À l’époque fort lointaine où j’étais une jeune et innocente pucelle, j’allais chez les scouts. Cela impliquait de chanter des génériques de dessins animés autour de feux de camps, de vendre des calendriers dont les recettes alimentaient mon argent de poche, de camper dans des endroits sauvages et désertés par la civilisation (le jardin de ma grand-tante, par exemple), et de ripailler gaiement au son des flûtiaux. Bref, j’adorais les scouts et les scouts me le rendaient bien.
Jusqu’à ce jour sinistre de novembre où la troupe et moi-même allâmes passer un week-end dans une bourgade reculée, comme de coutume. Au sein du groupe, on acceuillait un petit nouveau : Jean-Edouard. Sitôt que je l’ai vu, un grand brasier s’est allumé dans ma culotte en coton, et j’ai éprouvé pour lui une flambante convoitise. On pourrait trouver étrange le fait d’éprouver quelque attirance pour un individu aussi couvert de boutons qu’une calculette Casio, mais les ovaires ont leurs raisons que la raison ne connaît point – et que celle qui n’a jamais bavé bouche ouverte devant autrui me jette la première capote usagée.
Après avoir été à la messe, chanté l’intégrale de Claude François et englouti notre propre poids en grenadine, nous nous couchâmes à une heure fort tardive – vers 22 heures 30, donc. Nous étions logés dans un presbytère – avec un nom pareil, faut pas chercher – et, par un mystère aussi épais que le QI de Loana, les filles et les garçons n’étaient point séparés.
Je me rapprochais donc insidieusement de Jean-Edouard, et nous conversâmes de choses et d’autres. Alors que le sommeil gagnait nos compagnons d’infortunes, nous décidâmes de leur fausser compagnie et nous nous réfugiâmes dans une salle annexe, sous le regard accusateur d’un christ en croix. Après quelques tendres paroles (quelque chose comme « Oh oui Jean-Edouard, enlèves ton gros foulard et attache-moi à l’autel avec »), nous fûmes aussi dévêtus que des candidats de Secret Story.
C’est pour ce genre de conneries que je suis mort sur la croix ? Bah bravo.
Mais lorsque j’essayais d’insuffler la vie en son engin viril en berne, je fus confrontée à un cruel échec : le bougre demeurait aussi vif qu’un Jean-Pierre Coffe sous Lexomil, aussi rigide qu’un mollusque baignant dans du formol, aussi prêt à l’emploi qu’un meuble Ikea livré en 84 parties avec 33 clous et 8 tournevis. Après de longues minutes passées à tenter l’impossible, nous rejoignîmes, honteux et confus, nos chastes sacs de couchages.
L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais Jean-Edouard, rongé par quelque étrange remords, décida de conter toute l’histoire à sa maman. Sa génitrice, scandalisée, alerta le chef scout en charge de notre groupe, qui alerta à son tour mes parents, ses collègues, nos camarades et une bonne moitié de la ville.
Résultat des courses ? Mon groupe scout m’a pris pour un vil suppôt de Satan, j’ai autant de chances d’entrer au Paradis qu’à l’ENA et il faudra que je vende bien des calendriers pour alléger mon lourd karma. Mais qu’importe, chers amis : cela me fera des souvenirs à raconter à mes futurs petits enfants quand je serai vieille et grabataire.
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
Je pense que ça dépend vraiment vraiment d'un groupe à l'autre.