Pendant mes années de célibat actif, – période de non attachement à autrui, mais riche en découvertes sensorielles -, j’ai eu l’occasion de revoir mon amour de jeunesse une dizaine d’années après qu’il soit parti vivre loin de ma contrée natale. Une occasion comme celle-ci ne se présentant pas tous les jours, j’ai décidé d’en profiter.
Le fantasme du fantasme de jeunesse
J’en rajoute un peu beaucoup quand je parle d’amour de jeunesse ; au collège, il était le premier à m’avoir fait frétiller les ovaires avec son regard espiègle et son côté borderline. Un jour, à 12 ans, je lui ai demandé s’il voulait « sortir avec moi » ce à quoi il a répondu qu’il était pas trop chaud, mais qu’il voulait bien voter pour moi à l’élection de délégués de la classe en contrepartie. Maintenant que j’ai la vingtaine bien tassée, je me dis que ce compromis, c’est un peu comme si je faisais comprendre à quelqu’un que j’avais très envie d’un cunnilingus et qu’il me répondait « tu veux pas des pâtes, plutôt ? »
Alors quand quelques années plus tard, j’ai reçu une friend request de ce bel enfant sur ce fameux réseau social que nous connaissons toutes, j’aurais été trop bête de faire ma fière et c’est un sourire franc que j’ai adressé à mon ordinateur en acceptant cette requête que j’avais, depuis le temps, oublié d’espérer. Très vite, il m’a envoyé un message pour prendre de mes nouvelles et me dire qu’il avait envie de me revoir. Ce qui fut chose faite, deux semaines plus tard.
L’occasion fut vite trouvée : profitant de l’absence de mes parents, partis à un milier de kilomètres, j’avais organisé une soirée chez moi. Il m’a donc semblé tout à fait logique de l’y convier, ayant ainsi une bonne excuse pour le revoir sans pour autant donner l’impression d’organiser un rendez-vous en tête à tête.
Choper en soirée : la grande aventure
Lorsque nos yeux se sont croisés, rien ou presque n’avait changé. Si j’avais la certitude absolue de ne pas vouloir entamer une relation sérieuse avec lui, la partie subnombril de mon corps était intenable, – d’autant plus que le mignon pré-pubère avait laissé place au sosie presque parfait d’Ezra Miller. Comme une belle revanche pour la pré-adolescente au physique ingrat souhaitant lui tenir la main que j’étais jadis, j’avais très envie de lui faire découvrir le dessous de ma couette. La seule différence, c’est que cette fois-ci, je pouvais percevoir dans son regard la réciprocité du trouble que je ressentais
.
Au cours de la soirée, on s’est plus ou moins tout le temps tournés autour, des regards appuyés aux mains qui se baladent en passant par les lèvres qui se rapprochent et s’éloignent, pour faire monter la pression. Au bout d’un moment, n’y tenant plus, on a voulu s’éclipser un peu des quelques trente autres convives. Mais où aller pour batifoler en toute impunité, sachant que :
- La porte de ma chambre ne fermait pas à clé,
- Le lit de mes parents, c’était no way,
- J’ai peur des insectes, donc pour la pelouse au fond du jardin, c’était mal barré,
- Les autres pièces étaient bondées de gens en train de festoyer,
- Avoir des relations dans les toilettes ? Je m’y suis toujours refusée.
En conséquence de quoi, j’ai opté pour le chalet servant à abriter les invités de mes parents qui ne souhaitent pas conduire alcoolisés.
Une fois confinés dans ce petit espace fermé à clé, les volets déjà clos, nous avons pu nous jeter l’un sur l’autre en toute discrétion. Fait plutôt rare lorsqu’on a une relation sexuelle pour la première fois avec un partenaire que l’on connait peu, nos gestes étaient absolument coordonnés. Si l’un commençait à faire quelque chose, l’autre savait exactement ce qu’il souhaitait. C’était à la fois doux et passionné et cette combinaison, ajoutée à l’ivresse, m’a amenée à ne plus prêter attention à rien, si ce n’est le plaisir évident que je prenais.
Se faire observer pendant l’acte > la mort
Je ne faisais plus attention à rien, donc ; il est vrai qu’inconsciemment, j’entendais en bruit de fond des mouvements derrière la cloison du chalet, mais je n’avais pas à m’inquiéter : il était logique d’entendre de l’agitation, une grosse soirée à en rendre fou le quartier ayant lieu chez moi.
Je ne sais pas ce qui m’a fait sortir de ma torpeur physique et mentale, au bout d’un moment, peu avant les spasmes du bas-ventre. Ce que je sais, en revanche, c’est qu’alors que je venais de repousser la couette et de changer de position pour me mettre sur le jeune homme telle une Calamity Jane nue comme un ver sur son fidèle destrier, j’ai entendu une petite voix chuchoter très fort « hé les gars ! C’est maintenant qu’il faut regarder, venez ». Grosse erreur de ma part : de peur et de curiosité, je me suis levée puis retournée brusquement vers la fenêtre, laissant entrevoir le reste de mon anatomie à une amie qui n’en demandait pas tant.
Tout aurait été tellement différent si j'avais pensé à éteindre la lumière…
Car en effet, mes convives, alcoolisés, avaient réussi à entrouvrir les volets du chalet et se relayer pour voir un bout de fesse. Je ne vais pas vous mentir : je n’ai jamais connu une pire descente de désir (et j’espère ne plus jamais expérimenter ce genre de sensations terriblement gênantes). Pour vous donner une idée, sur l’échelle du malaise, se faire observer pendant l’acte par une trentaine de personnes est pire que :
- Arriver en chaussons au collège,
- Flatuler pendant un cours d’escalade,
- Faire l’amour dans les toilettes d’un train en marche,
- Croiser votre mère à une soirée avec votre ex à son bras.
Cependant, voyons les choses du bon côté : je n’ai plus aucun secret pour mes amis, qui me connaissent désormais sous toutes les coutures.
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Un mythe s’effondre ...