Article publié initialement en octobre 2019
Les souvenirs que j’ai du collège sont chaotiques. Lorsque j’étais en 5ème, une de mes camarades de classe a trouvé drôle de casser toutes mes affaires et de me menacer de me faire la vie dure si je ne lui obéissais pas. À cette époque, mon grand-père devait subir une lourde opération, et cette fille me répétait tous les jours qu’il allait mourir.
Heureusement, l’équipe pédagogique a réagi rapidement et cette élève s’est vite calmée. Ce répit m’a fait du bien, même si le harcèlement a repris un peu plus tard, lors de mon entrée en 4ème.
« Tu sais que t’es conne ? »
Tout au long de l’année, j’ai subi des insultes et des humiliations publiques par un petit groupe de garçons. Toute la journée, j’avais droit à des « t’es moche », « va te suicider », « tu sais que t’es conne ? », parfois même devant des profs mais ils ne disaient rien.
Lorsque je suis rentrée en 3ème, un groupe de fille s’en est mêlé. Elles étaient 4 contre moi, elles me menaçaient et me poursuivaient dans les couloirs en me traitant de « mongole ».
Une fois de plus, les professeurs n’ont pas réagi. Je me souviens d’un jour où je suis arrivée en larmes en cours de biologie, avec 20 minutes de retard. Le prof m’a regardé brièvement et il est retourné à son cours, comme si de rien n’était. J’ai beaucoup souffert cette année-là et j’ai voulu mettre fin à mes jours. Ça semblait la seule solution pour que ça s’arrête. Heureusement, je n’ai rien fait.
Du harcèlement scolaire à la peur de l’autre
À la fin de ce calvaire, le collège enfin terminé, j’ai commencé à développer une sorte de peur de l’autre. J’ai pris l’habitude de me faire tellement discrète qu’on m’oubliait. Les gens me faisaient tellement peur que je n’osais parler à personne. C’es donc assez naturellement que je suis devenue la « fille bizarre » au lycée, celle qui reste dans son coin et qui ne parle que lorsqu’on lui pose une question.
Au niveau de ma vie sentimentale, je n’osais pas aller vers les garçons qui me plaisaient. J’avais trop peur qu’ils m’insultent et puis, de toute façon, j’étais tellement moche que personne ne pouvait s’intéresser à moi…
Bah oui, si pendant toutes ces années j’avais entendu que j’étais moche, que j’avais une « bonne tête de cul », c’est quand même que c’était vrai, non ? J’avais fini par croire tout ce que mes harceleurs m’avaient balancé au collège.
Pendant mes études supérieures, j’ai fait quelques efforts pour m’intégrer, mais toujours avec cette peur latente du regard et du jugement des autres.
Une psychothérapie salvatrice après 15 ans de colère
J’ai entamé une psychothérapie à la fin de mes études, il y a 3 ans. La route a été longue, difficile, et la simple évocation de ce harcèlement scolaire suffisait à déclencher un torrent de larmes. Pendant longtemps, je me suis dit que je ne pardonnerais jamais, ou uniquement si les harceleurs venaient eux-mêmes me demander pardon.
Et puis j’ai réalisé beaucoup de choses : ça faisait 15 ans que c’était arrivé et ça faisait 15 ans que je vivais constamment dans la colère. Celle de ne pas avoir été écoutée ni entendue, celle ressentie parce que mes harceleurs restaient impunis et surtout parce que tout cela avait eu lieu dans l’indifférence la plus totale.
Mon corps avait somatisé (je souffrais de problèmes de peau à répétition) et je me bouffais la santé. J’ai donc fini par me rendre à l’évidence : leurs excuses n’arriveraient jamais, alors plutôt que d’attendre ce jour hypothétique, j’ai décidé de pardonner. Pour mon propre bien.
Après le harcèlement scolaire, pardonner pour mon propre bien
Oui, moi aussi ça me fait très bizarre de le dire, mais je leur pardonne. Ça ne veut pas dire que j’excuse, que j’oublie. Ça veut simplement dire que ce qui est fait est fait et qu’il est temps de passer à autre chose. Leur en vouloir toute ma vie ne changera rien. En pardonnant, j’ai enfin mis mon passé derrière moi et j’ai décidé de vivre au présent.
Je ne suis plus cette ado stigmatisée qui part pleurer aux toilettes parce qu’on a mis de la colle extra-forte dans son cartable… Je suis une femme de 27 ans, j’ai une vie à mener, des projets à mettre en place, et personne ne m’en empêchera. Je me sens libérée et j’ai décidé de ne plus laisser le passé gâcher mon présent.
J’envoie du courage et de la force à toutes les personnes qui ont connu le harcèlement scolaire, ou même qui le vivent aujourd’hui. Souvenez-vous de ça : « On peut trouver le bonheur même dans les moments les plus sombres… Il suffit de se souvenir d’allumer la lumière ».
Courage, accrochez-vous. Vous n’êtes pas seuls, même si vous le pensez, et votre meilleure réponse au harcèlement sera d’être heureuse ou heureux.
Et toi, as-tu été victime de harcèlement scolaire et, si c’est le cas, as-tu fini par pardonner ?
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