Aussi incroyable que cela puisse paraître, nous sommes en 2022 et oui, les femmes sont en moyenne encore et toujours moins bien payées que les hommes. Selon l’agence de statistiques Eurostat, l’écart de rémunération moyen se situe aux alentours des 13% à l’échelle européenne. En France, le chiffre est malheureusement plus important : à temps de travail équivalent, les femmes gagnent en moyenne 15,8% de salaire en moins que leurs homologues masculins.
Mais – cocorico – nous faisons toujours mieux que nos voisins européens : en Lettonie, le chiffre grimpe jusqu’à 22% tandis qu’en Allemagne et en Autriche, il est de plus de 18%.
4 novembre 2022, 9h10
À partir des statistiques établies par Eurostat, la newsletter féministe Les Glorieuses fixe chaque année depuis 2016 la date théorique à laquelle les Françaises commencent à travailler « gratuitement ». Cette année, c’est aujourd’hui, le 4 novembre à 9h10. En 2021, c’était le 3 novembre et en 2020, le 6 novembre.
« Si depuis 6 ans le chiffre stagne, on peut toutefois constater une vraie évolution des mentalités : ces inégalités de salaire sont de plus en plus décriées et sont devenues tout bonnement inacceptables pour une majeure partie de la population », déclare Rebecca Amsellem, économiste et fondatrice des Glorieuses.
Comme chaque année, le collectif établit une liste de revendications via une pétition afin d’interpeller les pouvoirs publics sur la question.
« Ce sont les mêmes revendications depuis plusieurs années en fait. Il y a tout d’abord le principe d’application de l’éga-conditionnalité, qui lie l’attribution de fonds publics au respect de l’égalité salariale dans une entreprise. Il y a aussi la demande de revalorisation des salaires pour les emplois occupés majoritairement par les femmes et qui ont été en première ligne pendant la crise sanitaire. Rappelons qu’elles représentent 87% du personnel infirmier et 66% des professeurs des écoles », souligne Rebecca Amsellem.
Il y a aussi la demande de création d’un congé parental payé de manière équivalente pour les mères et les pères, à la manière du modèle appliqué en Suède. « Le congé paternité actuel est trop insuffisant », déplore l’économiste. « Mettre en place un congé paternité de même durée, ça permettrait aussi de changer le regard des hommes par rapport à leur virilité. Notre révolution féministe ne touche pas que les femmes : elle doit aussi permettre aux hommes de se questionner sur les masculinités et le patriarcat ».
Des lois aux effets plus concrets
En France, le législateur s’est emparé du problème des inégalités salariales il y a plusieurs décennies. « La loi qui pose le principe d’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes date de 1972 », indique Dominique Meurs, économiste, professeure et chercheuse à l’université Paris-Nanterre au laboratoire Economix. Depuis cette date, de nouvelles lois ont été promulguées, mais force est de constater que les résultats sont encore insuffisants, malgré une prise de conscience de plus en plus importante. « La mise en place de l’index de l’égalité salariale en 2019 a notamment renforcé l’intérêt des grandes entreprises sur le sujet » poursuit l’économiste.
Cet index repose sur 5 critères, incluant notamment les écarts de rémunération et du taux de promotion entre les femmes et les hommes. Les entreprises (à partir de 50 salariés) obtenant une note inférieure à 75/100 doivent prendre des mesures correctives dans les plus brefs délais. Les mauvais élèves échouant plus de 3 années consécutives seront sanctionnés par une amende, tout comme les établissements qui n’auront pas déclaré leur index.
La note moyenne des entreprises pour 2022 s’établit à 86/100. C’est seulement 1 point de plus par rapport à 2021.
Une prise de conscience plus importante des entreprises
Selon Dominique Meurs, les grandes entreprises, du fait de l’index de l’égalité salariale, mais aussi de l’évolution des mœurs, sont de plus en plus sensibles au principe d’égalité. « Beaucoup d’entre elles engagent des démarches pour obtenir des certifications de renommée mondiale, délivrées par des organismes indépendants. La certification EDGE (Economics Dividends for Gender Equality ndlr) est l’une des plus reconnues et exigeantes, avec 3 niveaux d’expertise. » La certification est renouvelable tous les 2 ans, ce qui encourage les entreprises à ne pas relâcher leurs efforts en matière d’égalité salariale et de parité au travail. Si pour Rebecca Amsellem la démarche est aussi « une excellente stratégie de communication » pour les entreprises, « au final, toute initiative qui permet d’endiguer les inégalités reste une bonne initiative ».
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