Vendredi, j’ai fini l’école. Pour de vrai. Je suis officiellement une grande. Dans quelques mois, lorsque j’aurais terminé mes stages et achevé mon mémoire (une formalité après celui de l’année dernière), je pourrai gaiement grossir les files d’attente de Pôle Emploi sauter à pieds joints dans les délices de la vie professionnelle. Ce genre de moment se prête parfaitement à un voyage temporel sur fond de nostalgie, de bilan larmoyant et de conseils de survie pleins de bon sens. Allez, viens, je t’emmèèèèèène.
https://youtu.be/1lLGsqNR1s8
Maternelle : impose ton style
Mon papa m’a toujours dit qu’il avait su que je n’aurais pas de problème à l’école à ma première sortie des classes. Un peu anxieux, comme le veut la situation, il avait demandé à la maîtresse comment s’était passée la journée de son adorable petit bout de fille. La réponse est que, dès la première récréation, j’avais mordu l’enfant qui mordait, pincé l’enfant qui pinçait et tapé l’enfant qui tapait. La violence, c’est mal. N’empêche que la maternelle est une jungle et que tous les moyens sont bons pour protéger son goûter de 10 heures.
Du coup, les années s’accumulant – la sagesse aussi- je suis persuadée que de conseiller à tous les bambins qui lisent cet article de sécher le cours d’éveil corporel pour participer à des séances de baby-kickboxing est une solution parfaite. Imposer le R.E.S.T.E.C.P., c’est important.
Primaire : j’ai dix ans
La primaire, c’est le moment où on se rend compte qu’il y a des plus grands que soi, qu’il y a des modes à suivre et que les conneries sont beaucoup plus drôles à réaliser à deux. Ou quatre.
Les grands, en vrai, sont des entités assez floues. Ils sont au fond de la cour, entre eux, ils n’ont pas les mêmes jeux et ils ont le droit d’apporter un ballon en mousse. C’est un peu des mythes et la cohabitation n’existe que dans la file d’attente pour la distribution des Mr Freeze en été. Ça en fait des figures à suivre et le fait qu’ils portent des joggings à boutons pression est une raison suffisante pour en demander, lors des courses du mercredi après-midi. Une fois le Graal obtenu, viendra le moment de la parade et la joie de faire voler son jogging dépressionné dans les chorégraphies sur les chansons en yaourt des Worlds Apart. C’est important de se sentir free pendant la récré avant de retourner à Ratus et Mina et aux divisions posées.
Ouais, y avait aussi les sucettes Spice Girls, et ça, c’était la classe.
Mes conseils à te donner si tu es en primaire : n’échange pas ton Kinder Country contre une banane un peu trop faite, ne prête pas les billes de ton frère aux gens qui ne connaissent pas les règles du jeu et apprends la table de 7 par cœur. GO ! (Ah, et aussi, même si vous être quatre copines très liées, attacher tous vos blousons à la suite par la fermeture éclair n’est pas une bonne idée. C’est pas pratique et ça sert vraiment à rien.)
Collège : prends ton mal en douceur
Le collège, c’est ingrat et j’ai pas trop envie d’en parler. Du coup, pour oublier l’appareil dentaire, l’excès de sébum, SOHCAHTOA et les déclinaisons allemandes, je propose un petit interlude musical.
Mon conseil ? Lis. Beaucoup. Au moins, ça aura le mérite de te faire passer le temps. Si tu as l’impression d’être une freak et que t’es pas bien amie avec ce qui se passe dans ton corps, rappelle-toi ce que disait l’Empereur dans Mulan
: « Les fleurs qui s’épanouissent dans l’adversité sont les plus rares et les plus belles badass de toutes ! » Et garde ton journal intime, tu riras beaucoup en le retrouvant (demande à Jack Parker).
Proverbe sorcier « Journal intime retrouvé, voyage dans le temps assuré »
Lycée : jeunes et cons
Le lycée, ça devient sérieux. D’abord parce que c’est à partir de ce moment que le corps professoral décide de former un bloc de pression unidirectionnel pour te faire penser à ton orientation. Ensuite parce que c’est là que tu découvres Saez et Evanescence et que tu deviens une adolescente incomprise. Tu aimerais devenir sculpteur de flan aromatisé à la vanille et on te parle de BTS Vente Action Marchande. Tu vis tes premiers chagrins d’amour et on te parle de rose éclose, de bourgeon et de jardinage. La vérité, c’est qu’il n’y a pas de diplôme pour chanteur torturé alors tu t’enfermes dans ta chambre en répétant inlassablement la ligne de basse de Come as you are sur la guitare que ta mère avait achetée dans sa jeunesse. Ce que tu ignores, c’est que tu n’es pas la première à ressentir ce que tu ressens ni à vivre ce que tu vis. Ouais, y a d’autres gens qui ont hurlé « Seconde F comme Forever » en buvant du panaché dans les buissons près du gymnase. Cherche pas.
Tu m’croiras pas si je te dis que je suis passée par là mais je te jure que c’est vrai. Moi aussi j’ai été insolente avec mes profs de langue et j’ai fait mes devoirs de maths en cours de philo en pensant que j’étais une rebelle parce que je portais des Van’s et des bracelets à pics. Du coup, je vais me permettre de te donner des conseils que tu ne liras pas. Petit un, parle mieux à ta mère. Petit deux, choisis une solution de secours à ta vocation d’artiste inspiré. Petit trois, si possible, lance-toi dans une voie qui te convient. Y a pas de diplôme mieux que les autres, tout dépend de tes compétences et de ta personnalité. Un petit rappel pour la fin : tu as le droit de te tromper ou de ne pas être sûre de ce que tu veux faire, le tout, c’est de t’en rendre compte.
Études supérieures : on a parcouru le chemin, on a tenu la distance, etc.
Premier constat : les études supérieures ne sont pas forcément une ligne droite. Personnellement, je me suis réorientée, j’ai fait un DUT, j’ai bifurqué en licence et j’ai atterri dans un autre domaine d’étude pour passer mon master. Tout ça alors que j’avais une idée assez précise de ce que je voulais faire.
Deuxième constat : quel que soit l’endroit, quel qu’en soit le thème, les études supérieures permettent de se découvrir tel qu’on est. En sept ans, j’ai réussi à percevoir mon instinct maternel en m’occupant des clopes, du portable et des clefs de gens beaucoup plus ivres que moi. J’ai appris à instaurer des relais en amphi d’économie des médias pour que chacun puisse s’assoupir à tour de rôle tout en ayant, à la fin, un cours potable. J’ai appris à échouer, à me remettre en question, à persévérer. Je suis même parvenue, en dernière année de fac, à fermer (quelques fois) ma gueule pour préserver la bonne ambiance dans ma promotion. Et pour ça, je voudrais remercier mes amies, ma famille et ma conseillère en communication.
Vendredi, j’ai fini l’école. J’ai clos 22 ans de scolarité en foirant mon oral de droit et je suis même pas en colère. En réalité, je me sens toute chose et j’ai l’impression d’avoir à tasser dans une boîte toute une partie de moi-même. Je sais que je m’apprête à mettre les pieds sur un tout nouveau chemin et que, même si je n’ai pas l’impression d’avoir changé, j’ai déjà parcouru une petite trotte. Je sais aussi qu’à chaque fois que je regarderai par-dessus mon épaule, je verrai une teigneuse à couettes blondes, une gamine avec un jogging à pressions et une préadolescente boutonneuse me faire de grands signes pour que je continue à avancer. La lycéenne me fera très probablement un fuck mais je m’en fais pas. Un jour, elle comprendra.
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Les Commentaires
Ben... qui a dit qu'on n'avait pas le droit ?
Moi aussi. L'un n'empêche pas l'autre.
J'espère que ta reprise d'étude se passe bien .