- Prénom : Camille
- Âge au moment de l’accouchement : 32 ans
Premier bébé :
- Bébé attendu le : 16 décembre 2020
- Bébé arrivé le : 23 octobre 2020 à 00h29
- Stats : 2,1 kilos pour 46 centimètres
Deuxième bébé :
- Bébé attendu le : 16 décembre 2020
- Bébé arrivé le : 23 octobre 2020 à 00h31
- Stats : 1 kilo 400 pour 43 centimètres
Dans la vingtaine, je ne voulais pas vraiment d’enfant. Le sujet ne me passionnait pas. Un jour, peut-être me disais-je… ou pas. Les enfants que je rencontrais me mettaient plutôt mal à l’aise, je ne savais pas trop comment agir avec eux. Ils sont tellement spontanés, que j’avais toujours l’impression d’avoir l’air bête, à côté.
Et puis, un jour ce désir est arrivé, et petit à petit il s’est installé. J’ai rencontré un mec, et je nous ai imaginés pour longtemps ensemble, en parents. Après moult discussions avec lui et un peu de pression de ma part — je l’avoue —, on s’est lancés. Sauf que ça n’est pas arrivé tout de suite. Les mois passaient et rien ! Les milliards de tests de grossesse que je faisais étaient invariablement négatifs.
Je suis tombée enceinte avec un SOPK
J’ai finalement eu un diagnostic : le syndrome des ovaires polykystiques, autrement appelé SOPK. Ce n’est pas un personnage de science-fiction avec des antennes mais une maladie bien reloue, qui fait que je n’avais presque pas d’ovulation.
Ma gynécologue, très calée et impliquée, m’a alors prescrit un traitement bien précis et contraignant à prendre à chaque cycle, à base de médicaments puis de piqûres, pour stimuler les ovaires à produire des petits follicules — que j’avais en trop grand nombre et qui ne se détachaient pas.
Après des mois de désespoir et d’abattement, deux follicules ont pointé le bout de leur nez. C’était la première semaine du premier confinement et on disposait de pas mal de temps ensemble, avec mon mec. Je ne vous fais pas de dessin, je suis tombée enceinte. Et de jumeaux, en plus !
Quand j’ai vu le test positif, je n’y croyais pas. J’ai fait une analyse sanguine au résultat on ne peut plus clair, j’étais enceinte, et pas qu’un peu. C’était la première fois de ma vie que je pleurais de joie. Sans la médecine, je n’aurais jamais été enceinte et sans la médecine, je serais morte en couches. On vit une époque formidable ! Quoiqu’il y a quelques siècles, je n’aurais peut-être pas eu de syndrome des ovaires polykystiques, les perturbateurs endocriniens étant fortement suspectés d’en être la cause… Sans que cela ne soit prouvé.
Une grossesse calme, jusqu’à 6 mois
Ma grossesse a débuté calmement, pendant le premier confinement. L’absence de verres en terrasse a permis que je ne me fasse pas griller par mes proches, à la première commande de Perrier. Les premiers mois, j’étais sur un petit nuage, avec des maux de grossesse classiques mais assez faibles. J’ai eu de la chance.
Je ne kiffais pas spécialement cet état qui empêche de manger de bons fromages, de boire de l’alcool et de faire des folies de son corps (bref, de s’amuser quoi). Mais j’adorais toutes les attentions des personnes qui s’aperçoivent que tu as un gros ventre, et qui te traitent soudainement comme une personne spéciale et précieuse.
À six mois de grossesse, j’ai commencé à avoir beaucoup de contractions, pas douloureuses mais inquiétantes. Lors d’un rendez-vous avec ma gynécologue, elle a vu que mon col commençait à s’ouvrir. Branle-bas de combat, je ne devais plus bouger.
J’ai dû être alitée totalement. Mais même en respectant totalement cet immobilisme contraint, deux semaines plus tard, des contractions rapprochées et fortes détectées lors d’un monitoring ont sonné le glas d’une menace d’accouchement.
J’ai dû aller en urgence à l’hôpital. L’inquiétude était intense, je n’étais pas prête à accoucher de grands prématurés — personne ne l’est. Les prénoms n’étaient même pas arrêtés. On m’a injecté de la cortisone dans un muscle pour développer au plus vite les poumons des bébés, au cas où je doive accoucher.
On m’a gardée quelques jours durant, mais le pire était passé et les contractions se calmaient. Je pouvais rentrer chez moi, avec ordre strict de ne pas bouger. J’ai passé mes journées dans mon canap’, à regarder la télé. J’avais le souffle court et les contractions que je sentais plusieurs fois par heure me tétanisaient.
Un diagnostic de prééclampsie
Lors d’un monitoring de contrôle effectué par mon sage-femme dix jours plus tard, ce qui je redoutais le plus arriva : une tension très élevée, à 17. Pour avoir écouté beaucoup d’épisodes du podcast « Bliss », je savais que ça pouvait signifier une prééclampsie. C’est une pathologie très rare de grossesse où l’enfant et la mère peuvent mourir, si rien n’est fait. Dit comme ça, c’est assez dramatique mais l’important est d’agir rapidement.
Je ne m’étais pas trompée. Aux urgences maternité, tout est allé très vite. Les premiers examens ont indiqué que les bébés n’étaient pas atteints, quel soulagement. On m’a informée que chaque jour encore dans mon ventre pouvait être important pour les bébés et pour leur développement, mais qu’il ne fallait pas jouer avec le feu non plus. Si les symptômes de prééclampsie s’aggravaient, il faudrait que j’accouche rapidement.
Le moment de l’accouchement arrive
Le lendemain, j’ai commencé à avoir des flashs lumineux devant les yeux, il n’en fallait pas plus pour donner le signal. Ils allaient déclencher mon accouchement, à 7 mois et quelques jours de grossesse. J’ai appelé mon mec, qui a accouru à l’hôpital. Il travaillait, le bougre.
Cela faisait quelques jours que je ne dormais presque plus, et épuisée, je ne me sentais pas du tout capable d’accoucher. J’étais gonflée d’eau à cause de la prééclampsie. J’aurais pu m’accrocher au fait que Beyoncé avait eu aussi des jumeaux, une prééclampsie et un accouchement en urgence et que tout s’était bien terminé mais je ne le savais pas encore.
J’avais rêvé d’une césarienne toute ma grossesse — ça me faisait moins peur —, et on m’avait dit qu’on ne la pratiquerait pas sans raison médicale. Et là, le gynécologue me laissait le choix, tout en me conseillant très fortement de tenter la voie basse, moins traumatisant pour le corps, et plus facile pour se remettre ensuite. J’avais une chance folle d’avoir le temps de tenter la voie basse, me dit-il. J’ai décidé de lui faire confiance et de tenter la voie basse, non sans mille allers et retours dans ma tête. Avais-je vraiment pris la bonne décision ?
Je me sentais faible, et je n’arrêtais pas de répéter : « Je ne vais pas y arriver », « J’ai peur »… J’aurais été prête à supplier à genoux pour ne pas avoir à accoucher, si seulement quelqu’un avait eu ce pouvoir.
Après le déclenchement, tout se passe au mieux
On m’a posé la péridurale vers 18h30, et j’ai trouvé ça douloureux – le travail n’avait pas encore commencé, elle ne m’a donc pas apporté le soulagement qu’elle offre à d’autres. L’anesthésiste nous a proposé de mettre une chanson pendant qu’il la posait, on a choisi Jerusalema de Master KG et Nomcebo, car on l’avait pas mal écoutée l’été d’avant, pour détendre un peu l’atmosphère. Aujourd’hui, j’ai du mal à l’écouter sans avoir des gros frissons et une sensation étrange.
La péridurale a fonctionné dès le début. La sage-femme a fait des tests tout à fait concluants, je sentais les glaçons qu’on me passait sur la peau près du bassin mais sans aucune sensation de froid. On m’a couchée dans une pièce, et une sage-femme m’a expliqué qu’on allait déclencher mon accouchement en perçant la poche des eaux. Il était 20 heures. Dans mon souvenir, elle avait une sorte de baguette en bois dans la main, elle l’a insérée (avec mon consentement) doucement et j’ai senti de l’eau couler. Voilà, la poche était rompue et les contractions allaient commencer.
Grâce à la péridurale, je ne les ai pas vraiment senties. En tout cas, je n’ai jamais eu mal. J’appuyais dès que j’avais le droit, toutes les 10 minutes environ, sur le bouton de la péridurale pour recharger un peu en anesthésiant. Clairement, je n’étais pas venue là pour souffrir, et tout ce qui pouvait m’apporter du confort était le bienvenu.
J’avais froid et je tremblais — sans doute à cause de la péridurale — mais j’étais assez sereine, tout se passait au mieux depuis le déclenchement. On a écouté des chansons de Céline Dion, chanté un peu et j’ai même somnolé pas mal, au plus grand étonnement de mon mec.
Peu avant minuit, mon col était quasiment dilaté à 10 cm. Le vrai boulot allait bientôt commencer. J’avais vu beaucoup de gens défiler dans ma chambre mais une étudiante en médecine est venue vers moi, me demander si elle pouvait assister en spectatrice à mon accouchement. Moi qui suis habituellement extrêmement pudique, je n’étais pas à ça près et lui ai répondu : « Plus on est de fous, plus on rit ! » C’était visiblement pas tous les jours qu’on voyait un accouchement de jumeaux à 33 semaines, même dans ce grand hôpital parisien, niveau 3.
Une playlist qui détonne
Je ne croyais pas si bien dire… Arrivée dans la salle d’accouchement, il y a avait une dizaine de personnes, en plus de moi et mon mec. Les équipes étaient en double car il allait y avoir deux accouchements, finalement. La salle était grande et très éclairée. J’avais l’impression d’avoir des projecteurs braqués sur moi de tous les côtés. N’étais-je pas après tout une des stars de ce moment — avec les bébés bien sûr !
Effrayée par les bruits d’instruments médicaux et les possibles bruits qu’émettraient mon corps, j’ai demandé à mettre de la musique, ce qui a été accepté. Mon mec a décidé de faire le DJ avec son téléphone et je n’ai pas été déçue. L’optique était de me détendre… Se sont enchaînés Je m’appelle Henri de Daniel Balavoine et Comme une boule de flipper de Corynne Charby pour le plus grand plaisir de toutes les oreilles présentes. On nous a dit que les gens choisissent souvent des musiques classiques grandiloquentes. Qu’est-ce que ça dit de nous et surtout doit-on craindre pour les futurs goûts musicaux de nos enfants, arrivés au monde sur ces deux musiques ?
L’expulsion n’avait pas encore débuté, mais je n’avais plus le choix et j’allais donner le maximum pour que ça se passe bien. La sage-femme était sensationnelle, et elle m’a fait croire que je l’étais aussi. Je ne le remercierai jamais assez. Avec la péridurale, je ne savais pas quand pousser, mais elle m’encourageait avec un enthousiasme fou de coach sportif. En bonne élève, j’appliquais toutes les directives qu’on m’avait apprises pour pousser avec beaucoup d’entrain.
Un double accouchement assez rapide
Quand elle me disait d’arrêter, elle me complimentait, disant que j’étais incroyable, que je faisais un boulot génial, comme si elle n’avait jamais vu quelqu’un d’aussi doué. Dans ce moment de grands doutes et de fragilité, ça faisait énormément de bien. J’étais tentée d’y croire et me sentais assez puissante, très fière de moi.
Mon fils a été le premier à se présenter, il est sorti en quelques poussées. On me l’a posé une seconde sur la poitrine. Il était si petit. Je ne me souviens pas avoir ressenti grand-chose, à part du soulagement. Il avait les yeux ouverts et plutôt une bonne tête. Mais ce n’était pas fini…
On m’avait informée que pour ma fille, il faudrait faire une manipulation et qu’on irait certainement la chercher pour la tirer par les pieds. C’est bizarre, et assez désagréable de se dire qu’on est allé farfouiller dans mon utérus pour la chercher, mais ça a été très rapide, je n’ai pas eu le temps d’y penser réellement. Elle était là, ils l’ont également posée une seconde sur moi. On l’a regardée rapidement puis elle a été emmenée en couveuse.
J’étais si heureuse, si soulagée que ce soit terminé. On m’a dit que les bébés allaient bien. Il fallait tout de même les emmener à un autre étage tout de suite, mon fils en soins intensifs et ma fille en néonatalogie. Ils avaient besoin d’aide pour respirer, mais c’était normal.
On m’a ensuite recousue pendant une vingtaine de minutes. Je n’ai pas eu d’épisiotomie mais des petites déchirures naturelles, un peu longues à recoudre si l’on voulait bien faire les choses. Ce qui a été fait ! La douleur commençait à arriver, il a fallu donc remettre une petite dose d’anesthésiant. Aussi simple que ça, et je n’ai pas vraiment souffert. J’avais juste envie qu’on me laisse un peu tranquille.
Une complication post-accouchement
Les médecins m’avaient dit que pour guérir de la prééclampsie, le seul remède était d’accoucher et sortir le placenta, qui devenait toxique pour tout le monde — moi et les bébés. Ça devait donc être réglé, mais ce n’est pas ce qui est arrivé. J’ai eu une complication rare (à nouveau !), un hellp syndrome, et mon état s’est empiré pendant une semaine. J’étais en soins intensifs, sous surveillance constante. Ma tension était toujours à 17 et mes plaquettes en chute libre.
Ma seconde rencontre avec les bébés s’est faite le lendemain. J’étais venue dans leur chambre en fauteuil roulant, et je n’étais pas bien du tout. Les douleurs de tranchées, lorsque l’utérus se remet en place en se contractant, me faisaient très mal, et les voir si petits avec tous leurs branchements était dur. La rencontre n’était pas aisée et reste un très mauvais souvenir.
Après une semaine, beaucoup d’inquiétudes et des prises de sang plusieurs fois par jour. Les prises de tension toutes les vingt minutes ne me laissaient guère dormir, mais j’ai pu me concentrer sur les bébés, qui luttaient eux aussi contre leurs problèmes.
Après des hauts, des bas, des angoisses et des espoirs, ils sont sortis ensemble de l’hôpital un mois après leur naissance.
Un très beau souvenir de l’accouchement
Même si le mois d’avant la naissance et les jours qui l’ont suivi ont été très éprouvants, j’ai un super souvenir de mon accouchement. Il a été festif grâce à la musique, super empouvoirant grâce à la sage-femme, un peu intime grâce à mon mec qui me soutenait la nuque et qui me chuchotait des blagues dans l’oreille, et super excitant car j’allais enfin rencontrer les bébés.
Le retour à la maison a été un tel bonheur que les doubles couches et les doubles biberons sans fin me paraissent la meilleure situation du monde. Et si tout ça était à refaire (même les galères), pour avoir la chance d’avoir aujourd’hui les meilleurs bébés du monde — ils ont un an et demi et sont en pleine santé — je le referai sans aucune hésitation !
Poussez Madmoizelle est une rubrique de témoignage qui s’intéresse à toutes vos histoires d’accouchement, des plus uniques aux plus banales.
Tous les récits sont légitimes, et même si vous avez l’impression que votre accouchement s’est déroulé sans évènement particulier, n’hésitez pas à nous le raconter en nous écrivant à [email protected], avec en objet Poussez Madmoizelle !
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires