— Léa, c’est un 9, t’as vu ses seins ? — Ah ouais, mais Anouk par contre c’est un 5… une vraie planche à pain.
Ces conversations, je les ai entendues. Au collège, puis au lycée, dans la bouche des garçons. À l’époque, je ne sais même pas si j’étais choquée… Mais en 2019, les choses ont bien changé !
Des lycéens notent les filles sur leurs physiques
Dans un lycée du Maryland, aux États-Unis, des filles ont découvert que les garçons de leurs classes faisaient circuler une liste les notant sur leurs physiques, comme l’explique le Washington Post.
18 lycéennes étaient échelonnées, avec des notes allant de 5,5 à 9,4/10, et indiquant à quel degré elles étaient attirantes sexuellement.
La liste a longtemps vécu dans l’ombre, parmi les mecs, avant qu’un élève y ayant vu le nom d’une de ses amies ne la prévienne. En 24h, le pot aux roses était découvert, et les filles en parlaient librement.
Les lycéennes notées sur leurs physiques ne se laissent pas faire
Au début, les lycéennes ont prévenu l’administration, demandant des sanctions mais aussi une discussion plus large pour comprendre ce qui a permis à cette liste d’exister et de circuler.
Ce qui a permis, en d’autres termes, aux garçons de se sentir légitimes à noter leurs camarades, parfois leurs amies, sur leur potentiel sexy.
Les décisionnaires de l’établissement n’ont pas été à la hauteur. Ils leur ont demandé de ne pas en parler en-dehors de l’école. Un seul élève a été puni, par une heure de colle qui ne serait pas inscrite dans son dossier.
Une sanction bien faible pour une participation à un acte aussi malveillant…
Les lycéennes victimes de sexisme prennent les choses en main
Nicky Schmidt est la jeune femme qui a été prévenue de sa présence sur la liste. Elle a décidé de ne pas laisser les choses en rester là.
La lycéenne a proposé à 15 de ses camarades d’agir, en venant ensemble au bureau du principal « pour lui dire qu’on ne se sent pas en sécurité dans cet environnement et qu’on est fatiguée de cette ambiance toxique ».
Au final, c’est une quarantaine d’élèves qui ont rejoint le mouvement.
Nicky Schmidt (à droite)
Le dialogue au lycée pour lutter contre le sexisme
Le 8 mars, Journée Internationale des Droits des Femmes
, un espace de dialogue a donc été organisé, avec 80 lycéens et lycéennes, dont les garçons qui faisaient circuler la liste.
Pendant 2h30, de nombreuses jeunes femmes ont fait entendre leur voix pour faire comprendre aux mecs ce qu’elles vivent au quotidien, la menace permanente du sexisme, du harcèlement, de la réification.
Le Washington Post cite les mots puissants d’une élève, Rose Frank :
« Je le sens quand, en rentrant des cours, je suis harcelée par un homme dans son camion qui insiste pour que je monte avec lui, et me suit jusqu’à chez moi quand je refuse.
Je le sens quand ma mère me dit que mon troisième piercing à l’oreille « n’envoie pas le bon message » dans un cadre professionnel, et que je devrais garder mes cheveux lâchés en entretien d’embauche. »
Un jeune homme un peu à part était présent. Un élève de 18 ans. Celui qui a créé la liste.
Bien des filles se sont adressées directement à lui, et lui ont expliqué, les yeux dans les yeux, à quoi ressemble la vie des femmes.
Il a fini par reconnaître publiquement être à l’origine du classement, même si ce n’est pas lui qui l’a fait circuler, et s’est excusé pour le mal qu’il a causé.
Ces lycéens et lycéennes avancent ensemble vers l’égalité
Cette réunion n’a pas marqué la fin de la mobilisation, bien au contraire.
Lycéens et lycéennes continuent à réfléchir au patriarcat, à l’égalité, continuent à mettre en commun leurs expériences et à travailler ensemble.
Toutes les semaines, plusieurs élèves se réunissent et travaillent sur des solutions permettant de faire du lycée un endroit sûr pour tous et toutes.
Par exemple, en avril, deux élèves de terminale, un garçon et une fille, iront dans les classes de seconde parler des aspects toxiques de la masculinité.
Il ne reste à la plupart de ces gens que quelques mois avant de quitter le lycée. Ils et elles sont bien décidé à faire changer les choses pour les générations qui suivront.
Gabriella Capizzi, qui a pris la tête de ce groupe de réflexion, conclut l’enquête du Washington Post :
« Ceux qui font ce genre de liste ne sont pas des exceptions. Ce sont les gens qui en parlent qui sont des exceptions. Et c’est cette culture-là qui doit changer. »
Le futur sera égalitaire, ou ne sera pas
Je suis régulièrement réconfortée par des initiatives venant des ados d’aujourd’hui, qui, décidément, veulent bâtir un monde meilleur.
Car rappelons-le, #CEstNousLeFutur, alors à nous d’envoyer valser les reliquats discriminants d’un passé poussiéreux !
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Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
Par contre, je trouve pas que dire « une liste sur les garçons auraient moins d'impact ». De ce que je me souviens, au collège ça reste très « populaire vs looser ». Par exemple, j'écoutais un podcast récemment où des gens (du YouTube Game, donc je suppose considéré comme des cools maintenant) racontaient leurs mauvaises anecdotes de « loosers » du collège / lycée. Fille comme gars, ils parlaient de la même peur du rejet, du critère physique qui bloquait tout et de l'impossibilité d'exister socialement. Et dans mes propres souvenirs, y avait aussi ces gars et meufs populaires pis les autres sans confiances. À mon avis, les listes (bien que sur différents critères si c'est pour des gars ou des filles), c'est une terreur pour les gars « loosers » aussi. Ces gars-là sauront déjà être sur le bas de la liste et ça sera d'autant plus humiliant d'être affiché comme ça.
Je rejoins l'idée de pouvoir avoir un avis sur le potentiel d'attirance de quelqu'un (bon, c'est pas mon délire mais soit), mais sans note, sans que ce soit écrit et sans que d'autres puissent l'apprendre. Personne ne mérite d'être objectivé, surtout dans une ambiance scolaire / travail où tu peux pas partir, pis que t'es pas là pour ça.