Il aura fallu la présence d’un agresseur dans un livre à paraître pour que le #Metoo du monde de la photo émerge enfin, rapporte la photographe Emma Birski sur son compte Insta. Une page instagram, @metoophoto_, a ainsi été lancée début mars pour recenser les témoignages et apporter de l’aide aux victimes. Le mouvement dénonce aussi bien les abus commis par des photographes professionnels (comme le « violeur de Tinder ») que de photographes amateurs.
Anna*, 25 ans, a été agressée par un de ces « faux-tographes ».
#MeTooPhoto : « Il a baissé mes bretelles en me disant que c’était plus joli »
« Je n’avais encore jamais posé. En 2020, j’avais posté des photos de moi sur un groupe Facebook de collaboration modèles et photographes. Un photographe a alors pris contact avec moi pour me proposer un shooting dans son studio. Il m’a montré de jolies photos de son travail par message, ce qui m’a mise en confiance. Sauf qu’en arrivant sur place, il n’y avait aucun studio, c’était seulement son salon dans son appartement… Ça m’a surprise, surtout que j’étais un peu perdue comme je n’avais encore jamais posé, mais il m’a rassurée. On a parlé, il m’a servi une tisane, il était très sympa à ce moment-là.
Ce jour-là, j’avais une robe blanche décolletée avec des bretelles très fines. Et lors d’une prise où j’étais allongée par terre, il a baissé mes bretelles en me disant que c’était plus joli. Au début j’ai laissé faire, un peu choquée, puis il les a baissées encore, sans me prévenir, dévoilant ma poitrine que j’ai cachée avec mes mains par réflexe. J’ai remonté mes bretelles, mais il les a à nouveau baissées jusqu’en dessous des seins après m’avoir dit de fermer les yeux pour la photo… Je suis vite partie après ça, poliment, et je me suis sentie bête dès cet instant. J’aurais dû faire plus de recherches, il n’avait aucune page Insta, rien en ligne. Ça m’a frappée après… Les photos vues avant n’avaient d’ailleurs rien à voir avec celles que j’ai reçues après, qui étaient très amateurs.
« C’est quand il est revenu dans mes messages que j’ai eu le déclic »
Je n’en ai parlé à personne jusqu’à aujourd’hui car j’avais honte. Enfin, je me sentais en colère parce que j’avais peur qu’il ait des photos de moi dénudée, et je ne sais pas ce qu’il peut en faire. Avec ma profession, ça pourrait me poser problème. J’ai mis quelque temps à comprendre que j’avais vécu une agression sexuelle, c’est quand il est revenu dans mes messages que j’ai eu le déclic : j’ai tout de même décidé de poster les photos en le taguant, et le harcèlement a commencé là. Il m’a envoyé à plusieurs reprises des messages d’abord sur Facebook puis sur Instagram pour me demander de shooter à nouveau ensemble, en m’appelant « ma belle », avec des cœurs à chacun de ses messages (il savait pourtant en plus que j’étais fiancée). Je l’ai bloqué. Il est revenu avec d’autres comptes, dans ma messagerie pro, et même sur mes commentaires Insta. Et ça a duré plus d’un an.
Je n’ai pas fait de photos pendant toute cette période. Heureusement, j’ai retenté avec un shooting en groupe, avec deux photographes filles et un gars. C’était en extérieur, et avant chaque geste, iels nous demandaient. J’ai poursuivi mon activité de modèle avec d’autres photographes formidables par la suite, des personnes respectueuses qui m’ont appris à prendre confiance en moi. »
*le prénom a été modifié
#MeTooPhoto : quelques conseils pour les futures modèles
- Se renseigner avant d’accepter un shoot surtout en studio ou chez le photographe,
- Demander son book sur les réseaux sociaux et ne pas se fier juste aux photos envoyées dans une discussion privée,
- Vérifier en faisant une recherche Google Image que les photos présentées sont bien une création originale et non le travail d’une autre personne,
- Demander un retour d’expérience à des personnes qui ont travaillé avec le/la photographe,
- Venir accompagné·e au shooting, que ce soit chez la personne ou en studio.
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Les Commentaires
Soutient à la témoignante, c'est vraiment insidieux ce genre d'agression.