Publié le 30 octobre 2018
Le harcèlement sexuel au travail, j’en avais une vision très caricaturale. Je m’imaginais un vieux patron libidineux fantasmant sur une employée plantureuse, qui joue elle-même de son pouvoir de séduction.
Mais ça, c’est le cliché des mauvais films, ou de ceux qui ont mal vieilli.
À quoi ressemble le harcèlement sexuel au travail ?
Dans la vraie vie, le harcèlement sexuel au travail est beaucoup plus insidieux que ça. C’est une gêne qui progresse en malaise, et l’escalade toxique peut se poursuivre longtemps, tout pourrir comme la gangrène.
C’est plutôt ça, la réalité du harcèlement sexuel au travail, lorsqu’il n’est pas combattu, traité, puni : une gangrène.
L’action post #MeToo, contre le harcèlement sexuel au travail
Octobre 2017, l’Affaire Weinstein bouleverse les Unes, et je m’attendais presque à ce que les eaux troubles du scandale se calment au bout de quelques semaines.
C’était sans prendre en compte le fantastique élan qu’allait devenir #MeToo, la vague de témoignages qui donné à ce mouvement une véritable puissance.
Il ne fallait pas que ce mouvement reste en paroles : les mots ne changent pas le monde, ils touchent les consciences.
Où sont-ils, les acteurs du changement ? En politique bien sûr, mais pas seulement, sinon ce serait long et laborieux de changer le monde… Non, les acteurs et actrices du changement sont un peu partout. Et j’en ai rencontrés deux un matin de juillet 2018.
Pauline Verduzier et Guillaume Clere sont venus me présenter un projet de formation à destination des entreprises, pour permettre de sensibiliser et lutter contre le harcèlement sexuel au travail.
La nécessité de former pour lutter contre le harcèlement sexuel
Des témoignages de harcèlement sexuel au travail, j’en ai lu, entendu à ne plus pouvoir les compter. Nous-mêmes, sur madmoiZelle, en avons publié en quantité vertigineuse.
Et oui, ça fout le vertige de se dire qu’autant de femmes jeunes ont DÉJÀ autant d’histoires de harcèlement sexuel à raconter, et qu’elles sont aussi violentes.
France 2 avait fait un excellent dossier très pédagogique, diffusé — hasard complet du calendrier, quelques jours à peine après l’affaire Weinstein.
- Le harcèlement sexuel au travail est bel et bien l’affaire de tous
- Guillaume Meurice fait le point sur le harcèlement sexuel au travail, en France, en 2017
On pouvait à la fois mesurer l’ampleur de ces phénomènes de harcèlement, mais également, et c’était tout aussi préoccupant : la méconnaissance, la mauvaise compréhension de ces phénomènes par les gens.
Hommes et femmes confondues, pour le coup.
C’est difficile de faire comprendre un vécu : difficile de l’expliquer quand on est la personne qui l’a vécu, difficile de le comprendre quand on reçoit le témoignage.
C’est pourtant, je pense, une étape essentielle à la compréhension par l’empathie : réussir à se mettre à la place de l’autre, pour ne plus être aveugle à sa réalité.
Et c’est précisément ce que réussit La Traque, à travers son concept : réaliser des films de sensibilisation en réalité virtuelle, pour aider à faire prendre conscience de ce que ça fait que de se retrouver dans une situation oppressante.
La réalité virtuelle au service de la lutte contre le harcèlement sexuel
J’ai travaillé dans un grand groupe industriel et cette expérience a été compliquée à certains égards, j’en ai témoigné sur madmoiZelle en racontant mon burn out.
Lorsque je me suis retrouvée avec le casque de réalité virtuelle sur les yeux, j’ai été plongée dans une expérience de vie de bureau somme toute ordinaire.
Et c’est flippant de sentir à quel point ton langage corporel évolue très rapidement vers des mécanismes de défense.
Sans m’en rendre compte, au bout de quelques minutes, je n’étais plus assise droite sur ma chaise : j’avais croisé les jambes, mais surtout voûté mes épaules, croisés mes bras sur ma poitrine, je parlais de ¾ au collègue qui me parlait de trop près dans le film…
J’aurais toutes les peines du monde à décrire « un comportement inapproprié », mais je n’ai jamais confondu un compliment avec une insulte, une tentative d’approche avec une insistance déplacée.
Et c’est ce qui s’annonce brillant avec ce projet en réalité virtuelle : se mettre à la place de l’autre, faire ressentir plutôt qu’essayer de convaincre.
À lire aussi : Qu’est-ce que le « harcèlement sexuel d’ambiance » au travail ?
Cette expérience m’a d’ailleurs rappelé le test de sensibilisation de la sécurité routière : on te fout des lunettes qui reproduisent le champ de vision après 3-4 verres, et on te lance une balle de tennis.
Et on te filme, pour que tu puisses bien te rendre compte d’à quel point tes réflexes moteurs ne te servent à rien si ta vision n’est plus nette.
La Traque, c’est un peu le même principe : changer de perspective pour pouvoir ouvrir les yeux.
La Traque a besoin de votre soutien
La mauvaise nouvelle de toute cette histoire, est que ce projet n’est pour le moment pas financé : ses créateurs font appel au crowdfunding pour pouvoir se lancer, et s’ils n’atteignent pas leur objectif, ça risque d’être compliqué.
Deux façons d’aider directement ce projet à voir le jour :
- Contribuer au crowdfunding de La Traque sur KissKissBankBank
- Le partager, partager cet article aux personnes susceptibles d’être intéressées par le projet !
Si tu regardes la vidéo de présentation du projet, tu auras peut-être remarqué la présence du logo de madmoiZelle : c’est parce que je soutiens cette initiative, je suis convaincue qu’elle va dans le bon sens et j’espère sincèrement que La Traque verra le jour !
Plus d’infos sur La Traque
Les expériences de réalité virtuelle seront basées sur des histoires vraies : c’est Pauline Verduzier, journaliste sexo — invitée de Sois Gentille, dis merci, fais un bisou !, qui est en charge du scénario des films.
Il s’agit donc de mettre en scène des situations de fiction mais basées sur des faits bien réels, tirés de témoignages reçus et travaillés par Pauline :
« Aucun détail ne sera inventé pour les besoins de la fiction.
Personne ne doit pouvoir contester la véracité des histoires que nous allons partager. »
Rendez-vous sur KissKissBankBank pour en savoir plus !
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