Peu importe son degré de célébrité, on peut, je crois, difficilement imaginer l’horreur que l’on ressent quand des photos de soi nu commencent à tourner et à être vues par des personnes à qui on n’avait pas choisi de les montrer. Y penser fait carrément mal au bide.
Il y a quelques semaines, Jennifer Lawrence (ainsi que de nombreuses autres stars féminines) a vu une grande quantité de ses sexpics dévoilées par un hacker, et n’avait pas réagi depuis. Dans un entretien publié dans l’édition du mois de novembre de Vanity Fair, elle revient sur cette épreuve, sur ce choc énorme.
Elle évoque l’angoisse de l’avenir (« J’avais tellement peur. Je ne savais pas comment ça allait affecter ma carrière ») et le coup de fil à son père pour lui apprendre ce qui était en train de lui arriver (« Quand j’ai eu à passer ce coup de fil à mon père pour lui dire ce qu’il se passait… Je me fiche de combien j’ai gagné pour
Hunger Games. Je vous promets, quiconque aurait le choix entre cet argent ou avoir à appeler son père pour lui dire que quelque chose de ce genre est arrivé… Ça ne vaut pas le coup. Heureusement, il était en train de jouer au golf, alors il était de bonne humeur ».)
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Elle a essayé d’écrire une déclaration suite aux évènements, en vain : « chaque chose que j’essayais d’écrire me faisait pleurer ou me mettait en colère. J’ai commencé à rédiger des excuses, mais je n’ai à m’excuser de rien. J’ai été dans une relation aimante, saine et incroyable pendant quatre ans. C’était une relation à distance : soit mon petit ami regardait du porno, soit il me regardait ».
Comme l’entretien est en anglais, on se permet de traduire ses propos. Des propos très justes et touchants d’une actrice très célèbre, certes, mais avant tout d’une femme qui ne mérite pas d’avoir son intimité la plus totale regardée par des millions d’internautes sans son consentement.
La vidéo du shooting pour l’édition de Vanity Fair dans laquelle apparaissent ces propos. Toute réflexion teintée de slut-shaming, même sous couvert d’humour, lèvera moult yeux au ciel. Pensez au repos de nos nerfs optiques : n’en faites pas.
Elle revient notamment sur certaines choses qui ont été dites, des réflexions postées ça et là, un peu partout, qui la montraient du doigt, disant qu’il fallait qu’elle s’y attende, vu son statut de star (certain•e•s ajoutant d’ailleurs qu’elle n’aurait jamais dû faire ces photos pour cette raison) :
« Ce n’est pas parce que je suis une personnalité publique, ce n’est pas parce que je suis actrice que je l’ai cherché. Ça ne va pas de pair. C’est mon corps, et ça devrait être mon choix, et le fait que ce ne soit pas mon choix est absolument dégoûtant. Je n’arrive même pas à croire qu’on vit dans ce genre de monde. »
Surtout que l’unique responsable est le hacker, qui a commis un délit puni par la loi. Caractère criminel de ce piratage qu’elle rappelle, parce que non, ce ne sont pas quelques photos qu’on regarde en rigolant un dimanche entre deux tartines de pain : c’est une violation de la vie privée. Ni plus, ni moins.
« Ce n’est pas un scandale. C’est un crime sexuel. C’est une violation sexuelle. C’est dégoûtant. La loi doit être changée, et nous devons changer. C’est pourquoi ces sites Internet sont responsables. Quelqu’un peut être exploité et attaqué sexuellement, et la première pensée qui traverse l’esprit de ces personnes d’en faire du profit.
Ça me dépasse tellement. Je n’arrive pas à concevoir qu’on puisse être à ce point détaché de l’humanité. Je n’arrive pas à concevoir qu’on puisse être si indélicat, si inélégant, si vide à l’intérieur. […]
N’importe quelle personne qui regarde ces photos perpétue l’infraction sexuelle. Vous devriez vous recroqueviller de honte. Même des gens que je connais et que j’aime disent « Oh, oui, j’ai regardé les photos ». Je n’ai pas envie de me fâcher, mais en même temps je me dis : je ne vous ai pas dit que vous pouviez voir des photos de mon corps nu. »
Jennifer Lawrence fait ici une mise au point ferme et réaffirme à qui l’aurait oublié son statut d’être humain, avant la célébrité, avant la gloire. Il n’y a pas de raison légitime de lui accorder moins de respect qu’on en donne aux gens qui ont des métiers plus « traditionnels ».
Et ce n’est pas parce qu’elle gagne particulièrement bien sa vie, qu’on imagine son quotidien complètement incroyable et enviable, qu’elle n’a pas le droit de vivre cette violation de sa vie privée, de son intimité, comme un choc, comme un vrai gros coup dur.
Depuis, elle s’est remise sur pied. « Le temps aide à guérir », a-t-elle déclaré. Et ça fait bien plaisir de le savoir.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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