Il y a des ouvrages qui vous accompagnent bien au-delà d’un dimanche après-midi pluvieux ou d’un trajet en métro. Certains peuvent même changer votre vie (dans des proportions relatives évidemment).
Le titre de celui qui a changé la mienne ne traduit malheureusement pas son excellence : il s’appelle Libérez votre créativité, de Julia Cameron, et n’est pas la Bible d’une seule femme.
Manifeste éclairant sur les blocages de notre créativité naturelle, il a été le point de départ de tout un tas de changements que j’ai opérés dans ma vie, qui peuvent sembler insignifiants mais mènent en réalité à un rééquilibrage complet — non seulement de ma vision de moi-même, mais aussi de ma capacité à créer.
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C’est suite à la lecture de cette méthode que j’ai pris la décision de demander un congé sabbatique de plusieurs mois à mon entreprise, et c’est sans doute l’expérience la plus enrichissante de ma vie.
Un congé sabbatique, qu’est-ce que c’est ?
Le congé sabbatique est un congé pour convenance personnelle accordé au salarié sous certaines conditions ; il est convenu entre l’employé et sa hiérarchie — sans aucune obligation pour cette dernière d’accepter.
Attention, il faut cocher quelques cases pour se voir accorder une telle requête ! La liste complète est en fin d’article.
Et ce qu’il est primordial de savoir, c’est qu’un congé sabbatique n’est PAS rémunéré.
Vous l’aurez compris : un tel congé, ça se réfléchit, et ça ne peut s’accepter qu’à certaines conditions.
Congé sabbatique, congé sans solde : du temps, mais sans argent
Toutefois, si vous avez besoin de temps pour vous, que ce soit pour un projet personnel ou envisager une reconversion professionnelle, il vous est également possible et souvent plus simple de prendre un congé sans solde.
Votre employeur peut, là encore, tout à fait refuser. S’il accepte toutefois, vous ne serez, là non plus, pas payée.
Quoi qu’il arrive, prendre la décision d’interrompre son activité professionnelle pendant quelques temps est l’équivalent d’un saut (surtout financier) dans le vide, qu’il faut prévenir et dont il faut muscler les contours.
Maintenant que je vous ai fait peur, voyons le bon côté des choses : un tel congé permet de prendre du temps pour soi tout en s’assurant que notre entreprise nous garde une place au chaud.
Et comme j’ai eu la chance de pouvoir me le permettre, j’ai posé un congé sabbatique. Ça valait tellement le coup.
Pourquoi mon congé sabbatique est de loin la meilleure idée de mon année
Il est des instants dans la vie où prendre soin de soi devient une priorité absolue.
Personnellement, au sortir d’une année 2019-2020 résolument catastrophique, réévaluer mes attentes professionnelles, mes besoins privés et mon quotidien s’est avéré justement relever de la priorité.
Le congé sabbatique, déjà bien présent dans mon esprit depuis des mois, s’est présenté comme une solution à ma sensation de vide et celle d’être à plat — à court d’idées dans mon travail, à bout de souffle dans ma vie privée.
Encouragée par la lecture du livre de Julia Cameron dont je vous parlais plus haut, j’ai demandé à mon entreprise cinq mois et demi de break. C’est à dire une absence totale au bureau et une suspension temporaire de mes activités professionnelles, tout en conservant mon CDI.
Ceci nécessitait une ré-organisation de ma vie, puisque, il convient de le rappeler, je n’ai pas gagné un seul centime pendant cette période ! J’ai donc pris un coloc (ce qui a divisé mon loyer par deux), pioché dans mes économies, et je me suis serré la ceinture.
L’objectif ce tout cela : redonner du grain à moudre au moulin de ma créativité et prendre soin de ma santé mentale.
La solution ? Consacrer mon nouveau quotidien, désormais débarrassé de toute contrainte d’horaires et de missions dont je n’aurais pas moi-même été à l’initiative, à la confection de quelque chose d’intime, de sain et d’épanouissant.
Pendant ces quelques mois, je me suis donc appliquée à écrire de la fiction.
J’ai commencé par ré-écrire un roman dans les tiroirs depuis trop d’années. Il n’était cependant pas question de bosser dessus sept heures par jour, car l’intérêt d’un tel congé était certes de m’astreindre à une rigueur personnelle, mais pas suffisamment pour m’ôter la notion de plaisir à la tâche !
Ainsi, j’ai écrit quelques heures par jour, souvent tôt le matin pour avoir mes après-midis de libre.
Très vite, l’exercice est devenu non seulement jubilatoire mais aussi et surtout introspectif. J’ai pu approfondir ma connaissance de mon propre cœur : ses aspérités, ses qualités, ses limites, les dernières étant moins étendues que je ne le croyais.
Rapidement, d’autres idées sont nées. Le roman n’était plus le seul ouvrage auquel je comptais m’atteler.
À force d’écouter l’inspiration et ses allers-venues, une porte s’est ouverte : celle de la créativité sans bornes.
Le congé sabbatique m’a permis de ré-embrasser ma créativité
Et je dis ça sans prétention aucune.
L’intérêt de la méthode de Julia Cameron, par laquelle je suis arrivée à la conclusion que ma créativité était bloquée par un rythme qui ne me convenait plus, est de développer la source créative qui sommeille en CHACUN DE NOUS.
Ainsi j’ai écrit, avec l’aide de mon binôme (elle aussi en refonte totale de sa vie professionnelle et artistique), trois séries de fiction.
Une somme titanesque de travail pour un rendement actuellement inconnu, qui a eu sinon le mérite de faire de moi une autrice de fiction professionnelle, au moins une personne qui embrasse ses ambitions !
La réalité, c’est qu’entre deux crises d’angoisse dont je vous parlerai plus tard, ce congé a eu ceci d’éminemment positif qu’il m’a forcée à « remplir mon puits ».
Le puits, c’est cette source d’eau, enfin de créativité ici, absolument indispensable. Sauf qu’en période de sécheresse, le puits se vide. Le puits de la créativité a besoin d’être constamment rempli.
Ce que j’avais personnellement arrêté de faire. Mon quotidien était donc devenu routinier, plus rien ne venait nourrir mon imaginaire.
Énorme problème quand, comme moi, on exerce un métier directement lié à l’inspiration !
Pour remplir ce puits, il suffit parfois d’une balade en dehors de nos sentiers battus — ce qui peut simplement signifier une rêverie dans une cathédrale, un footing en bord de mer ou une expo.
Tout ce qui peut nourrir le cerveau de nouvelles images, en fin de compte, et qui est résolument subjectif.
Quoi qu’il en soit, avoir un rythme à moi, dépossédé d’obligations salariales, m’a permis de sortir quand j’en avais envie, afin de remplir ce fameux puits.
Le résultat a été quasi-immédiat et les idées ont plu, tout comme la motivation pour les réaliser.
Vous l’aurez compris : ce congé a sauvé ce qu’il me restait d’une créativité amoindrie par des années de routine professionnelle.
Les grandes crises existentielles liées à la marginalité de la pratique
Ça n’est un secret pour personne : nous vivons dans une société capitaliste où la productivité est reine, l’inactivité assimilée à la fainéantise. Et je n’échappe pas aux rouages d’une société qui a bien fait son travail pour façonner mon cerveau et mes habitudes.
Ainsi, prendre quelques mois pour moi, sans gagner le moindre argent, a évidemment donné lieu à quelques instants de doute, voire de panique absolue.
« Qu’est-ce que je branle de ma vie ? Je me prends pour qui ? Pour Molière ? » et autres questions ont modelé les premières semaines de mon congé où j’étais seule dans le grand bain d’une vie où personne ne m’attendait nulle part — ni le matin, ni le midi, ni le soir.
La solitude, inhérente à mon projet, m’a semblé si vaste qu’elle en est au début devenue insurmontable.
Mais heureusement, et parce qu’après la pluie vient le beau temps, j’ai appris à ne vivre qu’avec moi-même (je voyais quand même mon mec et mes amis le soir), avec ma seule volonté pour toute gouvernance.
Une fois les crises existentielles maitrisées, l’expérience est devenue surtout salutaire ; bien qu’il m’est arrivé de douter de mon travail personnel, l’angoisse n’a jamais excédé le plaisir intense de me reconnecter avec moi-même.
Au-delà de la dimension professionnelle, ce congé m’a permis une plus grande ouverture au monde. Ce qui parait étonnant puisque j’ai passé le plus clair de mon temps seule, enfermée chez moi ! Mais justement, la solitude permet parfois un plus grand plaisir à se mêler aux autres, quand vient le moment…
Dès lors, j’ai rencontré plus de gens que d’ordinaire, j’ai été plus à l’écoute des commerçants, des hôtes qui m’ont logée cet été, de mon partenaire et de mes amis.
Vous l’aurez compris j’aurais du mal à trouver à redire à cette décision, qui me permet aujourd’hui de revenir au travail motivée, requinquée et surtout la tête pleine d’idées.
Je ne saurais que trop recommander — si vous pouvez vous le permettre, bien sûr — cette solution, qui peut en réalité répondre à autant de besoins qu’il existe d’individus : une envie de voyage, un besoin de virage professionnel, la nécessité d’assister quelqu’un ayant un souci de santé ou étant en fin de vie, écrire un spectacle ou simplement glander un grand coup, parce qu’on en a besoin à un instant T.
Rien ne devrait contredire votre besoin de prendre soin d’une partie de vous ou de votre personne tout entière pendant quelques mois.
En revanche, quelqu’un peut le faire et ce quelqu’un peut être votre hiérarchie ou votre banquier.
Vous trouverez ci-dessous, dès lors, les conditions requises pour demander un congé sabbatique.
D’après le site du service public, le salarié qui souhaite bénéficier d’un congé sabbatique doit remplir toutes les conditions suivantes.
Ancienneté dans l’entreprise
Le salarié doit avoir une ancienneté d’au moins 36 mois dans l’entreprise.
L’ancienneté prise en compte peut être considérée sur plusieurs périodes de travail non consécutives dans l’entreprise.
Toutefois, une convention ou accord collectif d’entreprise peut prévoir une durée d’ancienneté différente.
Années de travail
Le salarié doit avoir effectué 6 années d’activité professionnelle.
Délai de carence entre 2 congés
Le salarié doit respecter un délai de carence: Période écoulée entre 2 événements.
Le salarié ne doit pas avoir bénéficié dans l’entreprise, à la date de départ en congé, au cours des 6 années précédentes :
- soit d’un projet de transition professionnelle (PTP) d’une durée d’au moins 6 mois,
- soit d’un congé pour création ou reprise d’entreprise,
- soit d’un précédent congé sabbatique.
À lire aussi : J’étais sceptique face à la méthode « Libérez votre créativité », et j’avais tort
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