J’ai franchi une grande étape dans ma vie de fan girl : j’ai eu la joie incommensurable et l’honneur de poser quelques questions au DJ Parov Stelar, célèbre pour être un des tauliers de l’electro swing avant le concert qu’il donnait le soir même au Sziget Festival.
Nous avons passé quelques petites minutes ensemble pour discuter de sa musique, des concerts et des êtres humains. Un bien beau moment !
L’article est illustré par les photos de Marine Stieber.
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- Es-tu prêt à faire danser les gens ce soir ?
Parov Stelar : Oh oui, je le suis ! J’étais impatient car nous avons eu deux jours de pause sans donner de concert, et c’était deux jours de trop !
- En parlant de danse, justement, tu es une vraie inspiration. On peut trouver sur YouTube des vidéos de personnes qui dansent comme des dieux et déesses sur tes chansons. Quel est ton ressenti vis-à-vis de ce phénomène ?
C’est fantastique, car pour moi ça signifie que le message a été reçu ! Je fais de la musique pour faire bouger, pour faire danser. J’adore être sur la route pour rencontrer les gens, et c’est formidable de constater qu’on inspire comme ça de tels artistes.
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- Est-ce le but pour un créateur de musique d’inspirer les gens à faire leurs propres créations ?
Alors ce n’est pas mon but premier ! J’aime avant tout ce que je fais. Je me satisfais un peu égoïstement de moi-même, assis dans mon studio, en train de créer mes sons.
Mais quand ensuite on voit le résultat, qu’on constate que les gens comprennent l’enjeu de mon travail au point de créer le leur, cet échange humain me laisse sans voix.
- As-tu toujours voulu faire danser les gens ? Est-ce que déjà, enfant, tu mettais la musique à fond pour faire danser tout le monde chez toi ?
Non, pas du tout, j’étais plutôt du genre timide. J’avais pour ambition de devenir joueur de tennis professionnel ! La musique est arrivée par accident.
Ma mère est peintre, donc j’ai moi-même commencé une carrière de peintre assez tôt. J’ai été amené à réaliser des flyers pour un festival de musique électronique, et ça a été mon premier pas dans ce monde-là. Petit à petit, ça s’est développé, et ça a mené à ma carrière !
- Justement, tu es peintre et designer. Est-ce que tu crées de la musique comme tu crées un tableau ou un objet d’art ?
Oui, c’est comparable, pour moi ce sont les mêmes sensations. C’est la même chose d’être en face d’une feuille blanche ou d’un écran d’ordinateur vide. Dans tous les cas, ce sont des petites pièces que l’on met ensemble et qui aboutissent à un résultat final. Ce sont les mêmes émotions.
C’est comme cuisiner : tu as d’un côté les carottes, de l’autre les saucisses, et il te faut créer quelque chose de nouveau !
- Es-tu inspiré par d’autres artistes ?
Plein ! Je n’irai pas jusqu’à dire que j’ai des idoles, mais j’admire plein de gens. D’ailleurs il y a beaucoup de Français dans le lot — et je ne dis pas ça juste parce que tu es Française ! À chaque fois que j’aime une chanson je me dis « Ah, ok, encore un Français ! ». Cela va de M83 jusqu’à Air (je suis un grand fan d’Air), en passant par les Daft Punk, Breakbot.
Les Français ont toujours quelque chose de frais ! Ils n’essayent pas de copier d’autres personnes : on franchit une nouvelle étape dans la musique avec eux.
- Pour ta musique, tu as recours à des sons anciens et tu leur donnes une nouvelle jeunesse en les mixant avec des sons plus modernes, notamment pour ton travail autour de l’electro swing. Pourquoi selon toi ces sons sont-ils faits pour être ensemble ?
Je ne sais pas, il faut demander aux sons directement !
Pour moi la musique permet de décrire les choses quand je n’ai plus les mots pour le faire. Donc c’est difficile de trouver une description à la description !
Mais en fait, si on jette un oeil aux débuts des années 1930 et à son mouvement jazz and swing, en fait, c’était les premières raves, les premiers festivals de techno de l’époque ! Les gens devenaient fous et faisaient la fête, comme par la suite dans les années 1990. Du coup j’ai tenté de voir ce que ça donnait d’avoir ces deux époques mises ensemble !
- Justement, est-ce que selon toi les sons plus anciens ont besoin de sons plus modernes pour être appréciés de nos jours ?
Je pense que ça peut beaucoup aider, oui. En tout cas, j’ai essayé dans mon travail de garder l’esprit, le rythme de l’époque, pour transposer cette énergie d’avant dans des temps plus modernes !
- Le Parov Stelar Band est composé d’artistes venus de pays différents. Est-ce que tu mélanges toutes leurs cultures dans ta musique ?
Bien sûr ! Je ne sais pas si on le fait consciemment, mais chacun apporte un bout de sa propre histoire. Le batteur vient de Suède, le trompettiste vient de New York… Donc je pense que chacun apporte sa propre culture.
C’est la même chose de mixer de la musique que de mettre des gens différents dans un groupe : on obtient un mélange !
- Parlons maintenant du festival ! Qu’est-ce qui est différent selon toi entre un évènement en plein air comme le Sziget et un concert dans une salle ?
C’est difficilement comparable. Dans une petite salle c’est plus intimiste, on est plus proche des gens, on obtient une réaction différente. Je n’irai pas jusqu’à dire que c’est plus honnête, mais c’est plus direct, plus proche.
Mais d’un autre côté, dans ce genre de festival, quand 50 000 personnes se mettent à hurler dans un seul et même élan, et bondissent en tout sens, c’est profondément stimulant !
Mais j’aime les deux ! En fait, au bout de 10 ou 20 concerts, devant 20 000, 30 000, 40 000 personnes, tu finis par rechercher des concerts plus familiers, plus intimistes.
- As-tu un souvenir particulièrement marquant d’un festival ?
Cette année, aux Vieilles Charrues. Il y a d’ailleurs une vidéo de ce moment. Je savais que le public français était vraiment dingue. Mais ce festival, rien que d’y penser, j’en ai des frissons. (NDLR : je confirme, il m’a montré son bras, il en avait).
Il y avait tellement de gens, ils dansaient avec nous du premier jusqu’au dernier rang. Et je peux le dire au nom de tout le groupe : nous étions complètement sans voix ! Il y avait tellement d’énergie ! Avec tout ce qui s’est passé en France, j’entends par là le terrorisme et la peur, j’étais très impressionné de voir comment les gens réagissaient. Ils n’en avaient rien à faire, ils n’avaient pas peur ! Ils étaient forts !
Quand on lit dans les journaux les grands discours des hommes politiques qui affirment comme quoi il faut aller de l’avant et ne pas céder à la peur peur, c’est une chose. Quand tu as cette impression en direct avec les gens, oh merde, ça me redonne des frissons ! (NDLR : je confirme, et moi aussi j’en avais)
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
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