Parler d’argent, en France, c’est encore tabou. Pourtant, c’est un sujet passionnant, et par certains aspects féministes. Dans notre rubrique Règlement de comptes, des personnes en tout genre viennent éplucher leur budget, nous parler de leur organisation financière en couple ou en solo, et de leur rapport à l’argent. Aujourd’hui, c’est Julia qui a accepté de nous ouvrir ses comptes.
- Prénom : Julia
- Âge : 26 ans
- Métier : coordinatrice d’une association
- Revenus mensuels : 1 636€ par mois pour Julia, et 923€ pour son compagnon
- Famille : Julia, son conjoint, et leurs deux chats
- Lieu de vie : un appartement en ville, au loyer plafonné (quartier prioritaire), dont ils sont locataires
Les revenus de Julia et de son compagnon
À 26 ans, Julia occupe un poste de coordinatrice pour une association à but non lucratif, avec un statut non-cadre. Pour son temps plein, elle est payée 1 636€ chaque mois, un salaire qu’elle estime relativement peu élevé :
« Je ne dirais pas que je suis bien payée vu mon diplôme et ma charge de travail. Mais globalement, je trouve que les salaires sont assez bas en France, et le pouvoir d’achat plutôt faible. Par ailleurs, les salaires sont loin d’être proportionnels à l’utilité sociale des métiers exercés…
J’ai de la chance d’avoir un loyer très bas, car je vis avec mon copain. Si ce n’était pas le cas, je vivrais soit en coloc, soit chez mes parents, mais je ne pourrais pas loger seule. »
Son conjoint, quant à lui, touche 923€ par mois pour son métier d’accompagnant des élèves en situation de handicap qu’il occupe entre 23 et 28 heures par semaine. Toutefois, la séparation entre leurs budget étant très marquée, nous n’éplucherons que le budget de Julia dans cet article.
L’organisation financière de Julia et son compagnon
Pour organiser leurs finances communes, Julia et son compagnon s’organisent à 50/50 et paient chacun la moitié de leurs dépenses :
« On réfléchit à mettre en place un prorata car mon compagnon a un plus petit salaire. Mais on ne l’a pas encore mis en place, car nous avons la flemme de calculer à chaque fois. Du coup, on reste sur du 50/50 ! »
Un système qui fonctionne pour presque tout, sauf pour les dépenses qui créent des désaccords !
« Si je ne suis pas d’accord avec certaines dépenses communes, il les prend intégralement en charge… et inversement.
C’est arrivé assez rarement sur 7 ans, mais il lui est déjà arrivé d’acheter un coussin très cher pour un de nos chats par exemple. Je lui ai dit : “Si le chat l’utilise, je te rembourse la moitié“ mais évidemment, il ne l’a jamais utilisé… Du coup il l’a payé tout seul ! À l’inverse, j’ai tendance à emmener les chats un peu trop tôt chez le vétérinaire là où mon copain préfère attendre un peu. Dans les cas où ce n’était pas nécessaire et où finalement, ce n’était pas justifié, j’ai payé l’intégralité. »
Les dépenses de Julia
Comme dans une majorité des cas, le poste de dépenses principal de Julia se trouve pour son loyer. Pour son appartement de 59 m2 dans une grande ville, elle et son conjoint se partagent à égalité un loyer de 613€ par mois. Le logement se trouvant dans un quartier prioritaire, son coût est plafonné, un avantage non négligeable qui s’accompagne aussi d’inconvénients majeurs : le taux d’humidité y est très élevé.
Julia paie donc 306€ mensuellement pour se loger. Cette somme inclut certaines de leurs charges, comme le chauffage et l’eau. Pour l’électricité, elle règle là aussi la moitié de la facture, ce qui équivaut à 40€ par mois.
Côté technologie, elle paie en tout 27€50 toutes les quatre semaines pour sa part de leur abonnement internet, la moitié de l’abonnement Amazon Prime du couple, une part d’un abonnement Netflix partagé à plusieurs, ainsi que son abonnement téléphonique.
À cela s’ajoutent 35€ d’assurances diverses qui couvrent sa part de l’assurance habitation commune, sa moitié de l’assurance santé pour leurs félins de compagnie, une assurance pour son vélo, et une assurance jeune conductrice lorsqu’elle utilise la voiture de ses parents. Cela arrive de manière ponctuelle, et lui coûte en moyenne 25€ d’essence chaque mois.
« Nous avons la chance d’avoir un marché de producteurs à proximité »
La jeune femme l’explique, le couple sépare aussi les dépenses alimentaires :
« On partage juste quelques aliments avec mon copain (le riz, ou les patates par exemple), mais on mange différemment, donc on sépare nos courses. J’essaie de beaucoup cuisiner et de peu manger à l’extérieur. »
Elle dépense environ 200€ par mois pour son alimentation, en se fournissant principalement au marché de producteurs proche de chez elle. Les prix sont assez bas, tout en permettant de rémunérer les agriculteurs et de profiter du circuit court.
« C’est une chance, car les prix des fruits et légumes frais sont bien plus élevés en supermarchés. Surtout avec l’inflation actuelle : la dernière fois que je suis passée en grande surface, le kilo de bananes était à plus de 2€, alors que je le paye 0,50€ au marché, par exemple. »
Elle achète le reste du nécessaire en grande surface, notamment les produits pour les chats : litière, croquettes ou pochons, qui lui coûtent 35€ mensuels.
« Même si je vis en ville, j’y sors peu »
Les livres et la nourriture font partie des craquages réguliers de Julia, qui aimerait réduire un peu ces dépenses, et admet y faire plus attention depuis quelque temps :
« Parfois, je dépense pour de la nourriture à l’extérieur alors que j’ai le frigo plein : si je n’ai pas trop le moral, je n’ai pas envie de me prendre la tête sur les menus ou les courses, alors je vais acheter à emporter. C’est assez émotionnel, et ces derniers temps, j’ai réussi à éviter un peu plus.
Pour les livres, j’essaie de réduire aussi mais c’est difficile, car je n’aime pas emprunter en médiathèque. »
Elle estime son budget nourriture à emporter (pour une glace, une gaufre de temps en temps, ou bien un plat) à une cinquantaine d’euros par mois. Le montant de ses achats en librairie s’élève à une vingtaine d’euros.
Sa dépense en loisirs la plus fixe lui sert à payer une demi-pension équestre : chaque mois, elle paie 100€ pour participer aux frais de pension d’un cheval, en échange desquels la propriétaire de celui-ci lui permet de passer le voir pour s’en occuper ou pour le monter deux ou trois soirs par semaine. En dehors de ça, elle dépense peu en sorties :
« Je vais rarement dans les bars, et quand j’y vais, j’ai tendance à prendre un verre d’eau car je ne bois pas d’alcool.
Nous n’allons plus trop au restaurant non plus : c’était une habitude fréquente que nous avons perdu depuis le Covid. Nous avons pris le goût du fait maison, et avons de plus en plus de mal à apprécier un menu à 15€ qui ne sera pas super, finalement. Autant acheter des produits frais au marché, et cuisiner nous-même ! Pareil pour les cinémas, les billets sont très chers, alors nous avons pris l’habitude du streaming… Finalement, même si je vis en ville, j’y sors assez peu. »
« Il faudrait mettre de côté pendant 3 mois pour un jean de qualité »
Dans son budget, elle prévoit aussi 100€ par mois pour s’acheter des vêtements.
« Je ne m’habille que chez H&M, parce que c’est ce qu’il y a de moins cher. Mais même là-bas, les prix ont augmenté ces derniers temps, alors que les fringues ne sont pas de très bonne qualité et s’abîment vite.
Parfois, je me dis “il faudrait que je mette de l’argent de côté pendant 3 mois pour m’acheter un jean de bonne qualité et durable“. Mais la dernière fois que j’ai essayé, le jean a craqué au bout de 6 mois… Par ailleurs, j’ai un poids qui varie beaucoup, ce qui rajoute un facteur. J’ai beau essayer de faire des efforts, là-dessus, c’est difficile de faire mieux. Surtout que le shopping me stresse. »
Cette augmentation des prix qui concerne presque tous les secteurs la préoccupe beaucoup :
« L’inflation m’inquiète beaucoup. Je la ressens sur mon budget et ces derniers mois, je sens la baisse de pouvoir d’achat sur mes courses, je vois le prix de l’énergie ou de l’essence augmenter. Moi, je peux encore faire avec pour l’instant, mais pour les familles avec des enfants ou pour les plus précaires, ça doit être très difficile. Et la prime censée aider a été dérisoire. »
Le rapport à l’argent de Julia
Une fois ces frais fixes pris en charge, elle compte environ 300€ de dépenses imprévues chaque mois : un rendez-vous imprévu chez le vétérinaire, des achats utiles, ou encore des cadeaux, pour lesquels elle aime mettre le prix.
« J’aime bien faire des beaux cadeaux d’anniversaire : bien réfléchir au cadeau qui va faire plaisir, personnalisé, et y mettre le prix, parfois jusqu’à 100€ de budget. J’ai la hantise des petites babioles. On dit que c’est l’intention qui compte, mais moi j’aime pas trop ce proverbe ! Je préfère qu’on ne m’offre rien plutôt que de m’offrir des trucs pas pratiques. »
Un fonctionnement en lien avec son rapport à l’argent, parfois ambivalent :
« J’ai un rapport assez compulsif à l’argent, à l’inverse de mon copain qui est bien plus économe. Je n’ai pas vraiment été éduquée à gérer un budget ou à épargner, du coup je peux dépenser sans réfléchir, mais je travaille là-dessus. J’essaie de dépenser de plus en plus pour des choses utiles, que je vais pouvoir garder longtemps.
Mais dernièrement, dans cet esprit, j’ai acheté une machine à faire des pâtes avec un séchoir qui m’a coûté assez cher, et finalement, je l’utilise une fois par an… »
Épargner pour rembourser son emprunt étudiant
Petit à petit, Julia arrive à épargner de plus en plus. Son objectif ? Epargner 600€ par mois, pour pouvoir rembourser son prêt étudiant en une fois :
« J’ai contracté un prêt étudiant de 6 980€ pour une formation sur le développement durable, que je commencerai à rembourser sur 5 ans en octobre. Pour l’instant, je ne rembourse que l’assurance du crédit, à 5,69€ par mois. Mais j’espère pouvoir le payer d’un coup dès que possible ! »
Merci à Julia de nous avoir ouvert ses comptes !
Pour participer à la rubrique, écrivez-nous à l’adresse : jaifaitca[at]madmoizelle.com en indiquant en objet « Règlement de comptes » et en vous présentant en quelques lignes.
Si jamais vous souhaitez commenter cet article, rappelez-vous qu’une vraie personne est susceptible de vous lire, merci donc de faire preuve de bienveillance et d’éviter les jugements.
Crédit photo : Viki Mohamad / Unsplash
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