Les filles, aujourd’hui ce n’est pas un Matou comme les autres qui vous parle. Aujourd’hui, votre pompier préféré a été décoré. Pour « Acte de bravoure et de dévouement », eh ouais. J’vous raconte ?
Tout commence par une soirée d’hiver des plus banales. Pas trop d’interventions, un repas pris entre collègues devant Enquête d’Action, puis un départ en urgence à bord du camion incendie pour une « fumée suspecte ».
En arrivant dans le quartier on voit bien vite un grand panache s’élever entre les arbres. Ah ouais, bien suspecte la fumée quand même…
Nous approchons le camion aussi près que possible du cabanon en flammes. Il se trouve au milieu d’un ensemble de jardins ouvriers, limite terrain vague, et évidemment il est de l’autre côté d’une grille fermée par un cadenas. Ah oui, j’oubliais : le tout est placé sous des lignes à haute tension, et les flammes atteignent déjà les 4 à 5 mètres de hauteur. Il faut savoir que la fumée et les gaz sont conducteurs d’électricité, on a donc intérêt à faire vite pour éviter la formation d’un arc électrique.
Tout-va-bien.
Tandis que le conducteur du camion court jusqu’à la borne incendie la plus proche, je commence à asperger le feu. Hop, un beau jet en bâton, des crachats réguliers pour faire tomber les flammes… Et révéler la présence de deux bouteilles de gaz déposées à l’entrée du cabanon ! Oups, c’est quand même chaud cacao là.
J’entends derrière moi notre chef répondre à un appel radio :
– Méfiez-vous les gars, la police nous signale une personne armée qui traînerait dans le coin ! – C’est quoi cette histoire ? – Aucune idée, ça a été rapporté par ceux qui ont signalé l’incendie. – Ok… Bon, bah on va faire avec.
Pendant ce temps mes collègues dégomment le cadenas pour qu’on puisse se rapprocher du cabanon. Mais histoire de compliquer une situation déjà pas très glop, la pince monseigneur casse sur le cadenas, et les voilà obligés de couper un à un les fils en fer du grillage. C’est pas comme si on était pressés après tout.
Enfin, au bout de quelques minutes, les flammes ont déjà bien faibli. D’ailleurs, le grillage est enfin ouvert, on va pouvoir se rapprocher pour mieux maîtriser l’incendie. Mais alors que je vais m’engouffrer dans le jardin, j’entends une voix derrière moi :
– Arrêtez-tout ! Ohooooh arrêtez !!! – Ça va pas ou quoi ?, je maugrée derrière la visière de mon casque qui me protège de la chaleur et des rayonnements des flammes.
C’est alors que je sens une main se poser sur mon épaule.
– Non mais arrête, ajoute Callaghan. – Mais on n’a pas fini !, je dis en continuant à avancer. – Éteins ta lance, mec. – Et pourquoi ça ?!
Il me montre alors du doigt un mec avec une carabine dans les mains
.
Avec une carabine dans les mains ?!
Une carabine. Dans les mains. Pointée sur nous.
« Ok, fallait le dire tout de suite ». J’hésite un instant à lui envoyer un bon coup de jet dans la tronche pour le désarmer, mais le tuyau est très large et trop peu maniable pour que je puisse le surprendre. Et puis s’il arrive à tirer avant qu’on le désarme, ça risque de blesser quelqu’un. Ou pire. J’éteins donc mon barda et je fais comme le reste de mon équipe : je lève les mains au-dessus de ma tête.
L’énergumène au bout de la carabine est jeune, sa chemise à carreaux a quelques semaines sans lessive au compteur, et il sent l’alcool à plein nez. C’est qui ce type qui nous menace ? Un hipster sur la mauvaise pente ? Dexter version dernier épisode ? Un alcoolo avec une tête de Dalton ?
« Dégagez de là ! Tout le monde derrière le cam’tar !» L’accent ne laisse aucun doute : notre ami vient du camp de gitans voisin, et il a pas du tout envie de rigoler.
« Okkkk, c’est quoi le plan ? », je souffle à Callaghan. Mon co-équipier me lance un regard impuissant.
Je sens la colère m’envahir, et je comprends aux regards haineux de mes collègues que nous contenons tous notre énervement. Nous sommes à une dizaine de mètres d’un cabanon en flamme qui risque d’exploser, et ce pauvre type ne se rend pas compte du danger qu’il nous fait courir en nous empêchant d’intervenir.
Mais Hipster le Gitan nous pousse du bout de la carabine jusque derrière l’ambulance et nous fait aligner :
– À genoux ! ordonne-t-il. – Va te faire voir ! on répond de concert. – On doit aller éteindre ce feu ! Laisse-nous faire idiot, ou on va tous y passer !, ajoute même Callaghan.
Ok, celle-là, l’alcoolo en chemise à carreaux ne s’y attendait pas ! Mais au lieu de se calmer, il entre dans une colère noire et pointe directement sa carabine sur la tête de Callaghan : « À genoux, j’ai dit. »
Gloups.
Du coin de l’œil, nous voyons alors une voiture de flics s’avancer dans l’allée. Puis éteindre rapidement ses feux et reculer tout doucement, à temps pour ne pas se faire voir du hipster mal luné.
Bon, on dirait qu’on est seuls sur ce coup-là…
La suite de cette histoire par ici !
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