Afida Turner est une comédienne, chanteuse et personnalité médiatique qui s’est fait connaître en 2002 dans la seconde édition de l’émission Loft Story. Son langage fleuri, ses robes en latex et son franglais ont fait d’elle un OVNI télévisé, qui 20 ans plus tard fait toujours l’actualité.
Invitée de Matthieu Delormeau samedi 5 février, Afida Turner a essuyé les moqueries des hommes de l’émission — et particulièrement de Laurent Fontaine, un mec dont on ne savait pas qu’il existait encore (Bataille, Fontaine, tout ça).
Loin de se laisser démonter, elle a riposté avec la verve qu’on lui connait.
Les médias, depuis, titrent « Afida en roue libre sur TPMP » ou encore « Afida Turner et Laurent Fontaine : explosion en direct sur TPMP ».
Voilà pourquoi ils se gourent de débat.
Afida Turner et Laurent Fontaine : quelle est la source du conflit ?
Afida Turner est actuellement à l’affiche de Requiem pour une conne, au théâtre Trévise, à Paris.
Une pièce dont le titre, largement auto-dérisoire, vient souligner son ton léger, mais aussi et surtout la féroce capacité de son interprète principale, à jouer de son image.
Il faut dire qu’Afida Turner, grande gueule de son état, toujours moulée dans des robes en latex, est une cible facile pour les mauvaises langues, qui n’hésitent jamais à lui jeter leur condescendance au visage.
Ce qui est loin de désarmer la principale concernée, laquelle se défend toujours becs et ongles.
Ainsi, samedi 5 février dernier, lors de l’émission TPMP People (la mouture people de Touche pas à mon poste, présentée par Matthieu Delormeau), Afida Turner a été la risée d’un plateau qui ignorait sa présence en coulisses.
En parangon de lâcheté, Laurent Fontaine, un producteur et animateur de 62 ans qui a fait son beurre d’émissions à la morale peu reluisante sur TF1, a critiqué violemment la comédienne après que Matthieu Delormeau — pour orienter l’avis de ses chroniqueurs et encourager les moqueries du public — a montré une vidéo où Afida se ridiculise au micro de Voltage, il y a des années :
C’est le summum de la vulgarité. Même les fringues sont sales.
Sans même prendre la peine de répondre au débat sur la légitimité ou non de la chanteuse à monter sur scène, préférant attaquer ses attributs physiques et son attitude, Laurent Fontaine, sans grande surprise, fait montre de toute la misogynie gerbante de sa personne et du plateau avec lui.
Le misérabilisme en guise de défense pour Guillaume Frisquet
Guillaume Frisquet, un autre chroniqueur et producteur de télévision, se prend lui aussi les pieds dans le tapis du sexisme en essayant de défendre Afida :
Il y a trop de seins, il y a trop d’huile, il y a trop de cheveux, mais c’est son personnage.
Là encore, au lieu de pénétrer le cœur du débat, le sujet demeure éternellement le physique de la chanteuse. Le même chroniqueur, quelques instants plus tard, croit bon de préciser :
On a fait un sujet ensemble, je la connais depuis très longtemps. Afida a assisté quand elle était enfant à son père qui a tué sa mère sous ses yeux. Elle vient d’une cité pourrie, pauvrissime du nord de la France. Elle voulait réussir à faire quelque chose, à être chose.
Si son intention était d’attirer l’attention sur l’ascension de la jeune femme, il a pour ce faire recours au misérabilisme, dépossédant par la même Afida Turner de sa propre histoire.
La comédienne n’a par ailleurs peut-être pas envie qu’on évoque son drame intime pour justifier son personnage médiatique ?
Ce move, très « vieux bourgeois blanc qui tend la main à une pauvre femme racisée », mérite franchement sa place au fin fond d’une cave, dans le cloaque dégoutant de toutes les mécaniques sexistes dont il n’est plus question qu’elles parasitent la télé.
D’autant plus qu’Afida Turner n’a besoin d’aucun homme pour se défendre.
Elle le prouve en arrivant sur le plateau, sous la fascination des femmes de l’assemblée (qui disent apprécier son personnage) et le mépris des vieux cons.
Mépris auquel Afida Turner répond, comme à son habitude, par des agressivités, traitant même Laurent Fontaine de « petit gros ».
Si ces insultes bas de plafond n’arrangent ni sa cause, ni le niveau de l’émission, Afida Turner soulève par ailleurs un point intéressant…
La condescendance de Fontaine, symptomatique de la misogynie de TPMP
Alors que son détracteur principal lui avoue « Moi, j’ai un malaise quand je te vois, globalement », elle lui rétorque : « Parce que tu es un petit bourgeois et un raciste ».
S’il est difficile d’attester de la véracité de la seconde partie de la phrase avec les seules informations que l’on détient sur l’animateur, il est vrai que Laurent Fontaine coche toutes les cases de l’homme privilégié : blanc, a priori cisgenre et hétéro, soixantenaire et riche.
Pour information, Fontaine est vice-président du groupe audiovisuel Unimédia et dirigeant des sociétés Loribel et Galaxy 7, parallèlement à ses activités de producteur et d’animateur.
Il est alors facile pour lui de mépriser, du haut de sa tour d’ivoire, une femme (qui plus est racisée) qui a dû se faire toute seule, en dépit du peu de cartes qui lui ont été distribuées à la naissance.
Afida Turner revient pour se défendre
Quelques jours après l’émission, devenue virale et enregistrant un score de 900 000 téléspectateurs, Afida Turner a de nouveau été invitée, cette fois-ci par Cyril Hanouna — qui fait ses choux gras de scandales de ce type — dans l’émission TPMP.
Si cette séquence est presque inaudible en raison des hurlements des unes et des autres parties, dont aucune n’est disposée à écouter l’autre, elle a pour mérite de montrer une femme vent debout contre ses oppresseurs.
Afida Turner a commencé par revenir sur les événements passés :
J’ai trouvé ça très dur d’arriver sur un plateau et de me faire humilier. Les femmes se battent depuis 50 ans, on dit pas qu’elle est sale, qu’elle mette une mini-jupe ou un voile.
Nul besoin d’ergoter, la chanteuse a parfaitement su mettre le doigt sur le problème du discours de Laurent Fontaine : la misogynie.
Elle a poursuivi :
Je pensais venir là pour la pièce de théâtre mais c’est toujours les peaux de banane. Il y a un toujours un sabotage quand on vient d’un milieu défavorisé.
Quoi qu’elle fasse, qu’elle remplisse le Trévise grâce à sa seule popularité ou que ses concerts soient sold out, Afida Turner est toujours dénigrée, réduite à son personnage et à son physique.
Un peu plus tard, et pour endosser son rôle, enfiler le masque qu’on lui connait, elle monte sur la table de Laurent Fontaine, lui exposant sa poitrine. L’animateur s’insurge :
Je trouve que tu gagnerais à en faire moins.
Un paternalisme tout à fait classique, conséquence d’un patriarcat bien ancré sur nos terres, et dont les chroniqueurs de TPMP sont les fiers mandataires.
Afida Turner, une personnalité clivante ?
Si ces deux émissions sont à vomir — non pas parce qu’Afida y répand ses insultes mais parce qu’elles démontrent à elles seules tout l’archaïsme dont la France est encore capable en 2022— elles ont fait un tabac.
Rien d’étonnant là-dedans, les clash et autres trivialités humaines faisant les beaux jours du public et des médias Web, qui se sont d’ailleurs empressés de relayer l’affaire, titrant davantage sur la scandaleuse Turner que sur le misogyne Fontaine.
Parce qu’Afida fait cliquer. Parce qu’elle est source de fascination. Parce qu’elle est clivante.
En effet, ses sorties, souvent insultantes, n’épargnent personne ; il lui arrive même d’être problématique, comme sur son compte Instagram où elle est emploie régulièrement des insultes validistes pour répondre à ses détracteurs. Il est vrai également qu’elle clame souvent son amitié amitié avec Jean-MArie Bigard, un homme dont la toxicité et la misogynie ne sont plus à prouver.
Alors oui Afida est parfois problématique. Oui Afida insulte ses ennemis. Mais elle est, qu’on le veuille ou non, une femme qui ose donner le fond de sa pensée, qui ose provoquer le malaise, qui ose clouer le bec aux pourfendeurs des femmes libres.
Et à une heure où la France accuse les sorties sexistes de ses politiques, comme celle de Gérald Darmanin sur BFMTV, il n’est pas question que ce soit elle, la risée de notre monde.
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Les Commentaires
Et je ne part d'aucun principe, étant donné que c'est un fait.
Y a un moment, faut arrêter de leur trouver des excuses, y a vraiment des gens qui vivent de ça et beaucoup sortent de la TVréalité. C'est pas grave en soi, mais à un moment la réalité est là.
Si tu veux un truc sérieux, tu vas pas dans TPMP, à la limite tu vas dans On est pas couché ou Salut les terriens.
Puis j'ai jamais dit qu'elle était stupide par rapport au fait qu'elle soit physiquement comme ceci ou cela ou qu'elle soit habillée d'une telle manière.