Des origines multiculturelles
Hussein Chalayan est un designer de mode chypriote-turc installé en Grande-Bretagne depuis l’âge de 8 ans. Il a fait ses études à la célèbre Central Saint Martins. Le concept store anglais Browns a d’ailleurs rachetée sa collection de fin d’études, nommée Buried Dress, qui abordait le thème de l’évolution et de destruction avec des robes en papier laissées sous terre pendant 3 mois.
Hussein Chalayan fonde sa maison de couture en 1994 avec l’aide fonds obtenus par des concours. Il s’affirme très vite comme un concepteur expérimental hors du commun.
En 2000 le magazine Time le cite comme l’un « des créateurs les plus innovants de tous les temps ». Il est également nommé Designer Britannique de l’année et reçoit l’ordre de l’Empire Britannique par la reine Elizabeth en 2006. C’est Vogue USA qui proclame qu’il est « le premier designer intellectuel de sa génération ».
Hussein Chalayan, un designer « intellectuel »
À mi-chemin entre art et mode, les créations de Chalayan sont conceptuelles. Le créateur mêle design, architecture, politique, religion, nouvelles technologies, critique sociale et mode. C’est pourquoi un bon nombre de ses collections sont exposées lors d’évènements d’art contemporain comme les biennales ou les musées. Il utilise souvent des supports vidéo ou sonores et ses défilés sont de véritables performances.
Gaga dans la Robe à bulles de Chalayan, qui partage visiblement son goût pour la performance
Ses thèmes de prédilection sont le déplacement, l’identité, l’isolement et l’oppression, qui sont tous liés à son vécu. Il évoque souvent les questions du voile islamique, de la diaspora, de la guerre et des nombreux déménagements qu’il a subi. Ses créations sont difficilement portables et relèvent de l’art ou de la pièce unique. Chalayan n’est pas intéressé par la mode au sens général du terme, il se préoccupe plus de l’évolution du corps humain et de son enveloppe. Il a d’ailleurs failli devenir architecte, ce que l’on ressent dans la construction de ses vêtements.
Des créations révolutionnaires
Between (printemps-été 1998)
Avec cette collection, Chalayan aborde le sujet politique du voile islamique. Il veut susciter la réflexion sur l’identité et notamment sur la condition des femmes musulmanes. Lors du défilé, six mannequins rentrent en scène les unes après les autres. La première est nue, seul son visage est caché par un masque. La seconde l’est à moitié et ainsi de suite jusqu’à ce que la dernière soit recouverte d’une burqa longue. Chalayan souhaitait montrer comment le code religieux dépersonnifie l’humain sans provoquer ou se moquer de la religion musulmane.
Before Minus Now (printemps-été 2000)
Chalayan aborde ici la question de l’innovation. Il intègre la technologie au vêtement avec la célèbre « Airplane Dress » (la robe avion) qui était contrôlée à distance. La robe en fibre de verre se métamorphosait sur scène à l’aide de mécanismes électroniques commandés et par la force du magnétisme pour laisser place à une robe tout en volume.
Afterword
(automne-hiver 2000)
C’est sûrement la collection la plus connue de Hussein Chalayan. Habitué aux déménagements fréquents dus aux conflits turcs et chypriotes, Chalayan imagine une maison que l’on pourrait emmener avec soi, sur soi. Les housses de fauteuils se retournent pour se transformer en robe, la table en bois se déplie telle une jupe à crinoline et les chaises se plient afin de devenir des valises. La performance est impressionnante et découle d’une vraie réflexion sur l’identité et le déplacement.
Ambimorphous (automne-hiver 2002)
Le créateur reprend le concept de la collection Between en faisant évoluer progressivement le vêtement de mannequins en mannequins : la première fille défile vêtue d’un costume traditionnel turc brodé très chargé, la dernière porte un tailleur pantalon qui serait le costume occidental. Entre ces deux mannequins, les vêtements représentent le processus de « morphing » qui mélange ces deux inspirations.
One Hundred and Eleven (printemps-été 2007)
Des robes qui rétrécissent comme par magie et des jupes qui se déploient en l’air, les vêtements de la collection One Hundred and Eleven se modulent à distance directement sur scène. La performance est éblouissante de technologie et de poésie et Chalayan repousse encore les limites de l’innovation et de la transformation.
Airborne (automne-hiver 2007)
Plus de 15 600 ampoules LED, des affichages de cristal, des équipements high-tech… Hussein Chalayan devient le maître de la technologie textile. Le créateur explore la résistance à la nature et l’harmonie avec celle-ci à la façon des créatures abyssales.
Readings (printemps-été 2008)
Readings s’interroge sur la notion de rapidité et de modernité. Ornés de cristaux Swarovski, les vêtements sont équipés de deux cents lasers mobiles qui émettent des rayons rouges.
Inertia (printemps-été 2009)
Chalayan évoque la vitesse, comme si le corps devenait le témoin d’un crash violent. La collection présente des mini robes en latex comme figées dans l’espace, avec des motifs de voitures accidentées peintes à la main. Le crash est une métaphore de l’accélération du rythme de vie que l’individu subit.
En 2011, Hussein Chalayan lance Grey Line, une ligne secondaire plus accessible composée de basiques sobres, intemporels et minimalistes déclinés autour de matières simples.
Le designer rejoint la lignée des concepteurs intellectuels tels que Martin Margiela ou Issey Miyake, qui développent un concept philosophique complexe autour du vêtement et du corps.
Vous connaissiez déjà Hussein Chalayan ? Qu’est-ce que vous pensez de son travail ?
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