La Daronne revient, armée de son humour tranchant et de ses conseils avisés, pour répondre à une lectrice en détresse. Cette fois-ci, elle s’attaque à un sujet brûlant : les vacances en famille. Entre les cris des enfants, les nuits agitées et les caprices en public, notre lectrice Sam redoute ces moments censés être idylliques. La Daronne, fidèle à elle-même, dédramatise la situation et offre une perspective rafraîchissante sur les réalités des vacances familiales. Préparez-vous à rire et à réfléchir, car ses conseils ne manqueront pas de faire mouche.
La question pour la Daronne
Chère Daronne,
Cette année, comme tous les ans, nous allons partir pour deux semaines de vacances en famille, avec mon mec et nos deux enfants de deux et quatre ans. J’ai honte, mais je n’en ai aucune envie. J’imagine déjà les cris, les nuits pourries, les caprices au resto, les trucs à trimballer, les enfants qui râlent dans les beaux endroits… Je me sens horrible, et en même temps, je n’arrive pas du tout à me réjouir et à force, je commence même à avoir le cafard,
Help
Sam
La réponse de la Daronne
Mon petit macaron,
Assez avec ces autoflagellations ! Il faut que la honte change de camp.
Bon, dans ce cas très précis, je ne sais pas de quel camp il s’agit, puisque face à toi, il y a des enfants qui :
- 1 : sont des enfants et n’ont donc par définition honte de rien
- 2 : n’ont rien demandé à personne.
Néanmoins, et quoi qu’il arrive, la culpabilité doit te lâcher la grappe. Et nous la lâcher à toutes, pendant qu’on y est.
Es-tu vraiment une mère horrible ?
Si un jour, au sein même de cette rubrique, une lectrice me contactait pour se plaindre de la personne avec qui elle vit, car il ou elle la réveille plusieurs fois par nuit pour qu’elle lui serve à boire, que cette personne, sous prétexte qu’ils sont proches, lui taxait systématiquement tous ses desserts et autres petits chocolats servis avec le café, que cette personne ne respectait pas son consentement, mais qu’en plus de ça il ou elle ne faisait strictement rien à la maison… Trouverais-tu cette lectrice horrible parce qu’elle ose exprimer son ras-le-bol ? Trouverais-tu étrange que l’idée de passer une semaine enfermée dans une résidence de vacances avec cette personne lui paraisse insupportable ? Non, tu lui conseillerais de se barrer le plus vite possible. Et tu aurais raison.
Dans ta situation, il n’y a pas une personne de ce genre, mais deux, qui vivent sous ton toit. Bien sûr que non, on ne peut pas comparer un enfant avec un adulte abusif. Mais va expliquer la différence à un cerveau archaïque, programmé pour redouter les agressions et s’en protéger. Ce n’est pas ta faute, c’est celle de ton instinct de survie.
Évidemment, j’ai envie de te rassurer. Mais on sait toi et moi que tes craintes sont parfaitement fondées. Oui, tu seras levée à l’aube tous les matins. Oui, tu maudiras ces adultes assis tranquillement à la terrasse des restaurants. Oui, tu seras obligée de te trimballer avec ton camion de déménagement. Et en prime, tes affaires estivales préférées seront tachées d’huile de beignet, et les tâches ne partiront jamais. Tel est ton destin.
S’autoriser à ressentir ce qu’on ressent et se foutre la paix
Le tableau dressé dans le paragraphe précédent n’a rien de reluisant, et crois-moi, ce que je m’apprête à te dire non plus.
D’expérience, je sais que ce qui gâche des vacances, ce ne sont pas les marmots, ce sont nos espoirs et nos tentatives de luttes désespérées pour éviter l’inévitable.
Nous, parents, devons cesser de croire qu’il existe des solutions miracles, pour que nos petits enfants ne se comportent plus comme des petits enfants. Et nous devons cesser de croire que sous prétexte que ce sont nos enfants, et que nous les aimons à la folie, nous n’avons pas le droit de les maudire aussi par moment.
Alors, ne te fais pas de mal pour rien, au risque d’en vouloir encore plus à tes enfants, lorsqu’ils ne sont pas responsables d’avoir l’âge qu’ils ont. Ne prévois pas de restaurant en priant pour que, sur un malentendu, ils se transforment en statues. N’organise pas de circuit touristique en espérant que tes petits se passionnent subitement pour les ruines médiévales. Ne décale pas leur coucher de deux heures pour boire l’apéro jusqu’à minuit passé en comptant sur une grasse matinée. Ça n’arrivera pas, tu seras dégoûtée et tu conserveras un très mauvais souvenir d’un endroit dont tu aurais pu profiter autrement, ou plus tard, quand ils seront plus grands.
Le meilleur moyen de profiter sereinement de vacances avec de petits enfants, c’est de se souvenir qu’on part en vacances avec des petits enfants. Accepte que ce séjour ne soit pas celui dont tu as rêvé et ne te fais pas de mal en prévoyant des choses qui ne peuvent pas bien se passer et qui ne feront que nourrir ton amertume.
Adaptons-nous aux enfants pendant les vacances (si, si je te jure)
Je conseille à tous les parents du monde de faire leur deuil une bonne fois pour toutes de leurs vacances d’avant, et d’arrêter de remettre chaque année le sujet sur le tapis. Momentanément du moins. Dans quelques années, nos mouflets préféreront s’amputer d’un orteil que de partir avec nous.
Mais, non, je ne sous-entends pas qu’ils nous manqueront et qu’on les regrettera. Non, nous serons ravis de pouvoir de nouveau profiter d’une offre culturelle de qualité et de reboire bien trop de bien trop bon vin. Mais aujourd’hui, nous en sommes là.
En attendant, au lieu de vivre à travers ce futur prometteur, mais lointain, adoptez un rythme et un mode de vie estival compatible avec celui de vos enfants. Ne bousculez pas (trop) les heures de sieste et de coucher, prévoyez des sorties qui ne durent pas longtemps. Privilégiez des ballades sur des chemins où ils pourront patouiller des graviers et se tremper le popotin. Laissez-les s’habiller comme ils en ont envie, déguisés ou en pyjama, quelle importance. Remplissez vos placards de leurs aliments préférés, ils mangeront correctement à votre retour. Et vous les parents, imitez-les. Tranquille, sans pression. Et pendant qu’on y est, embarquez un baby phone pour les laisser dormir peinards durant que vous irez — enfin— dîner en tête-à-tête au snackbar d’en bas, le seul qui capte la fréquence de votre talkiewalkie premier âge.
À ce stade de ma réponse, des torrents de larmes inondent ton clavier. Pourtant, crois-moi, beaucoup de parents reviennent très agréablement surpris de ce genre de vacances à hauteur de mômes. Reboostés même. Parfois, ça fait un bien fou de passer du temps ensemble, sans la moindre pression ni la moindre attente. Et en admettant que même cette nouvelle approche ne sauve pas tes vacances, n’oublie pas : on a le droit de passer de mauvaises vacances avec ses enfants. À la fin de leur longue carrière, tous les parents en seront passés par là au moins une fois.
Avant de finir ce courrier, je voudrais enfin me permettre de te rappeler qu’aucune loi n’empêche les parents de partir en vacances sans leurs enfants. Si vous ne disposez pas de relai qui vous permet de partir en couple (ou de refiler la marmaille pendant que vous bullez chez vous), vous pouvez alterner, et prévoir un séjour en solo chacun votre tour à la rentrée.
Je te laisse, je dois aller racheter des cookies pour le dîner
La bisette,
Ta Daronne
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
Et effectivement, c'est tres enfant dependant. Et aussi un peu parent dependant. On adore la marche, donc forcément on essaye de le pousser... Alors qu'on ne fait jamaiq de vélo et qu on n'en a même pas.
Du coup, maintenant que mon fils sait rouler a vélo mais pas encore trop vite, je fais des run & bike avec lui (je cours après lui en vélo )