J’ai poussé la porte de l’union sportive de karaté de ma ville sur un coup de tête. C’était il y a deux ans et je voulais me lancer un défi. J’avais entendu dire que les arts martiaux aident à développer la confiance en soi, et comme je souffrais de phobie sociale, j’en avais bien besoin.
Pourtant, je ne me sentais aucune prédisposition. J’ai toujours été nulle en sport, timide, préférant rester dans un coin avec un bon bouquin. J’ai survécu à un harcèlement scolaire au collège, et à l’époque, j’essayais de régler le problème en parlant, pas en cognant. Je suis une ancienne traumatisée, en somme.
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Le karaté, kézako exactement ?
Pendant un cours de karaté, on ne fait pas que cogner. On fait des échauffements, des étirements, on répète des mouvements, on fait des combats et des katas -— un enchaînement de mouvements, une sorte de combat qu’on mène tout seul.
Comme le montre ici Heian Shodan, avec le kata des débutants.
Le déroulement varie souvent d’un cours à l’autre. On commence toujours par des échauffements ou des étirements. Ensuite, on fait des exercices avec un•e partenaire, par groupes, ou encore tout•e seul•e. On apprend à placer ses bras et ses jambes au bon endroit en frappant ou en détournant les coups.
« Le Karaté est un art martial japonais qui tient son origine de l’île d’Okinawa. Il consiste en l’utilisation de techniques à la fois offensives et défensives faisant appel à toutes les parties du corps : mains, pieds, etc.
Signification des mots : kara = vide ; te = main ; do = la voie, soit : « la voie de la main vide ». »
Et comme dans mon groupe il y a plusieurs niveaux qui travaillent ensemble, le cours est assez personnalisé, c’est-à-dire que le sensei, le prof, passe en disant : « Les ceintures blanches et jaunes, vous faites ci, les autres vous faites ça… ».
La seule chose à laquelle j’ai encore du mal à m’habituer, c’est le vocabulaire. Le sensei, c’est donc le prof, et le randori, c’est le combat un contre un par exemple ; je le sais… mais je m’emmêle encore les pinceaux avec certains termes !
Mais sinon, c’est un sport vraiment accessible. Comme je ne fais pas de compétition, je n’ai jamais eu à apprendre les règles par coeur. Il y a tout de même quelques règles spécifiques, c’est vrai : saluer l’adversaire avant et après chaque combat, en sortant du tapis et en y entrant, garder sa bouteille d’eau sur le tapis (je ne rigole pas : mon sensei n’aime pas qu’on sorte du tapis pour chercher sa bouteille !), porter des protège-poings et protège-pieds pour certains exercices…
Le karaté se pratique pieds nus, avec un kimono et une ceinture de la couleur du grade (blanche pour les débutants, puis jaune, orange, verte, bleue, marron et noire). Il faut donc aussi apporter des protège-poings et protège-pieds (ce qui n’est pas la même chose que des gants de boxe).
Les filles portent un t-shirt sous leur kimono pour éviter de se retrouver en soutien-gorge pendant les exercices. À ce propos, je conseille fortement de porter un bon soutien-gorge de sport, à la bonne taille : on sautille beaucoup pendant l’échauffement et certains exercices, et sans le bon équipement, ça peut vite devenir inconfortable.
Un cours dure 1h30. Il est recommandé de venir deux fois par semaine si on veut progresser, ce que j’essaie de faire. Dans mon club, il y a des gens qui viennent quatre fois par semaine — sans compter les compétitions. Je les admire !
Avant chaque cours, je me demande sérieusement ce que je fais là, pourquoi je ne reste pas tranquillement chez moi à me prélasser. Et à chaque fin de cours, je me sens contente, euphorique. J’ai tenu jusqu’au bout et j’ai appris des trucs.
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Un lieu neutre et ouvert
A ma grande surprise, j’ai trouvé ça vraiment sympa. Mon cours étant accessible aux personnes de tous niveaux ayant 14 ans ou plus, je me suis trouvée dans le même bateau que des ceintures marron beaucoup plus jeunes que moi. Les garçons sont majoritaires, ce que je trouve pratique… on a plus de place dans les vestiaires !
Mais contrairement à ce qu’on pourrait croire, je ne me suis jamais sentie dans un « environnement de machos ».
Les gradés ont toujours été sympa avec moi, la petite débutante. Il y en a qui sont contents d’aider les nouveaux à progresser. Dans mon cours, il y a une grande variété d’âges, de catégories sociales, d’origines ethniques, de morphologies et de personnalités. On se retrouve d’une année sur l’autre et c’est sympa.
Dans mon club, on accueille tous les gens qui apportent un certificat médical valide : peu importent donc le niveau ou les expériences sportives ! Mais quand je vois les acrobaties que font les gradés, je me dis que quand je serai trop vieille, avec les articulations trop fragiles, je passerai au tai-chi ou à la natation qui sont un peu moins exigeants…
Ne pas tenir compte des autres
Quand j’annonce que je fais du karaté, on me répond presque toujours : « OK, tu es dangereuse ! Je ne vais pas te contrarier ». Je trouve ça un peu bête : je ne pense pas que le karaté m’ait rendue dangereuse ou agressive, et à l’inverse, il y a des gens brutaux et agressifs qui n’ont jamais pratiqué d’arts martiaux de toute leur vie.
J’imagine aussi que ce choix a dû surprendre mon entourage parce que je suis menue de partout, sans muscles, avec (paraît-il) un regard innocent. Je suppose qu’on s’attend plutôt à ce qu’une karatéka ressemble à Linda Hamilton dans Terminator 2. Ces clichés ont la vie dure !
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Franchement, par moments, pendant le cours, je me demande un peu ce que je fais là. Je m’interroge sur le sens profond de la vie au lieu de me concentrer. Seulement, je crois que ça m’a aidée à prendre confiance en moi. On vit dans un monde où une femme agressée est souvent blâmée quand elle se défend, où on reproche aux victimes de ne pas savoir lutter…
Personnellement, depuis que je fais du karaté, j’ai presque l’impression d’être Buffy. Je sais que si je suis agressée à nouveau, je serai un peu mieux armée. Et puis, quand on vous répète depuis l’enfance que les gentilles filles ne frappent pas, ne cognent pas et sourient quand on les embêtent, c’est jouissif de donner des coups de poings et d’être félicitée pour ça !
J’ai passé ma ceinture jaune l’an dernier (de justesse, mais je l’ai eue quand même). J’avais l’impression de rêver ! Je ne me sens toujours aucune prédisposition mais j’ai décidé de continuer. Peut-être qu’un jour, j’aurai une ceinture orange. Et puis une verte. Et puis, peut-être une bleue. Après tout, la vie est un défi… Et celui-là me plaît.
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