La première impression est une effluve, entre l’orange et la rose, et ça tombe bien, car c’est ce qu’on attend d’elle. Christine Orban est une effluve, entre l’orange et la rose, diffusée à travers la pièce par sa voix chaude. Puisqu’il faut parler nous parlerons, mais le personnage sans le discours suffirait à un article.
« On [N’oublie pas d’être heureuse] est bien parti. Dans les ventes, on est 3ème juste derrière Paul Auster ». C’est lancé sans prétention, en même temps qu’elle se défait de son gilet, son sac en cuir noir verni encore sur les genoux. Christine Orban impressionne, dans le bon sens du terme. Quand elle dit « avant de commencer un livre, je ne sais pas ce qui va se passer, je pose le cadre et puis le reste vient tout seul», on l’imagine en train de découvrir sa propre histoire, ses demi-lunes noires sur le bout du nez. Son premier lecteur ? C’est son mari, à qui elle « ne montre rien avant que tout soit bouclé. Ni à lui ni à personne d’ailleurs ». Superstition de l’écrivain. Elle appuie son propos d’un geste de la main.
« Ecrivain, c’est ce que je sais faire, c’est mon métier ». Pourtant elle a essayé de faire autre chose, du droit, comme Maria-Lila dans son roman. Ressembler à ses personnages, l’auteur l’assume : « c’est mon imagination, cela vient de ce que je connais, c’est normal que j’y mette de moi ». Et si, malgré l’amour de la littérature, les histoires n’étaient pas venues ? « C’aurait été terrible si je n’avais pas su écrire ».
Aujourd’hui, après 17 romans, Christine Orban sait qu’elle a de la chance. Elle transforme l’empathie qui l’habite en un monde magique qu’elle canalise dans ses romans, et parvient à se passionner encore des autres, sans devenir cynique. « Il y a de bonnes vibrations dans cette pièce, vous devriez demander qu’ils vous la prêtent pour écrire, s’ils vous aiment bien ».
C’est avec un goût de mystère, d’orange, de rose, et une épaule bronzée qui nargue le 0°C qu’il doit faire dehors que Christine Orban raconte. La réflexion autour de son dernier roman, c’est peut-être que « la sagesse, c’est de rester soi-même ». N’oublie pas d’être heureuse, l’histoire de Maria-Lila, une adolescente qui doit passer à l’âge adulte en quittant tout ce qui lui est doux et familier. Un roman comme une boucle avec son premier livre édité, « Les petites filles ne meurent jamais ».
De sa voix douce comme le goût d’un bâton d’encens qui emplit une pièce, elle explique qu’elle débute une histoire pour comprendre quelque chose qui lui échappe, et pour comprendre les autres. « Et maintenant, j’ai compris ». Est-elle sereine ? Un moment pour répondre, le temps de regarder la vue par la fenêtre. « Oui », avoue-t-elle dans un sourire. Si les petites filles ne meurent jamais, elles doivent se transformer en écrivains au goût d’orange et de rose.
— N’oublie pas d’être heureuse, aux éditions Albin Michel
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