Si je vous dis Charles Lee Ray, ça vous parle ? Et sortilège vaudou ? « Ade Due Damballa » ? Non ? C’est que vous ne connaissez pas vos classiques. Je m’attaque aujourd’hui à un traumatisme d’enfance, à un monument (qui a été démoli depuis, mais nous verrons cela plus tard). Des noms mythiques, il y en a plein, mais celui- ci m’a longtemps fait grincer des dents : Chucky.
Si comme moi vous êtes de la génération Chair de Poule, la trouille des jouets et autres symboles de l’enfance qui pètent un câble ne vous est pas inconnue. Nous avons eu droit au « Ca (« Il » est revenu) » de Stephen King adapté pour la télévision sous forme de téléfilm en deux partis, en 1990. Un clown tueur avec une mâchoire à en faire pâlir un Gremlin, et qui vous arrache le bras en vous faisant croire qu’il va vous donner un ballon, ça marque.
La fameuse série Chair de Poule nous a plus tard raconté l’histoire d’un pantin ventriloque maléfique – mon oncle a eut la merveilleuse idée de m’offrir deux pantins la même année : sur 365 nuits j’ai dû dormir à peu près 34 minutes.
Mais avant tout ça, en 1989 précisément, sortait Child’s Play – Jeu d’enfant pour la version française. L’histoire d’un tueur en série, Charles Lee Ray donc (petit patchwork des noms de trois célèbres criminels : Charles Manson, Lee Harvey Oswald et James Earl Ray) qui se fait abattre dans un magasin de jouets. Heureusement pour lui, il touche sa bille en vaudou et transfère donc son âme dans le corps d’une poupée « Brave Gars » (« Good Guys » en version originale, ça fait nettement moins crétin). Poupée qui va donc atterrir dans les petites mains potelées d’un certain Andy Barclay (son nom m’a toujours fait beaucoup rire), qui va rapidement se rendre compte que le jouet qu’il désirait tant a comme un léger disfonctionnement. Or, Chucky peut uniquement transférer son âme dans le corps de la première personne à qui il avoue son secret, c’est donc Andy qui va devoir trinquer. Le reste n’est qu’une suite de tueries, de poursuites, bref ça reste relativement banal si on fait bien sûr abstraction du fait que le méchant est une poupée rousse (ahah t’as capté mon super jeu de mots?). Le film contient également de nombreux effets spéciaux spectaculaires (non là c’est une blague par contre).
J’ai vu ce film (le 2 en fait) pour la première fois quand j’avais environ huit ans, chez le même oncle qui m’a offert les fameux pantins – je commence à croire qu’il me voulait du mal. Détail con : ma tante portait le parfum Shalimar, et je pouvais sentir cette odeur tout au long du film ce qui fait que pendant des années, j’ai lié ce parfum à Chucky – pour rendre [J.A.C.K.] inoffensive, il suffit donc de l’asperger de Shalimar. Elle se roulera en boule, pleurera, appellera sa mère et si vous avez de la chance, elle se pissera peut-être dessus. Vous l’aurez compris, Chucky a ruiné mon enfance. Je ne compte pas le nombre de crises d’angoisses que j’ai faites la nuit parce que j’avais peur que sa petite main caoutchouteuse m’attrape la tronche. La grosse blague c’est que peu de temps après j’ai déménagé et dans ma nouvelle chambre se trouvait… une poupée rousse bien moche qui lui ressemblait étrangement. Il a mis du temps à me laisser dormir tranquille ce bâtard de Chucky. Pourtant c’est vrai qu’en y regardant de plus près, il n’y a rien de bien traumatisant dans cette trilogie (je ne compte pas les deux derniers, j’en reparlerai plus tard) mais en même temps, vous avez pas huit ans, alors vous pouvez pas comprendre (sauf si vous êtes passées par là). Je vous parlais la dernière fois de ma liste noire, eh bien Chucky se trouve en tête. Si vous avez aussi un traumatisme d’enfance du même acabit, s’il vous plaît ne me laissez pas me ridiculiser toute seule et partagez vos expériences avec moi…
Dans le premier volet, le film met bien 45 minutes avant de devenir vraiment intéressant, c’est à dire avant de nous offrir du 100% Chucky. Avant ça, c’est plutôt suggestif, la caméra nous place souvent du point de vue de la poupée et en dehors du bruit affreux de ses petits pas rapides, il n’y a rien de bien flippant. Mais au bout de trois quarts d’heure, Chucky révèle son vrai visage, et l’aventure peut réellement commencer. Le problème avec sa tronche, c’est que n’importe quelle émotion est exprimée par une affreuse grimace, le genre de sale tête qu’on oublie pas. En plus il fait rien qu’à dire des gros mots.
Dans le deuxième volet, Chucky est plus féroce et tue un peu plus de monde. Il en a toujours après Andy, qui a été placé en famille d’accueil. Forcément, il est toujours coincé dans le corps de cette poupée, et a donc toujours besoin du petit Andy – qui est pourtant tellement, mais tellement mignon. Encore une petite blague : la phrase d’accroche sur l’affiche du film était « Sorry Jack… Chucky’s back ! ». C’est véritablement de la persécution et je continue à croire que je suis maudite et que Chucky veut ma mort. Ou juste bien me faire chier, et dans ce cas là c’est réussi. En gros le 2, c’est plus de violence, plus de gros mots, plus dégueulasse, une musique bien flippante à base de boîte à musique et un Chucky plus grimaçant que jamais.
Et dans le troisième volet, on retrouve Andy adolescent, à nouveau poursuivi par un Chucky plus vénère que jamais qui tient vraiment à lui casser la gueule. Ce film n’a pas énormément d’intérêt, c’est juste rigolo de voir l’évolution de Chucky, qui balance trois répliques cultes à la minute. On y rencontre aussi le gamin le plus débile de la planète qui est persuadé que Chucky est son meilleur ami et qu’une poupée qui jure à tout bout de champ, qui marche, et qui parle, c’est tout à fait normal et même super marrant. Naïveté, quand tu nous tiens. Surtout que la première phrase que Chucky lui balance est un merveilleux « Who the fuck are you ?! ».
La raison pour laquelle je ne souhaite pas mentionner les deux derniers épisodes de la saga, à savoir La Fiancée de Chucky et Le Fils de Chucky, est simple. Je les considère comme étant deux films complètement hors catégorie. Le personnage de Chucky y est totalement remanié et devient une caricature de pseudo humour noir sans aucune originalité. Ces deux derniers opus ne sont que des comédies, et n’ont absolument rien à voir avec les premiers volets – qui sont certes moins divertissant, mais ce sont les premiers.
Au final, Chucky ne vieillit pas si bien que ça. Les effets spéciaux sont tellement pourris qu’on a du mal à y croire, mais ses grimaces continuent néanmoins à me mettre mal à l’aise. Mais aujourd’hui je peux m’enfiler trois Chucky d’un coup et dormir comme un bébé – sans la lumière. Faut dire qu’il a tellement été décrédibilisé dans les deux derniers films qu’il n’a plus grand chose d’effrayant le lascar… Il parait qu’un sixième film serait en préparation, mais il y a tellement de suites et de remakes qui vont sortir dans les années à venir que ça ne suffit pas à m’émoustiller. Et puis il faudrait vraiment être un maître absolu de l’horreur pour rendre Chucky à nouveau effrayant.
En conclusion, là où nos chers amis Freddy, Jason ou Michael gardent leur panache même dans des films qui ont plus de 20 ans, Chucky se fane, s’effrite, et ne fait plus trembler grand monde. Et d’un côté, c’est tant mieux pour moi.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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