Journée mondiale du droit à l’IVG
C’est la journée mondiale du droit à l’avortement. Alors que de nombreuses idées reçues circulent au sujet de cet acte médical, qu’un très grand nombre de pays continuent de l’interdire, poussant les femmes qui veulent y avoir recours à entrée dans l’illégalité, une mobilisation globale est prévue.
En Europe, une coalition de mouvements pro-choix s’est réunie autour du mot d’ordre « Avortement, les femmes décident » et de nombreuses manifestations sont prévues.
– Article initialement publié le 24 janvier 2017
— L’illustration de cet article provient de l’Instagram de @sergekalika
Edit : cet article a été mis à jour pour clarifier la distinction entre avortement et grossesse involontaire
Ils sont plusieurs milliers à avoir défilé, à Paris ce dimanche 24 janvier,
contre l’avortement. Une manifestation qui n’a rien d’anodine à quelques mois de l’élection présidentielle.
Depuis un certain temps, la question du droit à l’IVG — qui semblait pourtant enterrée depuis longtemps — est remise sur la table via des actions de plus en plus nombreuses. On peut par exemple parler de ces publicités contre l’avortement publiées dans les pages du Figaro il y a deux semaines.
Il faut dire qu’en France, 218 100 avortements ont été réalisés en 2015. Un nombre trop élevé pour de nombreux anti-choix, dont les méthodes de propagande, récemment rendues illégales par l’extension du délit d’entrave, visent à dissuader les femmes d’avoir recours à l’IVG.
Sauf que ce n’est pas en restreignant le droit ou l’accès à l’IVG que l’on réduit le nombre d’IVG pratiquées.
Une fois pour toutes : interdire d’avorter n’empêchera pas les gens d’avorter
Chaque année, 47 000 femmes meurent des suites d’un avortement à risque selon l’INED. Par « à risque », comprenez qu’il s’agit d’une interruption de grossesse souvent clandestine, réalisée dans de mauvaises conditions sanitaires (personnel non qualifié, manque d’hygiène, grossesse trop avancée).
En clair, ce n’est pas l’interdiction de l’IVG qui empêche les gens d’y avoir recours…. Et le pire, c’est qu’on en meurt. Cette interdiction encourage à se tourner vers des solutions bien moins heureuses : avortement clandestin d’un côté, grossesse non-désirée menée à terme de l’autre.
Le nombre d’IVG est quasiment le même entre les pays où elle est autorisée et ceux où elle est interdite.
L‘Organisme Mondial de la Santé vient appuyer cet argument puisqu’il dénombre un taux d’avortement de 37 pour 1 000 femmes dans les pays où il est interdit, contre un taux de 34 pour 1 000 dans ceux où il est autorisé, pour la période de 2010 à 2014. En résumé : cette méthode est un fiasco.
Bien entendu, mon discours n’est pas de dire que l’avortement est une solution facile, évidente ou encore une alternative à la contraception. À ce sujet je rappelle d’ailleurs qu’en France, les deux tiers des femmes qui ont recours à l’avortement le font suite à un échec de contraception.
L’IVG doit simplement rester un choix. Et l’interdire n’est pas la solution, pour faire baisser le nombre de grossesses involontaires.
La solution pour éviter l’IVG se prépare bien en amont
La question de la réduction du nombre de grossesses involontaires n’est cependant pas vaine. Il y a en fait bien un moyen d’y arriver : par l’éducation sexuelle.
Un tiers des personnes qui recourent à un avortement ont des rapports sexuels sans protection. Il ne faut pas les blâmer. Ce qu’il faut blâmer, c’est bel et bien le fait qu’elles n’aient pas eu l’éducation à la contraception pour les prévenir des risques qu’elles encourraient.
Chloé P. a pu joindre au téléphone Véronique Séhier, co-présidente du Planning Familial. Elle explique l’importance de cette sensibilisation dès le plus jeune âge :
« Il est important de développer une éducation à la sexualité dès le plus jeune âge, et d’être capable d’avoir un message positif, bienveillant sur la sexualité, et dans de bonnes conditions. La loi prévoit maintenant trois séances par an dans les écoles, de la primaire à la terminale.
C’est très important, d’autant plus que les jeunes ne veulent pas toujours discuter de contraception ou de sexualité avec leurs parents, il leur faut donc un référent neutre qui saura les informer. »
Une vraie petite révolution.
Autour de moi, la plupart des gens de mon âge n’ont jamais connu de cours d’éducation sur la contraception. Alors, si on n’apprend rien à l’école et que ses parents n’en parlent jamais, où peut-on apprendre à se protéger correctement ?
Le choix de la contraception à encourager, pour prévenir le besoin d’IVG
Maintenant, comment prévenir le besoin de recourir à une IVG pour les personnes sous contraception ?
Tout simplement en sensibilisant la personne de manière à choisir la contraception qui lui convient. Ce qui inclut de parler de contraception définitive (stérilisation). En la matière, hommes et femmes sont parfois infantilisés et leur choix remis en cause, voire rejeté !
Véronique Séhier pointe donc un triple enjeu quant au choix de la contraception :
« Pour qu’hommes et femmes aient le choix, il faut trois conditions : qu’ils/elles puissent être bien informé•es, que la contraception soit accessible, et enfin qu’elle soit remboursée. »
Pas besoin d’aller chercher midi à quatorze heures : le moyen le plus efficace de réduire les interruptions volontaires de grossesse est simplement d’éviter les grossesses involontaires.
En clair : soyez pour la contraception et… C’est tout
Entendons-nous bien : en France, on a le droit d’être contre l’avortement. On a même le droit de l’exprimer par tous les moyens que la loi autorise.
Il faut juste réaliser qu’être contre l’IVG n’est pas la solution pour faire baisser le nombre d’avortements. La seule chose que l’on peut faire efficacement, c’est d’informer au maximum sur la contraception et de la rendre la plus facile d’accès possible.
Quoi qu’il se passe, il faut garder une information en tête : même avec la meilleure des contraceptions, il y aura toujours des ratés. Il y aura donc toujours des personnes qui tomberont enceinte sans le vouloir, et il y aura donc toujours des interruptions volontaires de grossesse.
Alors laissons ces personnes avoir la possibilité d’y avoir recours en sécurité. L’IVG s’effectue désormais dans un cadre légal et sécurisé en France. Mais il y a bien eu, dimanche 22 janvier, une marche « pour la vie », c’est-à-dire contre le droit des femmes à disposer de leur corps.
Le droit à l’IVG revient dans les discours politiques, et pas sous les meilleurs auspices : on se souvient des 92 sénateurs ayant exprimé une position anti-choix en 2014, et plus récemment, de la lutte contre l’extension du délit d’entrave, des voix qui se sont élevées dans l’Église Catholique à ce sujet.
Comme le disait Simone de Beauvoir « n’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question ». Il est donc capital pour la santé des femmes de rester attentif à respecter leur droit à l’IVG.
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