Publié initialement en février 2022
La Daronne est la reine des conseils pas si cons enrobés d’une louche d’humour plus ou moins subtil. La voici de retour pour voler au secours d’une lectrice !
Chère Daronne,
Il y a quelques années, j’ai fait des photos un peu coquines. Rien d’extravagant, je pose en culotte topless. Je les ai envoyées à un mec avec qui je flirtais à l’époque. On a perdu contact et je n’y ai plus pensé, mais voilà… Les potes de ma nouvelle meuf ont retrouvé une des images sur un site dédié.
Déjà, j’avoue que j’ai bien la rage que ce con ait publié une photo confidentielle de moi sur Internet. Je sais que malheureusement ça peut arriver. Le problème, c’est que les potes de ma meuf sont restés bloqués là-dessus, certains ont même voulu la mettre en garde contre moi, car je ne me « respecterais pas »…
Elle, elle me soutient, mais ses potes lui en reparlent souvent et me regardent bizarrement quand ils me voient. Au début je me suis dit que ce n’était pas bien grave, mais maintenant je commence à avoir honte…
Je fais quoi ?
Betty
La réponse de la Daronne
Mon petit Haloumi grillé,
Je suis désolée que tu te retrouves dans cette situation difficile, à considérer avec sérieux. Si toutes les filles qui ont pris des photos olé olé un jour se retrouvaient sur Internet, ça ferait des paquets de meufs et moi comprise dedans, car il faut bien avouer que c’est une manière sympa de se chauffer.
J’essaye de rester légère, mais je suis consciente que l’événement peut s’avérer extrêmement traumatisant et j’aimerais te témoigner tout mon soutien. Sache également que tu peux porter plainte si tu le souhaites ; à titre informatif, la police est obligée de recevoir cette plainte. Si elle est refusée, tu peux t’adresser directement au Procureur de la république.
Je ne suis pas là pour te dire ce que tu dois faire, et tu peux décider de ne pas donner suite, l’important in fine, c’est que tu puisses te sentir en paix et à l’aise. En attendant, préserve-toi et ne laisse personne te faire sentir coupable.
Comme l’indique la Daronne, il s’agit ici de revenge porn, c’est un délit, c’est du cybersexisme, et on peut aller porter plainte au commissariat quand on en est victime.
« Partager sans consentement des contenus à caractère sexuel (même si la victime a consenti à la captation de ces contenus !) est passible de 2 ans de prison et 60 000 € d’amende. »
En ce qui concerne les photos :
« Il est également possible de faire valoir son ”droit à l’oubli” pour faire retirer des premières pages de recherche iIternet les contenus en cause. »
Il est possible de signaler ce délit — qui peut être puni par la loi — en ligne, mais cela ne remplace pas le dépôt de plainte.
Vous trouverez comment rassembler des preuves ici et des vidéos tutoriels pour le signalement ici.
Il faudrait que la honte change de camp ! Celui qui devrait se sentir mal, c’est l’abject individu qui a publié ces clichés sans ton accord. Et mon petit doigt (lui-même attaché à ma petite main, que je rêverais de lui mettre dans la tronche) me dit qu’il va très bien, merci… Pour l’instant !
C’est quoi cette société du victim blaming ?
Je me rappelle ce tweet de la police nationale qui conseillait aux jeunes filles de ne pas envoyer de nudes aux garçons, car ces pauvres bougres pleins d’hormones pouvaient être tentés de les publier après. Bravo ! Merci les gars ! Champions du monde !
Le tweet a été effacé depuis, mais reflète bien ce que beaucoup de personnes pensent encore : les filles seraient responsables des ardeurs et des comportements de ces messieurs et Y EN A RAS LE FESSIER. Marre du victim blaming.
Je sais que tu le sais, mais je vais le répéter quand même : tu n’as RIEN fait de mal. Tu t’es amusée et tu as fait confiance à quelqu’un. Aucune raison d’avoir honte. Imagine une vie où on ne s’amuserait jamais et on ne pourrait faire confiance à personne ? Autant se jeter direct dans une rivière de lave en fusion.
Ces photos chaudes ne disent rien de toi. Elles nous renseignent seulement sur l’auteur de leur publication et nous permettent d’en déduire qu’il s’agit d’un immonde connard (j’allais dire porc, mais je n’ai rien contre les cochons qui sont au demeurant des animaux charmants).
À la limite, de toi, elles me permettent de déduire que… tu as kiffé un gars un jour et que tu as eu envie de lui faire plaisir et de te faire plaisir… CHOQUANT, n’est-ce pas ?
Ces situations permettent de faire le tri
Ça en dit aussi long sur l’état d’esprit des potes de ta meuf. OK super, ils ont vu la culotte et les boobs d’une nana qu’ils connaissent vaguement… génial les gars, dis donc, votre vie est pas-sion-nante.
J’ai beau savoir que la société est ce qu’elle est, je trouve quand même qu’il y a un moment où elle a bon dos, cette société. C’est vrai que c’est plus facile de continuer encore et encore à perpétrer des idées archaïques qui incriminent les femmes dès qu’elles bougent un orteil plutôt que de, je ne sais pas moi, au hasard, se remettre en question et se déconstruire un brin.
Moi je vais te dire, ces crétins ne méritent pas de faire partie de ta vie. Même de loin. À la limite de la limite de la limite, si ta copine décide de taper du poing sur la table et qu’il s’avère que les membres du groupe admettent leur bêtise et décident de changer d’attitude non seulement envers toi mais également envers ce genre de sujet en général et ad vitam, tu peux peut-être envisager de « pardonner ».
Mais si ce n’est pas le cas, NEXT, CIAO LES NAZES. Tu n’as pas le time pour passer ne serait-ce que quelques minutes avec des minus adeptes du slut shaming.
Et si ta meuf ne se positionne pas très clairement en ta faveur, je suis désolée, mais il va falloir aussi repenser la relation. Tu veux quelqu’un qui te soutienne, pas qui sous-entende par ses silences que tu as bien mérité de te faire traîner dans la boue. Et puis, c’est pas un peu bizarre d’être une femme et d’avoir des potes adeptes du slut-shaming ?
Crois-moi : des gens qui sont prêts à te respecter et à te défendre à haute voix, il y en a. Regarde, moi je ne te connais même pas et je le fais, alors pourquoi pas ta meuf ?
Allez, je te laisse, j’ai des culs à botter.
La bisette,
Ta Daronne
Crédit de Une : Pixelshot
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
J'espère t'avoir éclairée avec mon expérience, et que tu as une meilleure compréhension de ce problème. Surtout qu'au final, c'est pas hyper plaisant pour toi non plus de t'entendre dire que tu es moins féministe à cause de ton orientation sexuelle... C'est pas comme si tu y pouvais quelque chose.
Merci d'avoir émis ces réserves sur le contenu de l'article, ça a permis de mettre en lumière des sujets importants et qui sont peu discutés