La Daronne est la reine des conseils pas si cons enrobés dans une grosse dose d’humour plus ou moins subtil. La voici de retour pour voler au secours d’une lectrice !
La question pour la Daronne
Hello hello petite daronne de l’amour,
Je t’écris parce que j’aurais bien besoin de tes conseils avisés sur une situation qui commence à me courir un peu sur le coco.
Voilà, je suis maman de deux filles, une de 4 ans et l’autre de 4 mois et j’allaite la dernière après avoir allaité la première pendant 3 ans. Pour notre première, mon mec me soutenait à peu près. Disons qu’il ne m’a jamais fait de remarques parce qu’il voyait que ça me tenait à cœur, même s’il vient d’un milieu où allaiter son enfant est clairement un non-sens. Mais pour notre deuxième, c’est une autre histoire. En gros, l’allaitement le saoule : j’y passe trop de temps, on doit attendre que ma fille ait fini pour partir de la maison ou reprendre la voiture, etc. Du coup, il veut qu’on passe aux biberons pour qu’elle ait plus un rythme. Ça le gêne aussi que j’allaite devant sa famille.
De mon côté, il n’est pas encore né celui qui me fera renoncer à ces moments partagés avec ma fille et à tous les bienfaits que ça lui apporte en termes de santé. J’ai bien conscience de n’avoir pas beaucoup de temps à consacrer à mon conjoint en ce moment (et je pense qu’il est là le nœud du problème parce qu’il se sent délaissé) mais je suis en plein post-partum et je n’ai pas envie de rendre de comptes.
I need your help
Lulu
La réponse de la Daronne
Hello, hello, hello, ma petite Mamoune de l’amour,
Dans un monde où je serais la cheffe suprême de l’humanité, ma réponse serait aussi lapidaire, que magnanime : Ton mec n’a qu’à aller se faire voir chez les Grecs, basta tutti ! Adios Bichachos !
Ce monde serait égalitaire et libre, car je serais une cheffe du monde à qui le pouvoir ne monterait pas à la tête (mais bien sûr). Chacun pourrait agir à sa guise, tant qu’il ne fait de mal à personne (ce qui est ton cas).
Je condamnerais tous les importuns à des stages qui leur enseigneraient des moyens simples et efficaces pour s’occuper exclusivement de leurs fesses. Cela ne concernait pas ton mec, puisque dans ce monde idéal, les hommes seraient déconstruits à la naissance et verraient donc l’allaitement pour ce qu’il est : une façon cool de nourrir son enfant.
Comme tu as dû t’en rendre compte, aujourd’hui, le monde n’est pas dirigé par une bonne vieille Daronne, oh ça non. Et dans notre vraie société, le corps des femmes appartient aux hommes adultes. C’est donc normal que ces derniers se sentent autorisés à émettre un avis sur la question.
Sans être misandre, je peux même concevoir que l’allaitement au sein maternel ne soit pas toujours évident pour les coparents. Ce que j’ai en revanche plus de mal à comprendre, c’est pourquoi ces papas envisagent toujours l’arrêt définitif en premier. Ils pourraient se creuser la tête et proposer des compromis au lieu de sacrifier le souhait de leur compagne sur l’autel de leur confort et de leur égo.
Dépassionnons l’allaitement
Je vous jure les gens, la question de l’allaitement est ennuyeuse au possible. Vous n’êtes même pas tenu d’avoir un avis. On se bagarre pour un truc qui concerne exclusivement six mois et qui ne couvre souvent qu’une année ou deux d’une enfance, qui elle dure en moyenne jusqu’au trépas des darons.
Il faut dépassionner ce débat. Comme tout le reste, l’allaitement possède des avantages et des inconvénients pour les co-parents. Pour certaines mères, l’allaitement au sein permet de nouer un lien fusionnel avec leur bébé, et l’autre parent peut nourrir un sentiment d’exclusion, parfois avéré. Mais, si ce coparent avait quatre mois, et qu’il avait à sa disposition une outre à lait chaud, il ne se dirigerait pas spontanément vers le puits aride de la maison. Ce n’est pas agréable d’être comparé à un puits aride, j’en conviens.
Ceci dit, ne donnons pas aux choses l’importance qu’elles n’ont pas. Un bébé de quatre mois qui veut retrouver sa mère ne se dit pas : Oh non ! Voici encore mon père ! Quand va-t-il enfin comprendre que je le hais et le haïrai toujours ? Mais plutôt : Mais ce n’est pas lui qui a mon manger. Il est où le manger ? Je fais quoi moi, si je n’ai pas le manger ? Je veux mon manger pas loin ! Au cas où !
Je comprends aussi que les contraintes logistiques l’agacent. Néanmoins, les exemples que tu me donnes ne sont pas propres à l’allaitement. Si l’enfant buvait son biberon, il ne lui arracherait pas des mains pour pouvoir partir et à quatre mois, je doute que la chérubine soit en mesure de tenir ledit bib’ dans son maxi cosy. Il sous-entend peut-être que vous parviendriez à mieux la rythmer, même si c’est une possibilité, la diversification vous ouvre les portes et avec elle, une réalisation universelle : les enfants ne mangent pas à heure fixe, et quand ils ont faim, il faut les nourrir.
La temporalité d’un allaitement exclusif est suffisamment courte pour que cette « distance » n’affecte pas la suite d’une relation qui devrait durer toute la vie. Tu as parfaitement raison de vivre ce post-partum à ton rythme et de ne pas te mettre la pression à ce sujet.
Au lieu de râler et d’invoquer des excuses bidons, car personne ne fait attention à lui, ton compagnon peut commencer par se positionner avec un accompagnant bienveillant. Dans les mois qui arrivent, il va pouvoir investir de plus en plus de pans de la vie de sa fille qui grandit. Il te retrouvera aussi, reconnaissante d’avoir pu mener ce projet qui te tenait à cœur. Ça vaut le coup de prendre son mal en patience.
Continuer sans chercher à convaincre qui que ce soit
Discutez de vos états respectifs, le post-partum est si dur qu’on oublie parfois qu’il ne dure pas toute la vie.
Rien ne force ton homme à s’inscrire à la Leche League. Il a même le droit de penser ce qu’il veut sur le sujet, tant qu’il a la décence de garder son avis pour lui. Laisser tomber des chevaux de bataille pour rendre l’autre heureux, c’est aussi parfaitement acceptable. Surtout quand il s’agit d’un cheval très anecdotique et temporaire et que l’inconfort assimilé n’a pas vocation à s’installer.
En retour, vous pouvez convenir d’un accord concernant sa famille. Je sais #allaiterpartouttoutletemps, mais #vraievie aussi et #vraievie exige souvent que l’on paye de réflexions éternelles, 10 minutes de nichon. Ça ne vaut pas le coup. Comme je l’ai dit plus haut, cessons de dramatiser ce débat et allaitons heureux.
Je te laisse, je dois trier mes fringues d’allaitement avant de les donner à la ressourcerie.
La bisette,
Ta Daronne
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