Amies lectrices, amis lecteurs, je suis au regret de vous apprendre que nous sommes tou-te-s des ingrat-e-s. Parfaitement.
Comment, « non » ? Je ne vous imaginais pas aussi catégoriques, dites donc. Et puis, vous ne savez même pas encore de quoi je parle. Vous utilisez toujours Paint pour créer de jolies cartes de Noël, peut-être ? Vous allez me dire que vous faites les titres de vos blogs en dégradé violet-vert-vomi sur Word Art ? Que vos couleurs préférées c’est le bleu erreur Windows et le vert fluo de Télétubbies ?
Non. Ben voilà. Vous êtes donc des ingrats.
Ce gif n’est là que pour annoncer la couleur de l’article.
Souvenez-vous, pourtant, de ces années folles où nous rendions taré notre entourage en l’envahissant de cartes pleines de clip arts dégueulasses et réalisées avec le CD-Rom que mémé Fernande nous avait offert à Noël en pensant que c’était de la musique ! Nous folâtrions gaiement dans les limbes du ringard ultime de l’Internet sans guère penser au lendemain, et les traits tremblotants que nous tracions à la souris devenaient oeuvres d’art à nos jeunes yeux.
Nous voilà, aujourd’hui, à utiliser Photoshop pour redimensionner des photos, sans plus une pensée pour la galère que c’était sous Paint, ou pour les jolis effets de typo qu’on faisait avec Lucida Grande et Comic sans MS…
Je pense que, du coup, on peut au moins se fendre d’une petite soirée diapo en souvenir de cet âge d’or du graphisme Web. D’autant que, bon… Il n’a jamais tout à fait disparu.
L’apogée du Clip Art
Le Clip Art, c’est un peu l’ancêtre du reaction gif qu’on colle un peu partout de nos jours. Sauf qu’au lieu d’avoir des animations issues de films, séries ou autres… On avait des petits dessins mignons. Qu’on collait partout aussi, avec la dimension papier en plus.
Mais si enfin, vous en retrouviez jusque sur vos cours de maths, parce que votre prof se targuait d’être un pro en informatique (celui-là même qui vous forçait à aller à ses cours d’informatique pour participer à la création du CD-Rom de votre classe).
Je rêve encore, parfois, de ce gâteau d’anniversaire.
Ce n’étaient vraiment que des illustrations basiques, ou des symboles, prêts pour l’impression ou pour pourrir vos pages perso Wanadoo et vos cartes d’anniversaire, puisqu’il y en avait pour toutes les occasions. Mais pourquoi je parle à l’imparfait, d’ailleurs ? Il y a toujours des Clip Arts un peu partout sur le Web, qui attendent, la truffe humide et les yeux brillants, que vous les choisissiez pour les insérer dans votre document Word !
Voyez un peu ce que vous manquez.
Comment ça, vous utilisez Google Docs ? Faites un effort, bande de sales jeunes ! Sinon vous ne pourrez jamais (re)découvrir la merveille artistique suivante, avec laquelle le clip art s’accorde si bien : le Word Art.
Le Word Art, ringard depuis sa naissance
Aaah… le Word Art. Petite option « dessin » proposée par Microsoft Word à l’origine, la bête a fait bien des émules sans que l’on puisse réellement expliquer comment, ni pourquoi.
Combien de rétines de professeurs avez-vous usées à force de faire les pages de garde de vos cahiers avec Word Art ? Bon, en même temps c’était un peu leur faute, quelle idée de demander de décorer un cahier de grammaire anglaise, aussi. Sans compter que certains professeurs étaient pires que vous. Et ne parlons pas de la manie qu’avaient vos parents de coller fièrement ça sur les cartons d’invitations de vos goûters d’anniversaire.
Je ne sais pas si ça a été à la mode, si on aimait vraiment ça ou si c’était une espèce d’ironie constante, comme si on était déjà tous des hipsters dans les années 90. Car enfin, soyons objectifs et réalistes deux secondes : où est l’esthétique, où sont le bon goût et la santé mentale dans ces abus d’effets de style à base de dégradés visqueux et d’ombres en arcs de cercle à l’agonie ?
Sans parler de l’effet désastreux que peut avoir sur nos petits cervelets délicats une phrase aux couleurs déjà psychédéliques que l’on tourne en rond — ou je ne sais trop comment l’expliquer. Absurde.
Gné.
Né ringard, le Word Art s’en fout : il survit. Et puis, il ne faut pas négliger la part d’affectif ! Prenez par exemple cet individu qui, en 2010, cherchait encore à faire du Word Art pour décorer ses factures (à moins que ce ne soit votre grand-mère qui découvrait le petit monde joyeux de l’informatique).
Sans oublier que pour les flemmards ou les snobs qui travaillent désormais sur Evernote ou Ommwriter mais ont parfois une petite pointe de nostalgie aux arômes de culpabilité, on est allés jusqu’à créer des générateurs de Word Art.
Je me sens en bonne voie pour remplacer notre graphiste.
Vous voyez. Word art is not dead.
Paint, l’intemporel
Fut un temps, vous redimensionniez les fanarts de vos stars préféré-e-s que vous aviez volés sur Internet avec… Paint. Sauf que, bon. Vous n’avez jamais vraiment compris comment ça fonctionnait. Il faut avouer que ce n’était pas forcément fait pour. Ou peut-être que si. Enfin. On sait pas trop. C’est Paint, quoi.
*soupir* avec des astérisques, comme on disait à l’époque
Officiellement un « logiciel de manipulation d’images matricielles » (ce qui ne nous avance pas énormément), Ms Paint existe depuis 1985. Même moi, je n’étais même pas encore née — et j’ai découvert les PC avec Paint, puisque celui-ci était d’office intégré dans le menu de nos Windows 95.
Oui, j’ai connu Windows 95 et le 56K, qu’est-ce que tu vas faire ? On était heureux à l’époque ! On cherchait des sites de Dollz et on avait le temps d’aller faire le goûter avec des tartines de Nutella avant que la page ne s’affiche (à peu près) en entier ! C’était bien ! C’était nature ! C’était… Bref.
Ah oui, mais vous, vous étiez de petit-e-s artistes en herbe, je le sens. Vous pouviez passer des heures à baver des formes et des couleurs improbables sur la page blanche pour passer le temps pendant que votre CD-Rom d’
Adibou fait du poney s’installait. Vous en avez fait, des ciels bleus avec des soleils souriants, des bonhommes-bâtons bancals et des maisons tordues ou au contraire trop droites à partir du moment où vous avez découvert la fonction ligne. Et polygone.
Et ne parlons même pas de l’aérographe.
L’artiste a signé.
Alors, bien sûr, il y a toujours des petits malins en mal de reconnaissance pour réaliser des chefs-d’oeuvre avec un logiciel que vous pensiez pourtant consacré à l’oisiveté et la médiocrité. Vous avez le droit de crier au fake et de retourner à vos bonhommes-bâtons. La majorité ne vous jugera pas.
Ces typos qui nous hantent
Oui, c’est vrai, la plupart des polices d’hier sont les polices d’aujourd’hui. Mais certaines dégagent une plus grande aura de nostalgie crasse que d’autres, ne serait-ce que parce qu’on les a oubliées — c’est-à-dire qu’on n’ose plus les utiliser. Tristesse et mélancolie.
Patron, je crois que je tiens un concept.
Je suis néanmoins certaine que ce n’est pas sans une larmichette pointant au coin de vos jolis yeux que vous avez posé ces derniers sur le logo madmoiZelle en Papyrus ci-dessus… L’émotion vous étrangle quand vous croisez une tirade en Lucida Grande en italique, ou une prose en Mistral chatoyant ! Vous ne sauriez demeurer insensibles devant un formulaire administratif en Comic Sans MS qui…
Non en fait, oubliez ce dernier point. On n’a jamais lâché le Comic Sans MS assez longtemps pour qu’il nous manque.
Enregistré dans une qualité dégueulasse pour vous rappeler les années Paint.
D’autres polices ont un peu plus sombré dans l’oubli, alors qu’elles nous avaient tant diverti-e-s. C’est le cas des polices Wingdings ! Ça vous parle, les Wingdings ? Mais si enfin, les Wingdings, vous savez, les imprononçables (ouine-gue-din-gueuz) qui ne servaient à rien parce que c’était… que des symboles. En gros. Voilà. Niveau communication, on a vu mieux.
Mais surtout, les Wingdings, c’était les légendes urbaines et toutes ces histoires de messages cachés et de complots qu’on nous servait avec. Vous ne pouvez pas savoir à quel point j’étais heureuse de réussir à tomber sur cette page malgré les maigres souvenirs qui me revenaient de cette histoire de référence au 11 septembre…
Mais si, souvenez-vous, cette chaîne malsaine qu’on se faisait tourner je ne sais plus comment, alors qu’on découvrait l’immensité du Web en espérant découvrir un complot mondial. Si on tapait « Q33NY », le code d’identification de l’un des avions détournés le 11 septembre 2001, et qu’on mettait ensuite le texte en Wingdings, les symboles étaient les suivants : un avion, deux tours, une tête de mort et l’étoile de David.
Essayez un instant de revivre l’émotion du môme devant le PC de ses parents qui pense avoir mis le doigt sur un message caché.
[musique de X-files]
Bon, quelques années plus tard, on réalise que « Q33NY » n’a rien à voir avec aucun des avions concernés et que, tiens, au fait, mais quel rapport avec la communauté juive dans ces attentats… et on se trouve très simplet-te-s. Mais enfin. Folle jeunesse, tout ça.
Dollz, licornes, et autres gifs à paillettes
Ah non, ça, autant pour moi : ça n’a jamais pris une ride. Je veux dire, tout le monde continue à décorer ses emails persos avec le papier à lettre d’Outlook Express en fond, quelques gifs de licornes et un .midi de Titanic en bande-son.
Tout comme, bon, pendant la pause déj’, surfer sur l’Internet pour aller s’amuser à habiller quelques Dollz qu’on pourra utiliser pour décorer son site perso… ça détend.
… Non ?
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Les Commentaires
Sinon, ben j'assume mais j'adore les images et gifs pailletés moi