Quand j’avais 5 ans, je me souviens avoir entendu parler à la télé d’homosexualité. Je ne connaissais pas ce mot, alors j’ai demandé à ma mère ce que ça voulait dire.
Elle m’a répondu assez simplement que c’était quand deux hommes ou deux femmes s’aimaient.
Jusqu’à ce jour, je crois que je n’avais même pas réalisé que deux personnes de mêmes genre pouvaient former un couple. L’hétérosexualité était si présente autour de moi que j’avais cru que c’était l’unique voie possible.
Cette découverte m’a vraiment plu. À 5 ans, je trouvais les garçons nuls alors me dire que je n’étais pas obligée de finir avec l’un d’entre eux m’a semblé génial !
En plus je me disais que sortir avec une fille, ça voudrait dire un mariage avec 2 robes de mariées ce qui me semblait vraiment trop joli, visuellement parlant.
Au moins 100 niveaux au dessus du costume basique des mecs
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Dans la foulée, j’ai donc tout naturellement annoncé à mes parents que je voulais être homosexuelle.
Ils ont répondu amusés qu’on verrait bien ce que je deviendrai dans quelques années et je pense qu’on a tous rapidement oublié cette anecdote.
Une pré-adolescence marquée par le milieu LGBT
Les années ont donc passé et je ne me suis pas plus posée de questions que ça.
Et puis j’ai commencé à sortir de ma bulle, à écouter des libres antennes à la radio, à traîner sur des forums, rencontrer des gens d’autres milieux. Et là, à 12 ans, j’ai pris durablement conscience que l’hétérosexualité n’était pas le seul choix possible.
En fait, c’est plus que ça. J’ai commencé à développer une fascination pour les personnes non-hétérosexuelles. Je les trouvais trop cool. Notez bien que j’ai utilisé l’expression « trop ». Ce n’était pas sain, ce n’était pas un regard normal, ou bienveillant.
C’était plus que ça.
Je trouvais les personnes LGBT stylées… comme on peut trouver un accessoire à la mode stylé. Alors, moi aussi j’ai voulu faire partie de leur cercle.
Une adolescence dans le flou à réfléchir sur ma bisexualité
Je ne pouvais pas me mentir sur le fait que les mecs m’attiraient. Alors, j’ai décidé de couper la poire en deux, de me dire que je pouvais être « au moins » bisexuelle.
J’ai commencé à me présenter telle quelle auprès de mes ami•es. Je trouvais ça cool. J’étais pas peu fière.
C’est d’ailleurs plus ou moins à cette période que mon frère a fait son coming-out à la famille.
Je me souviens qu’il allait à des réunions d’associations d’aide aux adolescents LGBT. Moi aussi, je rêvais d’y aller, de faire partie de ce groupe qui semblait accepter tout le monde. Comment vous dire : je n’avais pas beaucoup d’ami•es…
Me voilà donc à 13 ans et les hormones en feu à chercher à mettre la main dans la culotte de ma meilleure amie de l’époque. Ce fut un échec. Alors j’ai tenté avec des copines d’un camps de vacances et c’est comme ça que j’ai embrassé ma première meuf.
Le tout en pensant secrètement que la personne que je voulais embrasser, c’était plutôt Rémi, le beau brun du camp.
Le déni de mon hétérosexualité, cette face honteuse de mon adolescence
Mon rôle de bisexuelle était relativement simple à tenir vu qu’entre ce fameux baiser à 13 ans et mes 18 ans, je ne suis sortie avec personne. C’était pas faute de tenter, mais il faut croire que je m’y prenais mal.
Je ne chopais personne, mais même mes meilleurs amis me disaient assez régulièrement quand on parlait de tout ça :
« Mais, en vrai, tu te dis bisexuelle, mais tu préfères les gars, non ? »
Moi, je niais, mais dans les faits, je savais bien que c’était le cas. Je me forçais à regarder des filles, à me dire qu’elles pouvaient être plaisantes, bandantes, pour coller à l’étiquette que je voulais avoir.
Comment j’ai finis par admettre que j’étais hétéro
Et puis voilà que je suis entrée dans les études supérieures, que j’ai commencé à sortir avec un garçon, un deuxième. Et puis là, une fille m’a draguée.
Elle était mimi, elle était cool… Mais ça m’a mis mal à l’aise. Je sentais que je n’étais pas attirée.
Je sentais surtout que ce rôle, cette étiquette de bisexuelle que je m’étais collée dessus ne me correspondait pas.
Que, globalement, je n’avais jamais vraiment été attirée par les filles. Que j’arrivais à les sexualiser, parce que de toute manière j’ai l’impression que la société les sexualise déjà pour moi, mais c’est tout…
D’ailleurs, même cette personne me l’a fait remarquer. Je me souviens qu’elle m’a dit quelque chose comme :
« Nan mais toi t’es totalement hétéro, ça se sent. Mais t’es le genre d’hétéro qu’on peut convertir pour une nuit. »
Nous n’avons finalement jamais couché ensemble et je trouve ça tant mieux. Je trouve l’idée de coucher avec quelqu’un « pour tester » assez dérangeante. Les gens ne sont pas des sextoys qu’on peut utiliser pour vérifier si ça nous plait ou pas !
Je suis hétéro et ce n’est pas grave
Aujourd’hui, je me dis hétéro. Aucun•e de mes ami•es n’a vraiment été surpris par cette nouvelle.
Jusque là, je ne suis jamais tombée amoureuse de femmes. Je ne suis pas non plus attirées par elles. Peut-être que ça changera un jour, mais d’ici là, je trouve ça con de me mentir et de mentir aux autres.
Au delà de con, je trouve que ça décrédibilise totalement la cause des personnes vraiment LGBTQ. Être lesbienne, gay, bi, trans, queer ou autre, ce n’est pas une mode, pas un truc stylé de it-girl.
C’est une réalité.
En voulant moi aussi faire partie de la cause, je l’ai desservie.
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