Aujourd’hui, nous allons parler d’un fantasme qui hante nos ovaires depuis l’invention du charbon et des retards chroniques : j’ai nommé le fantasme du train-couchette. En tant que pseudojournaliste spécialisée dans les terrains glissants*, les sujets d’investigation gros, longs et durs*, j’ai tenu à faire l’expérience du coït en milieu roulant. Récit d’un naufrage annoncé.
* Ouvrez grands vos chakras et votre esprit mal placé à chaque astérisque. Rrrr.
Rien ne nous prédisposait, en ce doux et chaud jour de septembre, à commettre un coït pré-marital dans un lieu public. José et moi-même devions endurer les mille périls d’un TGV Paris-Strasbourg, et nous nous étions préparés à affronter avec bravoure les cinq longues heures qui nous séparaient de la capitale.
Mais par un surprenant hasard, nous ratâmes le dernier train de jour à cause d’une sombre histoire de caleçon oublié dans l’appartement. Et en dépit du fait qu’à dix minutes près, nous avons couru à la vitesse d’Usain Bolt, nous ne pûmes qu’assister, impuissants et penauds, au départ dudit train. Si nous voulions être dans la capitale dès le lendemain, il ne nous restait plus qu’un train de nuit. Résignés, nous attendîmes alors cinq longues heures.
Un quart d’heure avant l’heure H, nous avons bravé avec succès l’épreuve du compostage de billet. Mais la couchette dans laquelle nous nous trouvions était habitée par quatre jeunes hobereaux qui beuglaient dans un anglais poussif les paroles d’un rap US approximatif. J’ai alors traîné José de wagon en wagon, dans l’espoir de trouver un compartiment inhabité qui abriterait nos ébats et nos ronflements.
À cet instant, José, qui était fort las d’endurer les affres des trains-couchettes, était plus d’humeur à dépecer un chaton roux qu’à s’adonner aux plaisirs de la chair. Mais, aveuglée par l’ovaire géant qui me tient lieu de cerveau, je décidais de profiter de cette occasion pour assouvir le fantasme qui me colle aux muqueuses depuis mon premier tampon : faire l’amour dans un train
. Preuve que le destin était avec nous, nous arrivâmes dans un wagon où il n’y avait pas l’ombre d’un chat, et où nous nous engouffrâmes à la vitesse d’un préservatif en orbite sur Mars.
Après mains efforts et quelques ratés techniques, nous avons réussi à nous emboîter harmonieusement. Et soudain, ce fut le drame : alors que nous étions à deux doigts de connaître le septième ciel et ses environs, une voix d’outre-tombe se fit entendre à la porte du compartiment ; et en moins de temps qu’il ne faut pour dire « contrôle des billets siouplait », une sinistre main tentait d’ouvrir notre porte. À ce moment précis, j’étais moins vêtue qu’une danseuse du Crazy Horse, le souffle court et les quatre fers en l’air. Il m’était impossible d’atteindre mes vêtements, délaissés sur la couchette du haut, et le contrôleur allait forcer le cadenas d’une seconde à l’autre. José, mû par un réflexe de survie, me lança une couverture et, dans un élan héroïque, enfila son pantalon afin d’éviter de commettre un attentat à la pudeur.
Il était temps : deux nanosecondes plus tard, trois contrôleurs en grand uniforme déboulaient dans le compartiment, nous vilipendant sèchement : en effet, nos hormones en folie nous avaient conduits vers un wagon réservé aux voyageurs arrivant en la prochaine gare, et les contrôleurs, en voyant le verrou refermé, avaient immédiatement compris qu’il y avait baleine sous gravier. José, braguette ouverte et membre viril encore couvert de latex, dut retourner son sac pour présenter son billet. Quant à moi, je me contorsionnais comme une danseuse orientale aux lombaires brisées pour que la couverture ne laisse rien paraître de mon épiderme. Tels Adam et Eve, nous fûmes chassés du Paradis et contraints de regagner nos places dans un compartiment qui sentait la frustration et les chaussettes sales.
Morale de cette histoire : l’amour dans le train doit être un concept merveilleux, mais il suppose un minimum d’organisation. Pour ne pas subir l’humiliation d’être découverte fesses en l’air par une horde de contrôleurs, achetez les six places de votre compartiment afin de goûter à une quiétude absolue. Et même si cela implique que vous creusiez le jardin de vos parents pour y trouver un puits de pétrole, ne perdez jamais espoir : dans la vie, on a jamais rien sans rien.
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glousser moi plutot saliver