Le 20 août 2021
Les termes « iel », « lea », « celleux » et autres, ainsi que l’utilisation de points médians dans cet article permettent de respecter le genre des personnes non binaires.
Le terme « enbyphobie » désigne les discriminations à l’égard des personnes non binaires et le refus de remettre en question les normes genrées ; il donne « enbyphobes » — les personnes qui sont discriminantes.
Le terme « adelphes » est un mot non-genré désignant les enfants de même parents. C’est une formulation plus inclusive que « frères et sœurs ».
Les termes « transfems » et « transmascs » désignent le plus souvent les femmes trans pour l’un et les hommes trans pour l’autre.
Pour aller plus loin, rendez-vous sur le guide de l’Association des journalistes LGBTQI+ : Comment aborder la non-binarité et la fluidité de genre.
Elias, Camille, Alex et Dénis sont non binaires et ont tou•te•s fait leur coming out auprès de leurs proches et/ou de leurs collègues. Une étape qui leur a « changé la vie », selon leurs propres mots.
De l’abandon personnel des injonctions genrées à la découverte de soi et de leur nouvelle relation aux autres, la non-binarité est effectivement venue transformer leur quotidien.
L’affirmation de soi et la découverte
Au-delà de l’apparence (changement considéré accessoire par nombre de personnes concernées, la non-binarité s’affranchissant de codes genrés), les impacts majeurs du coming out non binaire touchent la relation à soi et aux autres, comme en ont témoigné Dénis et Alex.
Alex est genderfluid, l’une des identités de genre englobées par la non-binarité, et se définit ainsi d’une manière ou d’une autre en fonction du temps. Un coup à prendre pour ses proches, qui ont eu besoin de quelques leçons sur la non-binarité et la communication respectueuse au préalable.
« On a tout de suite senti que c’était important pour Alex, alors ça l’est devenu pour nous », explique Layla, sa maman. « On l’a senti•e s’épanouir à la suite de son coming out, et on a pris la charge de reprendre les personnes de la famille ne respectant pas sa non-binarité pour lui permettre de pleinement apprécier ses premiers pas officiels. »
Un geste particulièrement apprécié par l’informaticien•ne de 34 ans, la main dans celle de sa mère lorsque celle-ci évoque ce souvenir.
« J’ai conscience de la chance que j’ai eue, et je souhaite à tout le monde d’avoir une famille et des amis aussi respectueux, ça devrait être la base.
Ça m’a permis de me dégager de l’énergie pour me découvrir moi, mon style, mon genre au jour le jour, avant de me confronter aux éventuels enbyphobes parmi mon entourage élargi. »
De son côté, Dénis, personne agenre de 17 ans, a vu sa vie familiale changer du tout au tout après son coming out. Son papa, David, raconte :
« Dénis est dépressif•ve, et son quotidien était souvent difficile avant son coming out. Un jour, iel nous a expliqué sa non binarité, ce qui était attendu de nous, mais aussi ses craintes vis-à-vis de notre entourage, pas forcément sensibilisé à la question. »
Petit à petit, à force de respect, d’accompagnement et de dialogues ouverts, David voit Dénis se dévoiler au travers d’un nouveau style vestimentaire, de nouveaux intérêts (dont le makeup), un militantisme passionné, mais surtout une rage de vivre sans limites.
Les yeux brillants, père et ado attribuent sans un doute cet épanouissement au coming out de Dénis, qui conclut :
« Je me suis senti•e revivre, ma non-binarité a été la révélation de ma vie. Ça a brisé toutes les barrières à mon bonheur. »
Se défaire des injonctions genrées
Camille, jeune personne non-binaire de 19 ans, a opéré son coming-out il y a un an et demi, en plein confinement. Auprès de ses parents, frères et soeurs, l’étudiant•e en droit n’y est pas allé•e par quatre chemins.
« J’avais tâté le terrain en leur envoyant des articles sur le sujet, et en parlant de mes ami•e•s concerné•e•s, pour voir leur réaction — plutôt neutre au final.
Même s’ils ne comprennent pas encore bien ce que cela implique, ils me posent des questions au fur et à mesure ; ils ont bien compris que cela ne concernait que moi, et que je me passais de jugements de leur part. »
« Depuis mon enfance, je subissais les injonctions sexistes genrées de la part de ma famille », se souvient Camille.
« Il fallait mettre des robes, avoir les cheveux longs, être calme en société, se tenir droit•e…. Et même si la société cherche encore à m’imposer ces normes-là, moi je ne le fais plus, c’est déjà un sacré poids en moins. »
Depuis, Camille vit sa meilleure vie non binaire, envoyant balader d’un revers de la main les normes genrées pour le plus grand plaisir de sa garde-robe, entre jupes, cravates et salopettes.
« Cristina Cordula peut aller se rhabiller, chaque jour est une nouvelle expression de style, et non de genre, à travers mes outfits, et c’est le feu ! »
La famille et les amis : check. Mais qu’en est-il du milieu professionnel, boss coriace parmi d’autres de l’enbyphobie ?
Abattre les préjugés en milieu professionnel
« Quand on sent que l’on peut en parler dans le milieu professionnel, je pense que c’est vraiment intéressant de le faire pour banaliser le sujet et baliser le terrain pour toutes les personnes non binaires non out ou à venir. »
C’est ce que conseille Elias, conseiller•e en relation client de 32 ans dans une banque. Mais au début, l’angoisse se fait sentir. Comment réagiront les collègues ? Ont-ils déjà deviné ? Ce coming out va-t-il changer les rapports déjà installés ? Tant de questions, aucune réponse, sinon quelques pistes. Elias se souvient :
« J’en ai d’abord parlé avec ma “work wife” [la collègue dont on est le plus proche, NDLR] pour prendre la température et trouver une alliée dans ma démarche. Ouf : elle a super bien réagi. »
En charge de la responsabilité sociale des entreprises dans leur boîte, sa collègue lui propose alors d’évoquer la non-binarité avec leur manager commun afin de tâter le terrain en lui évitant de fait cette charge. « Vraiment, l’alliée dont j’avais besoin ! » sourit lea conseiller•e.
« Long story short, on a aujourd’hui inclus un volet sur la non-binarité parmi nos formations RSE, et je peux m’épanouir pleinement en entreprise, et sensibiliser mes collègues en toute sérénité, soutenu par ma hiérarchie.
C’était pas gagné, mais c’est un signe que la société change à tous les échelons, et on peut grandement saluer le travail militant de nos adelphes transfems et transmasc avant nous pour ces évolutions qui nous changent la vie. »
Ça, ça fait plaisir à lire. Alors yes, bravo et merci les adelphes !
À lire aussi : Je suis une personne trans non-binaire et j’ai décidé de porter mon enfant
Crédit photo : The Gender Spectrum Collection / Zackary Drucker
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