C’est une question qui vous a sûrement turlupiné autant que moi pendant l’enfance : le cirage de bottes de Marie-Madeleine envers l’instituteur l’aidera-t-elle vraiment à avoir une meilleure note à son exposé ? Subséquemment, devrait-on imiter Marie-Madeleine et nous mettre à l’art décrié du léchage de derrière ? Peut-on se comporter normalement aux côtés de son patron ? Pour perdurer au sein de madmoiZelle, faut-il régulièrement déclarer des poèmes à la gloire de Fab ?
Franchement, je dois bien vous dire la vérité : j’ai beau dénigrer à qui mieux-mieux les adeptes du léchage de fessiers, j’ai beau m’indigner que bordel, c’est quand même triste d’en arriver là, lorsque mon cher et tendre m’offre un petit massage des épaules, laissez-moi vous dire que je me fends automatiquement d’un compliment ou deux – au cas où le flatter le pousserait à continuer (même si le massage est médiocre, mieux vaut un mauvais tripotage d’épaules que pas de tripotage d’épaules du tout, non ?).
Bref, je crois bien que vous avez saisi le concept de l’interrogation du jour : la flatterie est-elle efficace ?
Pour le magazine Cerveau & Psycho, Nicolas Guéguen (<3)* recense quelques éléments de réponse. Tuons le suspense tout de suite : il semblerait que la réponse soit oui. Selon les études scientifiques réalisées sur le sujet, la flatterie serait l’une des méthodes les plus efficaces pour arriver à nos fins. ON EST PEU DE CHOSES.
Quelques études scientifiques à propos de la flatterie
Ainsi, plusieurs expériences mises en place par John Steiner démontrent que lorsque les serveuses font un compliment à leurs clients, leurs pourboires sont plus importants – notamment si le compliment est subtil (si les serveuses complimentent chacun de leurs clients, ces derniers peuvent penser que la flatterie est systématique et non sincère, ce qui diminue les pourboires laissés).
Pour Nicolas Guéguen, la flatterie serait également un atout non négligeable si l’on souhaite draguer : lorsque les garçons abordent les filles avec un compliment préalable, elles seraient 29% à accepter de prendre un verre avec eux (tandis que le taux « tombe » à 9% sans compliment préalable).
Vous savez quoi ? Selon une autre expérience relatée par le chercheur, vous n’avez même pas besoin d’être physiquement présent pour que la flatterie fonctionne.
Imaginons que vous receviez un questionnaire de la part de votre ville. Certaines d’entre vous reçoivent un questionnaire court (24 questions), d’autres ont affaire à un questionnaire beaucoup plus long (182 questions) ; ceux-ci sont accompagnés d’une lettre, qui vous remerciera parfois pour « votre contribution », voire « votre généreuse contribution ».
Si l’on récapitule, il y a donc 4 cas de figures :
- Vous recevez un questionnaire court avec une lettre sans compliment
- Vous recevez un questionnaire court avec une lettre ET un compliment
- Vous recevez un questionnaire long avec une lettre sans compliment
- Vous recevez un questionnaire long avec une lettre ET un compliment
L’objectif des chercheurs est cette fois d’observer si le taux de retour (c’est-à-dire la proportion de personnes leur retournant le questionnaire rempli) est plus grand avec flatterie que sans.
Résultat : pour le questionnaire court, le taux de retour ne varie pas « significativement » ; autrement dit, le compliment n’a pas ou peu d’impact.
En revanche, en ce qui concerne le questionnaire long, le taux de retour passe de 10% sans flatterie à 29% avec flatterie
: cette fois, l’adjectif valorisant (« généreuse ») aurait activé chez la personne répondante une perception positive d’elle-même, qui l’a poussée à agir en conformité avec cette perception.
Pour schématiser, disons qu’en lisant « Merci de votre généreuse contribution », nous pourrions bien nous dire « Tiens, c’est tout moi, ça », et nous mettre à agir en fonction de ce compliment.
Qui flatter, et comment ?
Ce n’est pas le pire : il semblerait même que les flatteries grossières dans les lettres de motivation soient bénéfiques. En lisant ça, j’ai bien cru m’étouffer – et je suis sûre qu’une petite part de moi est un peu morte. Toujours est-il qu’ajouter un petit « j’ai eu l’honneur de lire vos ouvrages » ou « vos articles ont été une source d’inspiration importante » augmenterait nos chances d’être retenus. Ouais, même si ça semble gros comme une maison.
Je te vois bien, là, derrière ton écran, à te demander qui donc peut bien être réceptif à ce genre de manipulation… Selon l’article de Guéguen, les personnes les plus sensibles à la flatterie seraient celles ayant la plus haute opinion d’elles-mêmes, autrement dit celles qui auraient une plus grande estime de soi – parce qu’elles seraient constamment en recherche d’avis qui confortent cette sensation.
À l’inverse, flatter une personne dont l’estime de soi serait plutôt faible ne fonctionnerait pas : la personne flattée jugerait plus négativement la personne flatteuse et penserait que celle-ci essaie de la tromper.
Et vous, de quel côté de la Force vous placez-vous ? Un petit compliment feat. léchouilles de derrière n’a jamais fait de mal à personne, ou plutôt s’auto-flageller à grands coup de potatoes que s’adonner à cette pratique ?
* Ce cœur accolé à un nom de chercheur pourrait bien ruiner ma crédibilité scientifique, si j’en avais une.
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Les Commentaires
Toutafé. Chose drôle, dans certain pays notamment le Japon et la Corée, "l'hypocrisie" est signe de politesse envers l'autre. Si jamais tu demande à une nippone qqche qui ne lui plait pas, elle ne te diras pas "non même pas en rêve", au contraire, elle trouvera une réponse détournée afin de ne pas te vexer/ te tourner en ridicule. Genre la demande "Tu veux sortir avec moi?", et bien la réponse ressemblera à "c'est difficile". Ils ne prononcent pas leur avis directement à cause de la notion de groupe et de respect d'autrui très importante en Asie. Contrairement à la France, beaucoup plus individualiste.
Question de culture. Mais pourquoi donc les frenchies si râleurs refusent si aisément la critique?