Parler d’argent, en France, c’est encore tabou. Pourtant, c’est un sujet passionnant… et féministe, par certains aspects ! Dans Règlement de comptes, des personnes en tout genre épluchent leur budget, nous parlent de leur organisation financière en couple ou en solo, et de leur rapport à l’argent. Aujourd’hui, c’est Gwen* qui a accepté de décortiquer ses comptes pour nous.
- Prénom : Gwen*
- Âge : 30 ans
- Profession : Graphiste/Cheffe de projet indépendante
- Salaire net avant prélèvement à la source : 2 700 € en moyenne
- Personnes (ou animaux) qui vivent sous le même toit : son conjoint et un chat (que dis-je, un lion)
- Lieu de vie : Florange (près de Metz, en Lorraine)
La situation et les revenus de Gwen
Gwen a une double casquette : elle est graphiste indépendante depuis 5 ans, ainsi que cheffe de projet (indépendante également) depuis un peu plus d’un temps.
« J’ai été un temps rédactrice web, mais il a fallu que je fasse des choix par manque de temps. »
Pacsée, elle réside avec son compagnon Olivier* à Florange (Lorraine), une ville qu’elle affectionne particulièrement, dans un appartement situé en centre-ville.
« La situation est assez idéale étant donné qu’on est proche du Luxembourg et des autres pays frontaliers, de Metz et même de Strasbourg si on pousse un peu. L’appartement est, quant à lui, proche de toutes commodités, à pied ou en trottinette électrique ! »
Ils sont propriétaires depuis mars 2023.
« Nous étions auparavant locataires. Je suis déjà passée par la case propriétaire en 2020 avec mon ancien conjoint. Comme quoi, être indépendante n’empêche pas d’obtenir un prêt immobilier ! Et pour ça, pas besoin de faire appel à une banque spécialisée, je suis dans l’une des grandes banques nationales. »
Pour ses missions en tant que graphiste et cheffe de projet indépendante, Gwen touche chaque mois un salaire variable. Lissé sur l’année, elle l’estime à 2 700 € net environ, et elle ne s’en plaint pas.
« J’estime être vraiment bien payée. J’ai la chance de pouvoir vivre très confortablement en étant indépendante, je sais que cette situation peut être difficile. En plus, j’ai la chance de pouvoir aujourd’hui choisir mes clients, refuser des projets, etc… J’ai un client principal pour qui je travaille beaucoup, et des à-côtés réguliers. Néanmoins, cela ne m’empêche pas de démarcher de nouvelles expériences ! C’est un métier fragile, alors il faut toujours assurer ses arrières, comme avec l’argent. »
De son côté, Olivier, le conjoint de Gwen, est coordinateur dans une trailer house (musiques des trailers de cinéma) à Luxembourg et gagne 2 050 € par mois. « Cela apporte donc un complément très conséquent à notre budget commun. »
Le rapport à l’argent de Gwen et son organisation financière
Gwen a grandi dans une famille « aisée », qu’elle définit comme « trop pauvre pour être riche, trop riche pour être pauvre ».
« Mon papa était marin, ma maman a fait plein de boulots différents car elle n’a jamais voulu être définie comme une femme de militaire. C’est aussi ce courage et cette force qui m’inspirent et me prouvent qu’on n’a rien sans rien, que si l’on veut, on peut. La chance, l’opportunité, ça se déclenche, parfois ! »
Elle a conservé de cette éducation financièrement rigoureuse un « assez bon rapport à l’argent » : dès ses premiers jobs étudiants, Gwen a mis de l’argent de côté, et elle gère aussi ses finances « à coups de Google Sheets à-tout-va, que ce soit pour le côté personnel comme le côté professionnel ».
S’il lui arrive d’être à découvert, ce n’est pas par manque d’argent, mais parce qu’elle « met trop de côté ». « Mais je le comble très vite », assure-t-elle.
« Après, j’ai ce truc un peu bizarre : je n’aime pas avoir beaucoup d’argent dormant sur mon compte personnel. C’est-à-dire que je maintiens toujours ce compte à 200-250 €. Tout ce qui va au-dessus passe sur l’un de mes livrets. C’est comme ça que j’ai pu payer ma voiture cash en 2018 ou que j’avais un apport de 35k € pour l’appartement qu’on a acheté cette année. Je ne suis pas cigale, mais je ne suis pas fourmi non plus. Je ne me prive de rien. »
Côté organisation financière, Gwen et Olivier ont opté pour « un fonctionnement hybride ».
« Nous avons chacun conservé nos comptes personnels et nos livrets (A, LDD, etc) mais aussi un compte commun que nous alimentons à hauteur de nos capacités. Nous y versons 60 % de notre salaire net, histoire de pouvoir rassembler quelques économies pour d’éventuels achats personnels. Ce fonctionnement nous permet de vivre très confortablement et de garder une certaine harmonie entre nous. »
Gwen reconnaît néanmoins avoir du mal au début à mettre la même somme que son compagnon, étant donné qu’elle gagne en moyenne plus que lui.
« J’avais l’impression de le duper financièrement, parce qu’en mettant une somme fixe, je mets logiquement beaucoup plus d’argent de côté que lui. Ce n’était pas juste. Pourquoi me faire un apport personnel mirobolant seule ? Autant mettre un peu plus sur le compte commun afin de pouvoir profiter ensemble de ce que nous bâtissons (et bâtirons) ensemble. »
Les dépenses de Gwen
Gwen et son compagnon payant à deux chacune des dépenses courantes, la jeune femme nous a indiqué la part qu’elle réglait, elle, chaque mois. Le remboursement du prêt immobilier est le poste de dépenses le plus important pour Gwen et son compagnon : 550 € par mois chacun (1 100 € en tout).
Ils règlent aussi chacun la moitié des factures : 150 € d’eau et d’électricité, 113 € de charges de copropriété. Soit 131 € pour Gwen.
Internet (40 €), Disney+ (payé à 3, soit 2,5 € par mois), Netflix (13,49 €), Amazon Prime (5,82 €), Blizzard (12,99 €) sont aussi des dépenses que le couple divise en deux. Gwen, elle, s’acquitte seule de 10 € de facture pour son téléphone.
L’assurance habitation (36 €) est aussi payée à deux chaque mois, tandis que Gwen règle seule l’assurance voiture, d’un montant de 64 €.
Les frais de transports, justement, ne pèsent pas grand chose sur le budget de Gwen : 20 € par mois, pour l’essence.
« Nous avons décidé récemment que nous utiliserions plus souvent ma voiture, qui dort dans le garage sinon… Olivier ne prend sa voiture que pour le boulot et paye l’essence avec son compte personnel. Nous payons l’essence de ma voiture avec le compte commun car elle est utilisée essentiellement pour des trajets à deux. Toutefois, elle ne consomme pas beaucoup et nos trajets ne sont pas longs. C’est une moyenne d’un plein sur deux mois. »
Les frais bancaires sont aussi répartis équitablement (6 € chacun) entre Gwen et son compagnon. La jeune femme assure en revanche seule les frais liés au chat : 8 € par mois en moyenne, pour les croquettes et la litière.
« Le véto est très occasionnel, une à deux fois par an, on peut ajouter 80-100 €, que nous payons à deux. Sauf début juillet, où ça nous a coûté 332 euros ! »
Enfin, Gwen étant la seule imposable, elle doit régler seule la part sur ses revenus.
« J’ai augmenté drastiquement mon CA, donc les impôts 2023 sur les revenus 2022 me coûtent 678 euros. »
Cette année, le couple n’a pas de taxe foncière à payer car il était encore locataire au 1er janvier 2023.
« J’ai fait un microblading à presque 300 € qui n’a pas tenu, ça m’apprendra ! »
Côté budget alimentaire, Gwen l’estime à 600 € mensuels, divisé en deux parts égales par les membres du foyer. S’il est élevé, c’est parce que le couple privilégie les produits bio.
« Je suis végétarienne et Olivier essaye de réduire sa consommation de viande, alors il y a un certain budget qui s’écoule dans ces deux secteurs : le bio et le végétarien. Ce n’est pas donné, mais en même temps, bien manger a un prix. »
Gwen n’a pas d’enseigne favorite pour faire ses courses, mais est intransigeante sur un point : ne jamais acheter de produits premier prix.
« Ce n’est pas parce que je veux que mon frigo soit chic, mais parce que je sais que ces produits ne sont bons ni pour nous ni pour la planète. C’est vraiment le bas de gamme ! Je préfère les marques distributeurs, nationales, biologiques ou locales. Je fais attention aux prix au kilo, le plus souvent, pour faire mes choix. En regardant ce détail, on se rend compte qu’on se fait bien enfler, par moment. »
La jeune femme n’a pas de dépense mensuelle en produits dits « féminins ». Pour ses menstruations, Gwen préfère mettre le prix dans des produits réutilisables, qu’elle rentabilise rapidement et qui sont meilleurs pour l’environnement. Elle a ainsi investi en 2018 dans une cup menstruelle en silicone qu’elle utilise toujours, ainsi que dans des serviettes en tissus.
« J’ai aussi récemment fait l’acquisition de 10 culottes menstruelles pour 98 €, c’était les soldes et la promo proposait 5 achetées, 5 offertes. C’est un petit budget mais cette marque (française) semble de meilleure qualité. Cela fait plus de 6 ans que je n’ai plus utilisé ni acheté de produits jetables, j’en suis très fière. »
Concernant le maquillage, Gwen n’est pas non plus du genre à faire des folies. « J’en utilise assez peu. Travaillant à la maison, j’ai moins de contraintes. »
Elle s’épile à la maison à la cire (8 à 9 € le pot, qu’elle garde un an, voire plus).
« Je n’ai pas beaucoup de poils, et puis je ne m’épile pas souvent parce que bon, la flemme.
En octobre 2022, j’ai fait un microblading chez mon esthéticienne (286 €) mais ça n’a pas bien tenu. C’était un test, peu concluant… Presque 300 € que j’aurais mieux fait de garder, ça m’apprendra ! »
Enfin, côté contraception, elle a un stérilet depuis 2021, remboursé en partie par la Sécurité sociale.
Les loisirs de Gwen
Du fait de sa profession artistique, Gwen est très portée sur les activités manuelles : l’aquarelle, le digital painting, les Hama, la broderie, les puzzles…« Le budget n’est pas très important car j’ai acheté les équipements de base et pas plus, pour l’instant. »
Le reste – les restos, les fast foods, les abonnements aux jeux vidéo bref, « tout ce qui relève du pur kiff », selon Gwen – est une nouvelle fois divisé en parts égales : chacun paye paye en moyenne 75 € par mois.
Mais la trentenaire aimerait réduire la somme allouée aux jeux vidéo.
« Nous jouons beaucoup tous les deux et on achète pas mal de jeux, surtout s’il y a des promos. Victimes du marketing ! Et pourtant, nous ne jouons pas forcément à tout ce que nous achetons… Même si ce n’est pas non plus un budget énorme, nous pourrions tous les deux le réduire. »
Même si Gwen fait attention à ses dépenses, cela ne l’empêche pas de s’octroyer de temps en temps un vrai « craquage ». Le dernier en date ? Un tatouage à 1 280 € qu’elle s’est offert en décembre dernier.
« Au début, je me suis sentie très coupable de m’offrir un truc pareil, j’avais presque honte de dévoiler le prix quand la question était posée, car c’est très cher. Mais en plus de rémunérer un artiste indépendant, blabla (ce qui est bien, attention), j’ai trouvé que je m’étais peut-être un peu faite avoir sur le devis… On m’avait compté 8 heures de taf et au final, on a à peine atteint les 5 heures, et encore…! Mais bon. J’ai la chance de pouvoir me permettre de telles folies. Et je chéris cette chance. »
Moins fun mais essentiel, le couple a aussi récemment investi dans un combo machine à laver et sèche linge à 1 598 €.
« Un gros budget qu’on aurait pu revoir à la baisse mais nous avons voulu parier sur le temps. Parfois, je me dis qu’il faut savoir allonger le billet, si on ne veut pas faire le même achat dans 3 ans parce que ça aura lâché ! »
L’épargne et les projets d’avenir de Gwen
Grâce à son salaire variable mais confortable, Gwen épargne chaque mois une belle somme d’argent : entre 400 € et 800 €, avec parfois des pics à 1500 €.
L’épargne constituée lui a ainsi permis d’avoir un bel apport pour l’appartement (35 000 €).
« Côté professionnel, j’épargne aussi sur un PER (200 € par mois) mais je songe à augmenter mes mensualités. »
À l’avenir, Gwen et Olivier souhaitent mieux équiper leur nouvel appartement, et profiter de l’argent mis de côté pour voyager un peu.
« Nous avons visité Madrid en mai 2023, c’est déjà chouette. Toutefois, je suis arrivée en Lorraine en 2021 et pourtant, je n’ai que très peu visité la région ou même les pays frontaliers ! C’est quand même dommage ! On a la montagne tout à côté, l’Alsace et ses merveilles… La Belgique et l’Allemagne sont à deux heures de route, la Suisse et les Pays-Bas nécessitent seulement quatre heures… Et le Luxembourg ? On y est en 25 minutes ! Alors, vivement qu’on en profite ! »
Merci à Gwen* d’avoir épluché ses comptes pour nous !
* Les prénoms ont été modifiés.
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