« C’est notre corps » dit une pancarte, « L’avortement est un droit » affiche une banderole : hier à Istanbul, les femmes ont défilé contre un projet de loi du gouvernement Erdogan visant à réduire le délai pendant lequel un avortement est autorisé. Solidaires, quelques hommes ont également pris part au mouvement de protestation.
La situation
Pour le moment, l’avortement est encore jugé légal en Turquie : les femmes peuvent pratiquer une interruption volontaire de grossesse pendant les dix premières semaines de leurs grossesses. En effet, le pays autorise les interruptions volontaires de grossesse pour des raisons médicales depuis 1965, et depuis 1983 pendant les dix premières semaines de grossesse.
Mais le Parti de la justice et du développement est vraisemblablement enclin à remettre en cause ce droit : actuellement au pouvoir, l’AKP prépare un projet de loi destiné à réduire le nombre des avortements.
Ainsi, dans le cadre de la future législation, le parti islamo-conservateur veut réduire ce délai à six, voire quatre semaines. Sauf que ramener à quatre semaines le délai d’une IVG revient presque à l’interdire, puisque les femmes, à ce stade de la grossesse, sont à peine au courant qu’elles sont enceintes. À ce délai très court, il faut ajouter le temps de faire les démarches nécessaires.
Le projet de loi sera soumis au Parlement en juin. En attendant, les associations de femmes et l’opposition manifestent quotidiennement leur mécontentement.
Tensions sociales
Pour ne rien arranger à la situation, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan et ses sorties polémiques ont nourri un peu plus l’indignation des femmes turques.
En effet, la semaine dernière,
Recep Tayyip Erdogan a comparé l’avortement à un meurtre, et plus précisément, à « un Uludere ». Le Premier ministre faisait allusion à la mort de 34 habitants du village d’Uludere (dans le sud-est de la Turquie) bombardé par erreur par l’aviation turque qui les avait pris pour des rebelles kurdes, en décembre dernier.
Mais ce n’est pas tout : selon Recep Tayyip Erdogan, l’avortement est aussi « un complot visant à saper la croissance économique de la Turquie ». Une affirmation à mettre en parallèle avec la récurrente injonction du Premier ministre, qui appelle les femmes à avoir au moins 3 enfants.
De son côté, le ministre de la Santé, Recep Akdag a affirmé que « L’avortement ne doit plus être considéré comme une méthode de contraception. On ne doit pas recourir à cet acte cruel si il n’est pas médicalement justifié ».
Cette situation polémique en Turquie n’est pas sans nous rappeler la volonté de Marine Le Pen de dérembourser l’avortement en France.
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Les Commentaires
On est d'accord, la condition de la femme est sous-évaluée, mise à rude épreuve, et les femmes, comme celles de Turquie, doivent se battre pour garder une dignité qui leur est normalement innée. Je ne comprends pas.