Publié initialement le 19 mars 2012
Qu’est-ce qu’être hypocondriaque ? Oh, presque rien. En fait, c’est tout simplement l’impression qu’au moindre petit souci de son corps, c’est le signe d’une très grave maladie qui conduira à une mort lente et douloureuse, avec des vers dans l’intestin si les choses se font bien. Bien entendu, il y a plusieurs stades : de celui qui possède juste son gel anti-bactérien pour éviter la malaria, à celui qui passe sa vie à l’hôpital tellement c’est la panique. Dans mon cas, c’est juste un peu marrant. Et un peu flippant, aussi.
Premiers symptômes de l’hypocondrie
Comment suis-je devenue hypocondriaque ? Franchement, je n’en sais rien. Je ne me souviens pas m’être réveillée un matin pour me dire « hoho, et si aujourd’hui j’inventais que le virus Ebola avait pris possession de mon corps ? ». Non, c’est juste venu petit à petit.
J’ai toujours eu de très nombreuses peurs dans ma vie. Pour gagner du temps, demandez-moi plutôt de quoi je n’ai PAS peur. Enfin, vous voyez l’idée. En grande flippée du quotidien (on dirait pas, comme ça, sous mon air de cynique qui pratique la fête du slip en permanence), mon esprit s’est sans doute dit qu’avoir peur des maladies, c’était rigolo aussi.
J’ai toujours eu plus ou moins des gens autour de moi qui avaient peur de crever de tout et n’importe quoi. Quand j’étais petite, mon père avait LA solution miracle pour voir si j’étais mourante (même en cas de gastro, de rhume, ou de saucisson qui se digérait mal) : me faire remuer la nuque. Il justifiait ça par un « si tu as la nuque raide, tu as une méningite ». À 6 ans, la méningite c’est comme un Pokémon qui va te dézinguer grave et te faire mourir dans d’atroces souffrances.
J’avais aussi droit à des blagues du type « si tu tousses encore, ton poumon va tomber ». J’imaginais donc que mon poumon allait réellement se barrer de ma cage thoracique et tomber dans mon ventre, et pouf. Raide morte. Cela a sans doute nourri mon terrain d’angoissée chronique, jusqu’à faire de moi l’hypocondriaque que je suis aujourd’hui. Très classique.
L’hypocondriaque et ses réactions (un peu) excessives
J’ai tendance à croire que mes angoisses sont plus des petites originalités qui font partie de moi, et qui font plutôt rire les autres. C’est le cas, sauf quand l’une d’elle débarque alors que je ne m’y attends pas et que
je deviens encore plus chiante qu’une armée d’ovaires à J-3 des menstruations. Régulièrement, je souffre comme le commun des mortels de quelques menus problèmes de santé. Comprenez par là : j’ai le nez qui se bouche, parfois je tousse, et régulièrement j’ai mal à la tête. Raisonnement d’un humain normalement constitué :
- J’ai le nez qui coule : c’est la saison, j’ai froid
- Je tousse : c’est parce que je suis restée trop longtemps dans les courants d’air
- ai mal à la tête : c’est pas sérieux 6h de Gossip Girl non-stop
Pour quelqu’un d’hypocondriaque :
- J’ai le nez qui coule : je veux bien perdre un peu de mucus, mais la couleur jaune là, c’est normal ? J’ai du pus dans les poumons c’est ça ?
- Je tousse : on ne le sait pas assez, mais une toux sèche soudaine est un des symptômes d’une embolie pulmonaire.
- J’ai mal à la tête : ok, tout s’explique, je suis soit en train de faire un AVC, soit j’ai une tumeur de la taille d’un pamplemousse. Ce n’est pas POSSIBLE autrement.
Ce qui m’arrive donc d’avoir des parades absolument ridicules, que je pratique devant tout le monde parce que quand il y a de la gêne, il n’y a pas de plaisir. Quelques remèdes pour calmer tout ça :
- Faire des gestes complètement cons pour voir si mon cerveau fonctionne encore : je peux lever les deux bras pour voir s’ils se lèvent symétriquement, fermer un œil et puis l’autre…
- Prendre mon pouls : comme ça, à la fraîche. Une fois j’ai même enclenché le chrono sur mon portable pour voir si j’étais pas en tachycardie. Bah finalement, non.
- Prendre ma température : au moindre rhume, je prends ma température à gogo et la moindre variation de température est étudiée. À 0,3 degrés près bah je sais pas, je pourrais mourir tiens.
- Avoir toujours des médicaments sur moi : aspirine (si d’un coup je m’imagine que mon sang va former un caillot) (quoi ? je prends mes précautions !), Dafalgan et pastilles pour la gorge. Quand je vais à la pharmacie parisienne Rue du Four (qui a plein de compléments alimentaires et médocs sans prescriptions en libre service pour des prix sacrément avantageux), je me sens comme une gosse chez Toy’R’Us et j’achète plein de conneries que je suis pas certaine d’avaler. Mais c’est au cas où, faut se préparer à l’invasion microbienne.
- Gel antibactérien : le mien ne vient pas du supermarché, mais est utilisé dans le cadre professionnel, il sent l’alcool à plein nez et nique les mains. Bah ouais, j’ai pas confiance trois secondes dans tous ces gels du commerce qui sentent la noix de coco. Comment ces trucs peuvent tuer les virus s’ils ne sont même pas une menace pour moi ?
À lire aussi : De l’art d’être une malade chiante
Ne JAMAIS visiter Doctissimo quand on est hypocondriaque
Comme vous pouvez le deviner, je suis une fervente lectrice de Doctissimo. Ce site, c’est le mal pour tous ceux qui flippent de mourir d’un cancer du pancréas foudroyant. En gros, sur « Docti », les conversations se font toujours selon le schéma suivant :
– Internaute lambda : Bonjour, depuis quelques jours j’ai une rougeur au niveau de la gorge, ça me gratte, c’est chaud et j’ai mal, qu’est-ce que vous en pensez ? J’ai rien trouvé sur le net. – Doctinaute 1 : oh t’en fais pas tu t’es peut-être irrité la peau avec un col roulé, rien de grave. (nota bene : cet avis rationnel n’est JAMAIS pris en compte. Jamais.) – Doctinaute 2 : tu as pensé à la souche de peste papulex ? C’est en recrudescence actuellement en Moldavie. Si quand tu faisais tes courses tu as malencontreusement touché le coude d’un pervers ayant eu des relations sexuelles avec une chauve-souris moldave infestée, tu es porteur du virus. – Internaute lambda : ouais en effet il y avait des gens bizarres au supermarché, c’est peut-être ça. C’est soignable ? – Doctinaute 2 : il faut que tu ailles tout de suite à l’hopital !!! – Doctinaute 3 : j’ai envie de dire, c’est déjà trop tard. Ma cousine, partie en Moldavie pour assister aux sélections de l’Eurovision, a voulu s’initier au sexe tantrique de l’Est. Résultat, ils lui ont frotté le string avec la patte d’un lapin mordu par une chauve-souris infestée. Aujourd’hui, elle est morte. On ne parle pas assez des maladies de l’est qui reviennent sur le marché de la bactérie !! Les médias ne veulent pas blesser le gouvernement donc tout est gardé sous silence !!! Pas étonnant en pleine période d’élection présidentielles, n’est-ce pas monsieur Nicolas !!!!!!!!!!! – Internaute lambda numéro 2 , 6 mois plus tard : bonjour, je suis tombé sur ce topic via une recherche google. Je voulais savoir si l’homme du premier message s’en était sorti ou pas, car j’ai la même chose et je m’inquiète. Ps : je ne suis pas allé en Moldavie dernièrement.
Ce topic restera sans réponse. Pourquoi ? Parce que bien souvent, ces crevures d’internautes venus poser des questions sur Docti n’ont au final rien, mais ne viennent surtout pas le dire. Dans un esprit hypocondriaque, s’ils ne répondent plus, c’est qu’ils sont morts depuis tout ce temps. C’est LOGIQUE.
Pour les hypocondriaques au level déjà plus élevé, Doctissimo ne suffit plus : il y a aussi passeport santé, wiki, santepratique, vulgaris-medical… Le temps d’avoir parcouru tous ces sites, au moins 4 métastases se font formés dans le corps. Forcément, hein.
Traitement de l’hypocondrie
Pour mieux vivre au jour le jour le fait de flipper pour tout ça, je me suis mis des barrières qui m’aident plutôt pas mal :
- Arrêter les séries TV sur l’univers de la médecine : à part Scrubs (et encore, certains épisodes m’ont franchement mis les boules), je m’abstiens de regarder Docteur House, Grey’s Anatomy et même les rediffusions d’Urgence. Rien ne doit filtrer sur les maladies de ce monde. Rien.
- Éviter tous les films/livres qui parlent de cancer, maladie grave…
- Ne plus regarder les reportages télé du type « toute la vérité sur le steak haché », « enquête exclusive sur la filière roumaine : de l’abcès de poule au nugget », « tous allergiques à l’huile de palme ? ». Il me suffit de cinq minutes de visionnage pour décider dans mon esprit de ne plus rien avaler sous peine d’attraper la chifouillus. Autant zapper.
Depuis ? Depuis ça ne va pas forcément mieux, mais au moins je ne nourris pas mes angoisses. Si toi aussi tu souffres de tout ça, suce une pastille Drill et déjà, ça calme un peu. Pour le reste, toi l’immonde scélérat qui ne souffre de rien : ne pose plus jamais tes questions sur Doctissimo. Ou alors si, mais viens dire que finalement tu vas bien. C’est CAPITAL.
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Les Commentaires
Ce sujet me concerne. Cette pathologie est particulièrement horrible à vivre pour nous mais aussi pour notre entourage, pour notre médecin même (nos médecins...)
Tous les jours j'angoisse, la peur de mourir, d'avoir un cancer.
Je suis en ce moment toutes les semaines chez mon généraliste car j'ai bien quelque chose. A la base une reflux gastro-œsophagien mais qui persiste. Suivie par un gastro, il ne devrait pas y avoir de souci mais voilà, le traitement ne fait plus effet, j'ai apparemment une mycose buccale mais 4 jours sont nécessaires pour attendre le résultat du prélèvement, avant de traiter. Du coup les douleurs augmentent, les angoisses aussi et je suis dans la peur constante d'un diagnostic affreux.
Mon hypocondrie est arrivée à ma première grossesse, mes deux parents sont hypocondriaque.
Je fais tout ce que je peux. Les anti-depresseurs ne fonctionnent pas, les anxiolytiques non plus, je ne prends donc rien car ce ne serait que diminuer l'anxiété sans traiter la cause. Je vais tenter l'hypnose en septembre avec ma psychiatre.
La méditation m'aide un peu avec l'application "petit bambou" mais rien ne remplace mon Medecin qui est le seul à détenir la vérité finalement avec les examens à effectuer qui sont eux aussi anxiogènes !
Bref, je vais mourir un jour comme tout le monde mais cela je ne peux pas le contrôle et cela me fait peur.
Je ne vis plus, je ne profite pas de la vie ni de mes filles en bas âge.
C'est vraiment dur et je sens que les médecins en ont ras le bol