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Daronne

Help, je pars en vacances avec des potes qui sont fauchés (mais pas moi) !

La Daronne répond à vos questions en essayant de ne pas être trop à côté de la plaque.

La Daronne est la reine des conseils pas si cons enrobés dans une grosse dose d’humour plus ou moins subtil. La voici de retour pour voler au secours d’une lectrice !

La question pour la Daronne

Chère Daronne,

Nous avons prévu des vacances à la mer avec une amie et sa sœur encore étudiante. Quand nous avons réservé le transport et le logement, mon amie gagnait bien sa vie, mais elle a récemment démissionné et ne retravaillera qu’à la rentrée.

Entre temps, la sœur de mon amie a également invité deux amis étudiants comme elle. Cela ne me dérange pas, plus on est de fous, plus on rit, à un détail prêt : je me retrouve à partir avec quatre personnes fauchées, qui m’ont prévenu qu’elles n’auraient pas les moyens pour se payer des extras, voire des sorties.

Je ne suis pas matérialiste, mais je travaille toute l’année et en vacances, j’ai envie de me faire plaisir. Je dois dire que je ne suis pas enchantée de devoir me restreindre, alors que je n’en ai pas besoin, à cause des autres. Que me conseilles-tu ?

Merci,

Une lectrice pas matérialiste (juré)

À lire aussi : Help, j’en ai marre de payer pour les enfants de mes potes en vacances

La réponse de la Daronne

Mon petit calamar,

Ta question ravive des souvenirs douloureux. Je me souviens de mes années collège et de mes habits non siglés qui m’avaient valu d’être exclue de ma bande de primaire. 

Pourtant, j’avais supplié mes parents de m’offrir des baskets à 500 francs (car je suis vieille), leur expliquant que ma vie sociale en dépendait. Ces monstres avaient refusé, sous prétexte que  « Tu changes de pointure tous les six mois, du gâchis, blablabla ». Ils avaient raison, évidemment, mais ma vie sociale en avait tout de même pris un sacré coup.

Cette première expérience de classe m’a amené à traîner avec des gens dont les parents pensaient comme les miens. On était habillés à la mode, mais pas trop cher. Et nous n’adressions pas non plus la parole à ceux qui n’avaient même pas ce privilège. Oui, c’est ça, une belle chaîne de classisme.

Cette expérience revient me hanter dès que je croise la route d’une Casio Baby G et d’une paire de New Balance, mais c’est un souvenir formateur aussi : qu’on le veuille ou non, ces critères matériels futiles sont souvent déterminants dans la construction d’un groupe. Bien sûr que ça me fait mal à la tronche ! Mais ce n’est pas parce que ça me fait mal à la tronche que ce n’est pas vrai pour autant, malheureusement pour ma névralgie faciale.

L’argent, c’est important

Je crois que j’ai rarement produit de sous-titre plus percutant. Revenons-en à nos biftons (qui rime aussi avec mouton, au cas où tu ne l’aurais pas remarqué). J’aurais tant voulu répondre à ce courrier avec dédain. Tu sais, le dédain de ceux qui rétorquent « je ne regarde pas la télévision, je préfère lire » quand tu leur demandes quelle est leur série préférée.

Mais comme toi, je vis sur cette planète capitaliste et consumériste. Je veux croire que le bonheur est gratuit et que la minuscule plage municipale bondée de ta station balnéaire est bien plus agréable à fréquenter que le beach club privé, situé 100 mètres plus loin. Mais on sait toutes les deux que ce n’est pas le cas.

Entre une partie de Tetris humain sur une plage bondée, et un transat confortable et respectueux de la notion d’espace vital, tout le monde choisirait l’option transat. Même si tout le monde ne peut pas se le permettre.

L’existence telle que nous la connaissons répond à un principe d’options premium. Le package petit budget ne comprend que des fonctionnalités basiques volontairement limitées pour inciter leurs abonnés à upgrader leur plan. Notre société consumériste nous a conditionnés à rechercher l’opulence, le luxe, les plaisirs futiles. Ou a simplement monétisé tous les plaisirs, même les plus simples, qui sait. Quoi qu’il en soit, ta crainte est légitime. Néanmoins, rien ne t’empêche de foutre un coup de pied dans ces codes poussiéreux, et de kiffer votre semaine avec un budget limité.

Définir ses priorités

Permets-moi de te rappeler que contrairement à ce que tu sembles penser, votre projet de base n’a pas changé d’un iota. Vous vouliez partir en vacances entre amis, et vous partez en vacances entre amis. Je pourrais être mesquine et te demander ce qui compte le plus pour toi : dépenser tes sous dans des cocktails trop sucrés et des activités touristiques décevantes ou passer du temps avec ses amis ? Tiens d’ailleurs, watch me le faire.

Si tu as vraiment envie de passer à l’option vacances premium, personne ne t’en empêche. Au lieu d’envisager tes achats en solitaires, pourquoi ne pas mettre tes privilèges au service de la communauté ? Avec cette phrase alambiquée, je te suggère d’investir tes deniers dans le pimpage du stock de pâtes et de riz, afin de vous cuisiner de magnifiques gueuletons maison. Ces repas ne remplaceront pas le bar à fruit de mer du port et ses trois crevettes à 50 euros qui vous fileront une tourista à faire mourir de jalousie un flacon de polonium, mais c’est mieux que rien.

Et si, vraiment, tu tiens à manger des aliments dont la chaîne du froid a été rompue une trentaine de fois, invite ta troupe ! Je viens de ressortir ma calculette et cette dernière m’indique qu’il revient au même de payer un dîner pour une personne tous les jours, que de payer pour quatre, deux fois.

Même principe pour les activités, si tu le peux, rien ne t’empêche de sélectionner l’activité qui te chauffe le plus et d’y convier tes amis. Pour le reste, laisse-toi porter. Une fois débarrassée des considérations bassement matérielles de la vie, tu pourrais réaliser qu’on passe aussi d’excellents moments sans dilapider trop de pognon.

Vacances rime parfois avec indépendance

En vérité, grâce l’inventeur de ces mots, vacances rime toujours avec indépendance.

Ce qui signifie que rien ne t’empêche de t’éclipser et de prendre un peu de temps pour toi, en solitaire. Personnellement, le vide abyssal de mon compte en banque n’est pas corrélé à ma tolérance sociale. Fauchée ou pas, lors de séjours entre amis, je vais nécessairement prendre congé pour m’offrir un isolement régénérant. Personne ne m’en a jamais tenu rigueur. Tant que tu ne justifies pas ton absence d’un : « Je veux dépenser mon flouze, bande de miséreux ! » et que tu évoques simplement un besoin ponctuel de solitude, je pense que tu peux te permettre de passer quelques heures en tête-à-tête avec ton portefeuille.

Cette mésaventure (en est-ce vraiment une ?) t’offre en vérité une opportunité de rêve pour réfléchir à tes valeurs et revoir tes priorités. Derrière un détail d’apparence anecdotique, tu pourrais bien trouver le sens que tu veux donner à ta vie. Seras-tu de celles qui ne veulent traîner qu’avec des nantis ? Ou de celles qui sur le terme dépenser ensemble s’attardent avant tout sur le mot ensemble ? Réponse à la fin de l’été ! Tiens-moi au courant !

Je te laisse, je vais acheter de l’huile de tournesol pour assaisonner mes pâtes.

La bisette,

Ta Daronne


Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.

Les Commentaires

8
Avatar de hellopapimequepasa
3 août 2023 à 15h08
hellopapimequepasa
"je veux dépenser mon flouze bande de miséreux" décidément les articles de la daronne me ferons toujours autant rire
0
Voir les 8 commentaires

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