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"©Brandon Nickerson/Pexels"
Santé

Je suis sortie avec 2 gros fumeurs de joints, et c’était loin d’être facile

À l’occasion du 20 avril, journée symbolique de consommation de cannabis, cette Rockie de 26 ans se replonge dans sa vie étudiante. Elle raconte les deux fois où elle est tombée amoureuse d’un consommateur de cannabis, et pourquoi elle tient désormais cette drogue loin d’elle.

J’ai grandi avec une estime de moi plutôt pourrie. À l’adolescence, j’avais des crushs sur les mal-aimés, ceux qui se faisaient détester, parce que je pensais savoir comment les comprendre.

Je m’attachais aux mecs trop âgés, aux harcelés, aux hommes implicitement mal dans leur peau, temporairement ou définitivement.

Ma vie étudiante et mes premières expériences avec la weed

Après avoir connu mes premiers « copains » (relations de quelques semaines), je suis arrivée en études supérieures avec l’impression d’avoir gagné assez confiance en moi pour ne plus courir après les mauvaises personnes.

Mes années de DUT, je les chérie encore aujourd’hui comme des années « d’initiation à la débauche ».

Une promo soudée, remplie de groupes d’amis poreux entre eux, des soirées improbables. On se voyait tout le temps, pour de grosses soirées ou de petits apéros.

Quelques potes avaient des logements étudiants et étaient toujours partants pour qu’on y traîne.

C’était mes premières cuites, des soirées à danser avec 25 personnes dans 18m² et leurs aquas dans la salle de bain, de celles où on partait en courant à travers la ville pour traîner dans des parcs.

Ces soirées où on passait les passages piétons avec des caddies remplis de bières. J’étais comblée.

On buvait beaucoup et mes amis fumaient souvent de la weed à partir de l’apéro. J’ai testé, par curiosité, c’était mes débuts avec le nicotine qui n’a toujours pas quitté mon corps depuis.

Selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), le cannabis est de loin la substance illicite la plus consommée en France, et la première substance illicite consommée par les adolescents.

En 2014, un collégien sur dix déclare avoir déjà consommé du cannabis.

En 2017, près de quatre adolescents de 17 ans sur dix ont déjà fumé du cannabis au cours de leur vie (39,1 %).

En 2016, 42 % des adultes âgés de 18 à 64 ans déclarent avoir déjà consommé du cannabis au cours de leur vie.

J’ai appris que, personnellement, j’ai une toute petite tolérance aux joints, que je ne supporte que la weed et pas le shit, et que si je fume et que je bois, même juste un tout petit peu, je deviens toute blanche et j’ai immédiatement envie de mourir tant je me sens mal.

Pas d’addiction au THC pour moi au moins, ça c’est réglé.

Je deviendrai la « spécialiste » des space cakes (c’est faux j’improvisais), celle qui faisait des fournées de gâteaux magiques pour chaque grosse soirée et anniversaire.

Selon le site Internet Stop-Cannabis, le THC (Δ9 – tétrahydrocannabinol) est le cannabinoïde le plus abondant et le plus présent dans la plante de cannabis.

Il possède des propriétés psychoactives agissant sur le psychisme en modifiant l’activité cérébrale.

Mon premier mec et sa consommation de weed

Je me suis mise deux fois en couple avec des mecs de ma promo pendant ces deux années de DUT.

La deuxième fois, j’étais absolument passionnée. Je nous voyais aller loin, je le sentais vulnérable avec moi, je nous trouvais proches.

Au début il fumait beaucoup en soirée, puis il m’a expliqué qu’avant il fumait aussi la journée. J’étais contente que ce ne soit plus d’actualité.

Fumer en soirée, pour moi, c’était totalement inoffensif, et je trouvais nos soufflettes de fin de soirées hyper romantiques. C’était l’année de We Found Love de Rihanna et je m’y identifiais beaucoup.

Il m’avait fait rencontrer des amis à lui qui fumaient des joints de 15 à 20 centimètres tous les soirs. D’autres qui fumaient toute la journée.

Ils étaient très gentils et tout le monde m’assurait que c’était physiquement impossible d’être accro.

Pourtant, ils avaient tous ce même soupir triste de temps en temps, ce regard tirant vers le bas que j’ai mis du temps à identifier : ils étaient démotivés.

« – Si je rate mon année c’est pas grave. – C’est juste quelques mois de chômage de plus. » – S’ils me virent je m’en fous. » – Je ne serai jamais pris de toutes façons » – Qu’ils aillent se faire foutre c’est un prof de merde il comprend rien » – C’est pas très grand ici mais on fait avec ce qu’on a »

Selon l’OFDT, une prise de cannabis entraîne en général une euphorie modérée et un sentiment de bien être suivi d’une somnolence, mais aussi un affaiblissement de la mémoire à court terme et des troubles de l’attention.

En fonction de la dose absorbée et de la tolérance du consommateur, la prise de cannabis peut entraîner :

  • une augmentation du temps de réaction,
  • une difficulté à effectuer des tâches complètes,
  • des troubles de la coordination motrice susceptibles d’augmenter les risques associés à la conduite,
  • une diminution des capacités de mémorisation et d’apprentissage,
  • des hallucinations,
  • des troubles anxieux très intenses,
  • un désintérêt pour les activités habituelles,
  • une fatigue physique et intellectuelle,
  • une humeur dépressive.

À un niveau de consommation élevé apparaît le risque de dépendance – psychique surtout – et peuvent survenir des problèmes relationnels, scolaires et professionnels.

Et puis, à la seconde où un problème personnel a émergé dans la vie de mon ex, il a recommencé à fumer en journée.

« Je ne préfère pas t’expliquer ce qui ne va pas, c’est trop compliqué. Vaut mieux qu’on s’arrête là. »

L’impact psychologique de la weed était clairement sous mes yeux

.

Peut-être que c’est plus dur de changer les choses quand le bonheur coûte 20 balles par semaine et qu’il s’effrite, seul ou entre potes devant W9.

Peut-être que la flemme prend trop de place quand on a un accès direct à un petit nuage posé sur le canapé, alors que pour changer ce qu’on n’aime pas chez soi, il faut bouger.

Plutôt blasée par l’expérience, j’ai préféré m’éloigner des gens qui fumaient beaucoup.

Mon deuxième mec et sa consommation de weed

Quelques années plus tard, ma vie avait bien changé.

Nouvelle école, nouveaux potes, nouvelle région. Sorti de nulle part un soir, j’ai reçu un SMS de l’ex d’une amie qui venait prendre des nouvelles.

Avec ce mec, on s’était un peu rapproché au lycée, avant qu’il se mette en couple avec mon amie.

Curieuse de savoir ce qu’il voulait, je suis allée vers lui et quelques mois (et conversations avec mon amie pour savoir si c’était ok) plus tard, on était en couple.

Je ne sais plus quand le sujet de la weed a été abordé pour la première fois. Probablement lors de nos premières soirées d’été à se balader, moi avec une clope, lui avec un joint à la main.

Mais ça ne m’inquiétait pas : il ne fumait que le soir et les week-ends d’été, et avait des ambitions pour sa vie future. À la rentrée, quand je retournais dans mon école, lui partait en commencer une à 300 km de la mienne.

Quand nous étions à distance, la présence de la weed dans sa vie ne se traduisait que par le fait qu’il dormait beaucoup. À la fin de l’année, il trouvait un stage à Paris et emménageait dans mon appart.

Sa consommation était devenue routinière, je connaissais par cœur les moments où il allait fumer. Au début, c’était un le soir et deux par jour le week-end.

Puis c’est devenu un le soir en rentrant avant que j’arrive, un juste avant de manger. Un ou deux avant de dormir devant une série ou un jeu. Un le week-end avant d’aller à la boulangerie, deux pour faire l’aller-retour si on sortait faire des courses.

Quand je lui demandais si ça ne faisait pas trop, il me détaillait les raisons de sa consommation. Sa tête pense trop vite, trop fort. Il a besoin de ralentir le bourdonnement de ses pensées. Sinon, il est angoissé.

D’accord.

Je veux juste qu’il se sente bien, donc je n’insiste pas et vois sa consommation monter et monter, au point qu’il hésite à faire un voyage scolaire à l’étranger parce qu’il n’est pas sûr de pouvoir gérer la compagnie de sa promo qu’il méprise sans pouvoir fumer.

Il finit par s’envoyer de la weed par la Poste à l’adresse de l’hôtel où ils resteront.

La weed, notre relation passionnelle et moi

Ayant déjà peu confiance en moi, voir la weed s’imposer dans notre quotidien faisait naître de nouvelles angoisses :

Est-ce que s’il fume le week-end, c’est pour changer sa perception du temps et ne pas s’ennuyer avec moi ?

Est-ce que s’il fume avant qu’on fasse l’amour, c’est pour masquer le fait que je lui plais pas assez ?

Est-ce que s’il fume, c’est pour avoir une excuse pour ne plus venir vers moi avec ses mains baladeuses ?

Est-ce que s’il fume, c’est pour oublier que je ne viens plus autant me ruer sur lui toute excitée ?

Est-ce que s’il fume, c’est parce qu’il ne peut plus me supporter ?

Est-ce que s’il fume, c’est pour m’oublier ?

À nos yeux, notre relation était intense mais indispensable.

Nous étions l’un pour l’autre le cocon qui nous protégeait du reste du monde, un monde rempli de douleurs et de déceptions, d’angoisses et de tristesses, de gens auxquels on a n’a pas trop envie de parler.

Une source d’amour et de tendresse infinie pour faire le plein, qu’on a jamais envie de quitter parce qu’on s’y sent bien alors qu’ailleurs c’est l’enfer.

On s’aimait avec toutes nos blessures, toutes nos failles. Celles loin dans la tête, celles loin dans les tripes, celles que personne ne devrait voir parce que ce serait trop dangereux. On s’aimait en entier, on s’aimait cassés.

Alors je l’aimais avec son addiction, de plus en plus présente, qui s’affichait de plus en plus tôt dans la journée. Et lui m’aimait avec mes sautes d’humeurs incessantes, avec ma haine envers lui qui montait sans que je n’arrive à exprimer pourquoi.

On se disputait beaucoup, je lui balançais des horreurs et il se défoulait sur le mobilier. L’enfer, c’était nous, ensemble.

En s’isolant, on se faisait du mal. Je n’osais plus sortir parce que j’avais peur qu’il se sente abandonné, il n’aimait pas me voir sortir parce qu’il avait peur que je rencontre quelqu’un d’autre.

J’avais tellement peur qu’il me quitte que je ne demandais même pas si j’avais encore envie d’être là.

C’était le genre de couple dans lequel tu as l’impression qu’il y a des hauts et des bas, mais que les hauts sont si hauts que les bas valent le coup.

La weed et moi, plus jamais

Un hiver, épuisée, je suis rentrée voir ma famille une quinzaine de jours.

M’entourer de couples sains m’a fait réaliser à quel point nous ne l’étions pas et qu’il était temps pour moi de partir, vite, loin, parce que je savais la vitesse à laquelle il pouvait me faire changer d’avis.

C’est peut-être une chance finalement que, dans un dernier excès de colère, j’ai retrouvé l’appartement sans dessus dessous, mes affaires éparpillées au sol, et que j’ai juste eu assez peur de lui pour prendre un sac et m’en aller le lendemain.

J’ai de la compassion pour les gens qui ont besoin de THC pour fonctionner. Pour ceux qui ont la tête qui sprint en permanence et qui ont besoin de la ralentir.

Ceux qui ont le cœur triste et qui ont besoin de temps pour remonter la pente. Ceux qui ne voient pas d’autre issue.

Mais pour moi, c’est fini. Je ne sais pas si on peut avoir une relation saine avec quelqu’un qui fume beaucoup. Je ne veux pas construire de relation avec quelqu’un qui met un pansement sur ses pensées.

Peut-être que toi qui lis cet article tu penses que j’ai tort, et je suis curieuse de connaitre ton avis.

Finalement, cette relation m’a beaucoup aidée. Elle m’a appris que c’était une possibilité d’être aimée autant.

Que la seule personne qui peut définitivement sortir mes pensées du terrain miné d’angoisses et de tristesse disposé dans ma tête, c’est moi et ma volonté.

Que je ne peux pas aimer quelqu’un tant que je n’ai pas appris à m’aimer.

Et que si quelqu’un se roule des petits joints le matin et dit qu’on ne peut pas être accro à la weed, c’est que ce n’est pas une personne pour moi.

En France, la consommation de cannabis est illégale et punie par la loi.

Cet « usage illicite de l’une des substances ou plantes classées comme stupéfiants est puni d’un an d’emprisonnement et de 3750 euros d’amende » comme le prévoit l’article L3421-14 du code de santé publique. (source)

Toi, ou une personne proche de toi, a des soucis d’addiction ? Il est normal d’avoir besoin d’aide, et il est possible de la demander.

Quelques numéros utiles :

  • Drogues info service : 0 800 23 13 13 Ouverte de 8h à 2h, 7 jours sur 7. Appel anonyme et gratuit depuis un poste fixe. Appel depuis un portable au coût d’une communication ordinaire : 01 70 23 13 13. Site internet par ici.
  • Ecoute cannabis : 0 980 980 940. Ouverte de 8h à 2h, 7 jours sur 7. De 8h à 2h, 7 jours sur 7. Appel anonyme et gratuit depuis un poste fixe.
  • Fil santé jeunes : 0 800 235 236. Ouverte aux 12-25 ans, tous les jours de 9h à 23h. Appel gratuit et anonyme. Le site internet juste là.
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