Article publié le 20 novembre 2013.
Chaque 20 novembre, la communauté trans se réunit pour honorer la mémoire des personnes trans décédées.
Depuis 1998, cette date porte le nom de Journée du souvenir trans, en anglais Transgender Day of Remembrance ou TDoR, puisque c’est aux États-Unis que cette journée d’hommage est née.
En France, plusieurs associations organisent marches et rassemblements.
« C’est un moment pour rendre hommage aux personnes trans oubliées », explique à Madmoizelle Jill-Maud Royer, du collectif transféministe Toutes des femmes.
« Ce sont des morts dont la société se préoccupe assez peu, des morts qui sont presque acceptées par la société, comme allant de soi. »
L’origine du TDoR
C’est l’assassinat d’une femme trans qui est à l’origine de cette commémoration : Rita Hester, femme noire et figure de la communauté trans de Boston, âgée de 34 ans et tuée chez elle de plusieurs coups de couteau le 28 novembre 1998.
Aujourd’hui encore, l’enquête sur son meurtre n’a jamais été résolue, et le meurtrier jamais retrouvé.
Bien qu’elle remonte à plusieurs décennies, l’affaire est révélatrice du mépris des médias pour les personnes trans, et de l’indifférence générale à l’égard des violences transphobes. Le nom de Rita Hester reste peu connu, même au sein de la communauté trans.
Voilà pourquoi chaque année, à travers le monde, les personnes trans et celles et ceux qui les soutiennent, tiennent à rendre hommage aux victimes de la transphobie.
Un hommage aux victimes de meurtres transphobes, mais aussi aux victimes de la transphobie de notre société, comme l’explique Jill-Maud Royer :
« Il y a une surprévalence de suicide chez les personnes trans – comme dans le reste de la communauté LGBTI – qui est due à la transphobie, et qui se traduit par la rupture des liens familiaux, qui entraine de la précarité, qui fait aussi suite aux discriminations à l’emploi, aux discriminations au logement. Il y a aussi l’isolement, car les personnes trans sont très isolées.
Toutes les personnes trans qui meurent ne meurent pas assassinées, mais les violences sont régulières, elles laissent des traumas. »
La transphobie à échelle mondiale
À nouveau, c’est une année meurtrière qui s’achève.
Chaque année en amont du TDoR, le projet Trans Murder Monitoring mené par l’organisation Transgender Europe, publie son rapport sur les crimes de haine transphobe à travers le monde : 375 personnes trans ont été tuées en 2021, avec parmi les victimes, une immense majorité de femmes trans, 96%.
Parmi les communautés trans, certains groupes sont particulièrement exposés aux violences ; le rapport montre que 58% des personnes tuées exerçaient une activité liée au travail du sexe et que 43% des personnes trans tuées en Europe étaient migrantes.
En France, trois femmes trans ont été tuées cette année : Paula, Ambre et Ivanna. Depuis 2008, douze personnes trans ont été tuées en France, selon le rapport du projet TMM.
Un pays détient le triste record du plus grand nombre de meurtres transphobes : il s’agit du Brésil, qui concentre à lui seul un tiers des meurtres de personnes trans recensées à travers le monde.
Des chiffres terribles mais qui ne montrent qu’une partie de la réalité : « La majeure partie des données sont collectées dans des pays qui ont un réseau établi d’organisations trans et LGBTQI qui conduisent cette surveillance », précise TMM.
« Dans la plupart des pays, les données ne sont pas systématiquement collectées. La plupart des cas continuent de ne pas être signalés et quand ils le sont, ne reçoivent que très peu d’attention. »
En ce TDoR 2021, les personnes trans se recueilleront un peu partout en France. « La mort est très présente dans le militantisme trans », déplore Jill-Maud Royer. « Étant donné la nature de cette mobilisation, on peut souhaiter que des actions soient menées pour que cette journée disparaisse un jour »
À Paris, une marche commémorative et revendicative menée par l’association Act Up-Paris débutera à 14h30 à Gare du Nord. Un rassemblement organisé par l’association Acceptess T se tiendra à proximité de l’Hôtel de Ville, place Saint Gervais à 18h.
Les manifestations de l’organisation féministe Nous Toutes contre les violences sexistes et sexuelles se tiendront à la même date, ce qui n’a pas manqué d’inquiéter la communauté trans.
Auprès de Madmoizelle, Nous Toutes a affirmé s’engager à ne tolérer aucun propos ou slogan transphobe dans le cortège, et appellera à l’issue de la manifestation à se joindre au rassemblement organisé par l’association Acceptess T.
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Crédit photo : Petar Milošević, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
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