Son nom t’es sûrement inconnu, mais Germaine Tillion est le genre de femmes qui forcent l’admiration. La madame a 100 ans et une vie plus que remplie de combats qui imposent le respect.
Née le 30 avril 1907 à Allegre (Haute Loire), elle est l’une des pionnières de l’ethnologie et mène dès les années 30 une série de missions dans les montagnes algériennes : elle y découvre les Aurès et les Berbères Chaouïas entre 1934 et 1940.
A son retour en France, en 1940, c’est sans hésitation qu’elle s’engage dans la Résistance. La Seconde Guerre Mondiale sera pour cette femme d’exception le premier théâtre de l’expression de ces combats. Dénoncée par l’abbé Alesch, Germaine Tillion est arrêtée le 13 août 1942, et déportée le 21 octobre 1943 à Ravensbrück. Elle y perd sa mère, déportée comme elle, lors de gazages massifs perpétrés en mars 1945.
Au printemps 1945, elle est libérée. « J’ai survécu, je le dois, d’abord et à coup sûr, au hasard, ensuite à la colère, à la volonté de dévoiler ces crimes et, enfin, à une coalition de l’amitié – car j’avais perdu le désir viscéral de vivre », écrira-t-elle dans son Ravensbrück (Seuil, 1988).
Enfermée en camp de concentration, elle continue son combat pour l’humanité et motivée par l’amitié qu’elle développe avec Jacqueline d’Alincourt, elle écrit une opérette en trois pièces : Le Verfügbar aux enfers pour aider ses codétenues à survivre. Elle y raconte l’horreur concentrationnaire avec un humour noir voulu comme un antidote à la barbarie nazie.
Pour célébrer son anniversaire, le Théâtre du Châtelet a eu l’idée audacieuse d’adapter l’œuvre pour la première fois sur scène. Sur un air de musette, la trentaine de collégiennes qui jouent les choristes se mettent à chanter : « On m’a dit “il faut résister”… / J’ai dit oui presque sans y penser / C’est comme ça qu’dans un train de la ligne du Nord / J’eus ma place retenue à l’œil et sans effort… ». Un humour décalé qui fait encore plus effet quand on pense aux conditions d’écriture et à la force qu’il a fallu déployer pour choisir de rire plutôt que de pleurer dans cet endroit précis.
Mais son combat ne s’arrête pas à la dénonciation de la barbarie nazie : dès la fin des années 50, elle sera l’une des premières à dénoncer la torture utilisée pendant la guerre d’Algérie et dans les camps soviétiques. Plus récemment, c’est pour la défense des sans papier et contre la torture en Irak qu’elle s’est engagée. En 2002, un film réalisé par Christian Bromberger lui est consacré : Germaine Tillion, une conscience dans le siècle. Aujourd‘hui, à 100 ans, « Germaine Tillion est toujours une observatrice engagée pour la cause de l’humanité et pas une militante encartée dans un Parti » déclare Tzvetan Todorov, philosophe et président de l’association Germaine Tillion. Un petit bout de femme qui inspire l’admiration.
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Les Commentaires
Et je suis complètement d'accord avec le fait qu'il faille avoir une sacrée force pour écrire des choses humoristiques (en italique parce que c'est plus grinçant), dans des conditions pareilles. Et d'ailleurs, de tous les témoignages que j'ai déjà pu lire, entendre ou voir, au récit ne s'est jamais mêlé l'humour, et c'est bien compréhensible!
Bref, chapeau.
Pis sinon, je me documenterai aussi, c'est sûr!