- Prénom : Delphine
- Âge : 29 ans au moment de l’accouchement
- Bébé attendu le : 3 juillet
- Bébé arrivé le : 5 juillet
- Heure d’arrivée à l’hôpital : 9 heures
- Heure d’accouchement : 19 heures 45
- Stats : 4 kg pour 55 cm
Je n’apprécie pas vraiment d’être enceinte mais, dans mon cas, c’est un passage nécessaire pour avoir des enfants. En ce début de mois de juillet, j’avais hâte d’accoucher. J’avais l’impression d’être une baleine qui faisait de l’œdème et qui avait des contractions à foison, je ne dormais plus…. Bref.
Ce 5 juillet, j’étais à 41 semaines — et deux jours —d’aménorrhée. C’était un matin, et j’allais au CHU pour une visite de contrôle (seule, merci Covid). Je n’étais pas particulièrement stressée, l’accouchement de ma fille aînée s’étant plutôt bien passé.
L’accouchement doit être déclenché
Je passe une échographie lors de laquelle on m’annonce que mon placenta ne produit plus de liquide amniotique, et que les soignantes veulent me garder. Face à tout ça, je suis un peu désemparée et pose plein de questions : quels sont les risques ? Qu’est ce que ça signifie ? Est ce que je peux partir et revenir dans la soirée ?
On m’explique que cela signifie que mon placenta est en fin de vie, que la grossesse est arrivée à son terme et qu’il n’y a plus de bénéfices pour l’enfant à rester dans mon ventre. À très court terme, mon bébé n’est pas en danger mais il a moins de place pour bouger. Elles m’annoncent ensuite qu’elles préfèrent me garder car cela peut cacher un problème sous-jacent.
Dans l’immédiat, le plan des soignants est donc de déclencher mon accouchement. Moi, j’ai envie de partir et elles se mettent à trois pour me convaincre de rester. Un peu perdue, j’appelle mon compagnon qui me dit « Fais comme tu veux » (merci pour l’aide).
Dans le doute, je reste : si je partais et qu’il arrivait quelque chose, je m’en voudrais toute ma vie… mais à contrecœur quand même, car je n’ai pas dit au revoir à ma fille d’à peine deux ans, qu’elle ne pourra pas me rendre visite à l’hôpital (merci Covid bis) et que nous allons donc être séparées plusieurs jours alors que nous ne l’avons jamais été plus de quelques heures depuis sa naissance.
Le travail démarre, je demande une péridurale
Prendre des médicaments pour extraire le fiston ne me réjouit guère : j’aurais préféré que mon accouchement soit plus « naturel ». Avant cela, l’équipe soignante me propose un décollement des membranes pour voir si le travail se déclenche par lui-même. J’accepte et attends quelques heures. Mon partenaire arrive pour assister au grand final.
Je sautille sur un ballon depuis plusieurs heures sans que rien ne se passe. La décision est donc prise de passer à la vitesse supérieure. On m’installe en salle d’accouchement et on me donne de l’ocytocine, une hormone utilisée pour déclencher le travail. Il est environ 15 heures.
À 17 heures, le travail démarre. Les contractions sont très fortes et comme je suis épuisée, j’ai du mal à les supporter : je demande une péridurale, qu’on me donne.
Vers 19 heures, les équipes de soin se renouvellent et rapidement une nouvelle sage femme vient se présenter. On fait le bilan. En deux heures, je suis passée de deux à dix centimètres — je suis à dilatation complète. Il va être temps de pousser. Pour ma fille, j’ai poussé trois fois et elle était là. Dans ma tête, le calvaire est bientôt fini …
« Il y a eu une contraction, et le bébé n’a pas aimé »
La sage-femme me propose de percer la poche des eaux. Finalement, elle l’aura à peine touchée qu’elle se perce toute seule, alors elle me dit de tenter une première poussée.
Je pousse de toutes mes forces mais j’ai le sentiment que ça n’est pas très efficace. Je sens que je me fatigue pour rien, et je commence à me dire que ca ne va peut être pas être aussi facile que je l’espérais… Il est environ 19 heures 40.
Nous sommes tous les trois, mon compagnon, la sage-femme et moi. C’est là que tout dérape.
Je la regarde, elle a sa main dans mon vagin et elle se fige. Je sens que quelque chose se passe mais je n’en évalue pas la gravité. Dans le plus grand des calmes, elle me dit « Il y a eu une contraction et le bébé n’a pas aimé ». Elle se tourne vers mon compagnon et lui demande s’il peut aller à l’accueil, dire qu’il y a une procidence.
Nous ne savons pas ce que cela signifie. Il sort sans se presser et va porter le message. Aussitôt, la personne qui reçoit le message crie « Procidence ! » et le branle-bas de combat s’installe. Une dizaine de personnes débarquent dans la salle d’accouchement en courant. La sage-femme (toujours avec sa main en moi) grimpe sur la table, et on m’embarque en toute hâte dans le couloir.
Tout le monde court, on m’annonce que je vais recevoir une césarienne d’urgence.
J’ai l’impression d’être dans un film. Je comprends que la situation est grave. Je ne sais pas ce qui se passe. J’ai peur pour mon enfant. Je me concentre. Une petite voix en moi me dit :
« OK meuf, là c’est du sérieux, tu écoutes bien les médecins et tu fais tout ce qu’on te dit. »
J’ai de la chance : comme j’ai déjà une péridurale, elle fait office d’anesthésie et cela me permet de rester consciente.
Une césarienne en urgence
J’ai passé l’intervention à trembler et pleurer. J’étais à bout, ces longs mois de grossesse m’avaient épuisés et c’était la goutte d’eau de trop ; avec le choc et la peur, je me suis effondrée. Dans tout ça, les soignantes ont été d’une incroyable gentillesse. Elles m’ont caressée, rassurée et encouragée tout le long.
Mon bébé naît à 19 heures 45, et est emporté par les soignants. Sur le coup, on ne sait pas comment il va mais il est vivant. On me recoud. Puis, on vient m’expliquer que mon enfant est dans une couveuse, qu’il respire et qu’il va bien (il « reprend des couleurs »). C’est mon partenaire qui le verra en premier.
On me conduit en salle de réveil et, puis on m’apporte mon bébé, environ 2 heures après sa naissance. C’est là qu’ils prennent le temps de tout nous expliquer : le cordon ombilical est sorti avant la tête. C’est rare, mais ça arrive. Quand la tête du bébé s’engage, elle fait pression sur le cordon et il s’asphyxie. En quelques minutes, il peut mourir.
Aujourd’hui, mon fils va très bien
Ce soir-là, le personnel soignant était disponible et alerte. La sage-femme a diagnostiqué le problème rapidement et la situation a été parfaitement maitrisée. Nous avons eu beaucoup de chance. La professionnelle a gardé sa main dans mon vagin pour faire pression sur la tête de mon bébé, afin de minimiser un peu l’asphyxie.
Quand il est sorti, son taux d’oxygène dans le sang était quasiment nul. Heureusement, il a réussi à s’oxygéner rapidement et correctement après cette apnée de 5 minutes. Quand j’y repense, j’ai froid dans le dos…
Aujourd’hui, mon fils va très bien. Il a 7 mois, mesure 75 centimètres et a déjà deux dents. Je suis pleine de reconnaissance et de gratitude envers les équipes du CHU qui ont sauvé la vie de mon fils, ce 5 juillet 2021.
Quand nous étions en salle de réveil, la sage femme est venue nous dire que c’était son premier jour de garde en tant que diplômée et qu’elle se souviendra de notre fils toute sa vie. Nous aussi nous nous souviendrons de toi, Sarah. Merci.
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Crédit photo : Nathan Dumlao / Unsplash
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