Intertnational France, qui a signalé son adoption et son contenu. Il dénonce qu’à travers une avancée significative et nécessaire pour protéger l’accès à l’IVG, certains politiques en profitent pour bafouer les droits sexuels et reproductifs d’autres personnes :
Remplacer « Nul ne peut être privé du droit à l’interruption volontaire de grossesse » par la formulation « nulle femme ne peut être privée du droit à l’interruption volontaire de grossesse » permettrait selon la députée d’empêcher qu’une personne extérieure de s’opposer à ce qu’une autre avorte. C’est en tout cas la ligne de défense qu’elle a tenu, après avoir été interpellée sur les réseaux sociaux, celle de « garantir que des tiers ne puissent en aucune manière interférer dans le choix libre d’une IVG ».
Mais les associations et les activistes LGBTQI+ ne sont pas dupes face à cet amendement : l’Inter-LGBT a aussitôt dénoncé le « caractère foncièrement transphobe » de son adoption. Le député Renaissance Raphaël Gérard, qui est donc dans le camp politique d’Aurore Bergé, a lui aussi rappelé que « la meilleure prise en compte des droits des personnes trans ne menace EN RIEN les droits des femmes. »
C’est un fait : les hommes trans peuvent tomber enceints, et à ce titre doivent pouvoir bénéficier d’un suivi de grossesse, mais aussi avoir accès à l’avortement. Or, la formulation choisie dans cet amendement exclut de fait un homme trans qui aurait son changement d’état civil et souhaiterait avoir recours à une IVG.
Le résultat de l’offensive transphobe contre le Planning familial ?
Durant l’été, alors que le Planning familial était violemment attaqué pour avoir présenté une affiche sur l’inclusion des hommes trans dans ses structures, Aurore Bergé avait reçu Dora Moutot et Marguerite Stern, et donc témoigné de son soutien à deux activistes transphobes et à leur combat « contre l’invisibilisation des femmes ». Une séquence médiatique que nous avions justement analysée sur Twitch avec Maud Royer et Alice Ackermann :
Doit-on voir dans cet amendement le résultat de la poussée transphobe de ces militantes qui se présentent comme « femellistes » ?
Inscrire le droit à l’IVG dans la Constitution apparaît nécessaire pour protéger la liberté de disposer de son corps et prévenir un possible retour en arrière, comme cela a pu être le cas dans d’autres pays en Europe, notamment la Hongrie. Pour autant, cette inscription dans la Constitution ne devrait pas s’accompagner d’une instrumentalisation visant à faire reculer davantage les droits des personnes trans.
Des précédents existent : lors de l’extension de la procréation médicalement assistée votée en 2021 aux couples de femmes et aux femmes célibataires dans le cadre de la révision de la loi de bioéthique, les hommes trans ont été sciemment exclus. Ils n’ont pas été oubliés, ils ont été mis de côté pendant l’examen du texte, comme si leurs droits sexuels et reproductifs ne méritaient pas aussi d’être reconnus et protégés.
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Les Commentaires
C'est une démarche complètement contre productive quand on est transphobe!