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Johnny Depp et Maïwenn // Source : Why Not Productions
Culture

Festival de Cannes : les agresseurs présumés sont toujours les bienvenus

À la veille du festival de Cannes, qui aura lieu du 14 au 25 mais, son délégué général Thierry Frémaux a répondu aux questions de Variety quant au positionnement du festival par rapport à #MeToo.

Adèle Haenel, Judith Godrèche, Sophie Marceau, Anna Mouglalis : les actrices se démènent contre leur milieu pour faire souffler le vent #MeToo sur le cinéma français. Alors qu’on attend beaucoup du festival de Cannes, son délégué général Thierry Frémaux a déjà annoncé la couleur. Même s’il mentionne l’écoute accordée aux victimes, le délégué général continue d’évoquer la présomption d’innocence comme argument pour continuer à inviter des hommes accusés de violences sexistes et sexuelles.

À lire aussi : 86 % des plaintes pour violences sexuelles classées sans suite, et pourtant leur nombre n’a jamais été aussi important

« Un festival ne peut pas se substituer à la justice »

Interrogé par Variety ce mercredi 3 avril, Thierry Frémaux a répondu aux questions sans détour du média. Le festival invitera-t-il à nouveau des hommes accusés de violences sexistes et sexuelles, comme Polanski ou Johnny Depp en 2023 ? Cannes est-il impacté par #MeToo ?

À en croire les réponses du délégué général du plus célèbre festival de cinéma au monde, le vieux mythe du « tribunal populaire » qui entraverait le travail de la justice semble persister chez les décisionnaires du cinéma français. Éludant les manquements désormais chiffrés de la justice concernant les affaires de violences sexistes et sexuelles, Frémaux a brandi l’argument selon lequel le festival ne pouvait pas, comme le feraient selon lui « la presse et les réseaux sociaux », influencer le jugement des accusés :

Parce que les enquêtes policières fuitent dans la presse et sur les réseaux sociaux, cela amplifie leur écho et ne facilite pas un processus décisionnel serein et prudent. Un festival peut faire beaucoup de choses, mais il ne peut et ne doit pas se substituer au système judiciaire. La présomption d’innocence reste une valeur fondamentale, tout comme l’attention que l’on doit aux témoignages des victimes.

Les féministes parlent, mais qui les écoute ?

Plus loin dans l’interview, Thierry Frémaux a notamment décentré le cinéma de la question de #MeToo, affirmant : « En France, le monde du cinéma est au premier plan du débat [du débat #MeToo, ndlr.]. Mais ne croyons pas que le reste de la société n’ait pas à s’interroger. »

En cela, le délégué général du festival élude le fait que, même si ces violences sont effectivement systémiques, le milieu du cinéma en est gangréné, ce qui façonne les représentations, les imaginaires, et joue aussi un rôle majeur dans ce qui est considéré comme acceptable ou non.

Thierry Frémaux a assuré que « des associations féministes nous donnent les éclairages nécessaires » et des actrices « nous racontent des choses folles qui se sont passées sur certains tournages. » En d’autres termes, ces témoignantes existent, parlent, agissent. Mais du côté du festival de Cannes, l’immobilisme et le silence sont assourdissants.


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