Il y a quelques semaines, j’ai reçu une invitation par mail à un évènement ayant pour but de promouvoir la dictée. J’ai ignoré. L’organisatrice m’a relancé, j’ai décidé d’ignorer de nouveau. Puis quelques jours plus tard, mon chef, Fab, m’a demandé pourquoi j’avais ignoré. Je lui ai expliqué, honteuse, que petite, je détestais les dictées.
Ce qu’il se passe surtout c’est qu’aujourd’hui encore, l’orthographe et moi, on n’est pas vraiment copines… Et quand on est rédactrice, ça titille sévère le syndrome de l’imposteur.
Même en relisant tout des dizaines de fois, je continue à faire des fautes
Oh, je ne fais pas (plus) des fautes à toutes les phrases. Je connais les règles de base, je sais écrire la plupart des mots compliqués. Les correcteurs automatiques contribuent à sauver les meubles. Mais même avec cette aide, même en relisant tout des dizaines de fois, je continue à faire des fautes.
Depuis cette fameuse invitation évitée, j’ai beaucoup réfléchis. D’où me viens ce problème et finalement comment m’assumer pleinement malgré cette difficulté si visible ?
L’orthographe et moi : histoire d’un traumatisme lointain
Petite, j’avais tous les atouts qui font habituellement une personne douée en la matière : élève studieuse, je lisais énormément. Pendant un temps, je voulais même devenir auteure : je passais mon temps à écrire des histoires. Pourtant, j’étais extrêmement mauvaise en orthographe.
Un jour j’ai reçu un -27 en dictée. Mon institutrice de l’époque en a alors avisé la classe en clamant fièrement :
« Vous voyez, ce n’est pas parce qu’Anouk est bonne élève qu’elle est bonne en orthographe. »
Un mot pour résumer la situation : humiliation. C’est simple, j’avais envie de disparaître. Ce sentiment, je l’ai ressenti des dizaines de fois quand les profs me rendaient des copies surchargées de rouge. Trop de fautes.
Pendant longtemps, je ne comprenais pas la logique de l’orthographe
Pendant longtemps, la logique de l’orthographe me semblait justement… dénuée de logique. Pourquoi ne pas tout écrire phonétiquement ? Pourquoi tant d’orthographes possibles pour une seule et même prononciation ? D’où viennent ces règles ? Je trouvais ça beaucoup trop compliqué et bien souvent absurde.
L’orthographe et moi : une amélioration… Mais pas la perfection
Et puis au collège, j’ai commencé à m’améliorer. Deux facteurs ont joués.
Le premier, ça a été ma participation sur des forums internet qui préconisaient une bonne orthographe pour s’intégrer. L’orthographe n’était plus un truc relou qu’on m’imposait pour les cours mais devenait aussi et surtout un facteur d’intégration.
Ce n’est qu’à 13 ans que j’ai enfin compris la différence entre ces, ses et c’est
Le deuxième facteur, c’est une professeure que j’ai eu en 4e. Devant le niveau déplorable de la classe, elle a décidé d’agir en nous expliquant de nouveau les bases. C’est ainsi qu’à 13 ans, j’ai enfin compris la différence entre ces, ses et c’est ou que j’ai appris les terminaisons au présent simple. Des choses qui peuvent sembler évidentes mais que je n’avais absolument pas compris et encore moins assimilées en primaire.
Je voyais mon niveau s’améliorer à une vitesse folle. J’avais l’impression de ne plus faire de fautes… Mais régulièrement la plaie se rouvrait. Il m’en fallait peu.
« Tu fais beaucoup de fautes d’orthographe quand même. »
Et je complexais de plus belles, j’avais envie de disparaître. L’orthographe représentait pour moi le marqueur social qui faisait de moi quelqu’un de moins bien. Je rageais devant ces amis pour qui tout semblait si simple et aisé…
La vie adulte ou quand l’orthographe devient une épée de Damoclès
J’ai donc finis le lycée avec un niveau relativement correct en orthographe. Cependant, j’ai continué longtemps à me sentir très en danger. Souvenir de toutes ces fois où j’ai découvert trop tard ce qui semble une évidence pour beaucoup.
Le mec que je draguais m’a signalé qu’on dit « quand même » et non « comme même »
Je pense à cette fois où j’ai envoyé en réponse à une proposition d’entretien que « je seraiS disponible lundi », je pense à cette autre fois où le mec que je draguais m’a gentiment signalé qu’on dit « quand même » et non « comme même ». Je me souviens m’être fait engueuler par une supérieure pour un s oublié dans un titre de mail.
Moi, dans tous ces moments là
J’ai parfois l’impression que plus je creuse, plus il reste à creuser. L’orthographe est peut être évident pour certain•es, mais même avec toute la volonté du monde, cela reste pour moi un exercice non naturel, quelque chose auquel je dois m’adapter sans cesse… Mais ce n’est plus un obstacle qui m’empêche de croire en mes rêves.
Moi, bof en orthographe et rédactrice web
Ce serait malheureux qu’une coquille oubliée décrédibilise un discours construit
Je sais que je fais des fautes. C’est un fait. Je sais que je dois faire des efforts… Mais je sais aussi et surtout qu’au fond, ça va. Ça va parce que je m’améliore, ça va aussi parce qu’il serait malheureux qu’une coquille oubliée décrédibilise un discours construit. Alors peut être que ça en choque certain•es mais je ne vais pas me taire parce que je n’atteins pas la perfection.
Aujourd’hui, je suis rédactrice web. On me paie donc à écrire. Bien entendu, il est attendu de moi que j’ai une orthographe plus que correcte… Mais on sait aussi que je suis humaine. C’est pour ça que je travaille main dans la main avec Mymy et Clara qui relisent et corrigent les articles publiés sur madmoiZelle. C’est pareil dans la vie, je n’hésite plus à demander à des ami•es (ou à Google) de l’aide quand je ne suis pas certaine d’une orthographe.
Je sais que l’orthographe-shaming est toujours là. Il serait mentir que de dire que je n’ai jamais snobé quelqu’un qui avait fait une énorme faute d’orthographe. Mais je ne connais que trop le malaise qui peut être créé à la moindre remarque pour me dire que pointer du doigt est la bonne solution.
Alors, plutôt que de juger, j’essaie de faire preuve de bienveillance. Plutôt que de tirer dans les pâtes des autres, je note les réussites… Après tout, ce n’est pas si grave une faute d’orthographe, ça se corrige !
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