Edit, le 6 novembre 2012 – Alors qu’il était en ligne depuis 2010, le Dictionnaire des Écoliers a été fermé hier. Caroline de Haas, fondatrice d’Osez le féminisme et conseillère de la Ministre des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem aurait fait remonté l’information à cette dernière. Comme le souligne l’AFP, le site n’est que provisoirement fermé et réouvrira après une « révision du processus de validation par la CNDP », en plus de la « relecture et réécriture des définitions incriminées ».
Edit – Grâce à nos lecteurs et lectrices, nous avons appris que ce projet est en réalité un dictionnaire rédigé par des enfants lors de l’année scolaire 2010-2011. On peut d’ailleurs lire dans la présentation du projet l’explication suivante :
« Amis lecteurs, ce dictionnaire a été rédigé par des enfants des écoles maternelles et élémentaires au cours de l’année scolaire 2010 – 2011.
Cette œuvre lexicographique est le fruit de l’imagination et du travail de milliers d’élèves guidés par leurs maîtres.
En consultant ce dictionnaire, vous allez trouver des définitions et des exemples ; vous trouverez aussi des illustrations, des jeux, des poèmes.
Vous pouvez y chercher un mot précis, et voir comment les enfants le définissent, mais vous pouvez aussi vous laisser aller à flâner de mot en mot, au gré de l’alphabet ou porté par le hasard des rencontres.
Ce dictionnaire est vivant, riche déjà de plus de 17 000 définitions, il va s’enrichir encore au fil des années.
Alors, visiter et revisiter le dictionnaire des écoliers, c’est aller de rencontre en rencontre, c’est faire le chemin de trésors à découvrir. »
C’est donc, pour résumer, un dictionnaire élaboré par des enfants supervisés par leur enseignant-e, à destination des enfants. Je ne sais pas si ça change quelque chose à ce que vous pensez du résultat de l’initiative, mais je tiens malgré tout à m’excuser pour cette imprécision.
Plus tôt dans la journée – Vous savez ce qu’est une femme ? Je pose la question parce qu’apparemment, c’est pas trop trop clair dans la tête de tout le monde. C’est comme péremptoire ou peccadille, c’est des mots qui sonnent bien mais bon, au final, on sait pas forcément ce que ça signifie. J’veux dire, cornichon, c’est clair : c’est vert, ça se mange et ça pique un peu. Femme, c’est plus compliqué : des fois ça sent bon des fois pas, des fois ça parle des fois pas, et puis ça a plein d’organes à l’intérieur alors franchement, c’est le bordel pour s’y retrouver.
Pour aider les petits enfants de la République à s’y retrouver dans ce labyrinthe sémantique, le Centre National de Documentation Pédagogique, établissement sous la tutelle du ministère de l’Éducation Nationale, a eu une idée de génie : résumer tout un tas de mots et de notions en quelques phrases simples à comprendre dans un Dictionnaire des écoliers en ligne. On y trouve une partie avec des définitions à destination de la Grande Section de maternelle, une autre pour les CP-CE1, et une dernière pour les CE2 – CM1 – CM2. Bref, ce concept somme toute assez banal a intéressé quelques internautes qui se sont probablement dit quelque chose comme :
« Eh ! On nous parle mariage et adoption pour tous et parité ! Ce gouvernement fait des progrès dans l’ouverture d’esprit. Allons donc voir comment ils définissent le terme « femme », ça doit être si rafraîchissant. »
Et ils ont trouvé : dans le Dictionnaire des écoliers
pour les CE2-CM1-CM2, c’est une « personne adulte de sexe féminin ». Les synonymes (« épouse ou dame ») picotent un peu, mais c’est pas dramatique. En revanche, pour les CP-CE1, la femme est expliquée dans les termes suivants :
« C’est une maman, une mamie ou une jeune fille. Elle peut porter des bijoux, des jupes et des robes. Elle a de la poitrine.«
C’est rigolo. La phrase d’exemple n’est pas mal non plus :
« Miss France est la plus belle femme de France. »
Non parce que, attendez : « une femme, parfois, peut boire des bières » ou « un jour j’ai vu une femme qui faisait pipi debout », c’est moins élégant, ça parle moins.
Cette petite capture d’écran vient prouver ma bonne foi.
Et soudain, la révélation. Je comprends pourquoi je suis sur Terre : mon statut de représentante de la gent féminine me confère le droit – que dis-je – le devoir de donner la vie et de m’habiller de manière « féminine » (je savais pas trop ce que ça voulait dire non plus, mais féminin est illustré par la phrase « Cendrillon redevient féminine quand elle se retrouve dans sa belle robe pour le bal », du coup, ça va mieux). J’ai été mise au monde pour ça : enfanter ou donner du rêve avec mon physique. De préférence les deux. Sinon, j’échoue. Je m’en vais de ce pas me foutre un foetus dans l’utérus, j’y mettrai un peu de colle pour être sûre qu’il accroche bien aux parois. Non parce que, déjà qu’une femme « a de la poitrine » et que je me contente d’avoir des tétons, faudrait voir à faire pencher la balance du côté de la féminité autrement.
Et pour les hommes ?, me direz-vous. Eh bien l’homme a des poils. Si. Et j’y rajouterai personnellement que des fois, y a de la nourriture qui se met dedans et qui pourrit pendant des mois parce que les hommes sont moins propres que les femmes.
Par contre, là encore, les CE2-CM1-CM2 sont un peu mieux lotis. « Les personnes qui vivent sur la planète Terre sont des hommes ou des femmes » peut-on y lire en phrase d’exemple. Oui. Plein d’hommes et plein de femmes. Au gouvernement, parfois ils font des trucs bien, mais il faut avouer qu‘il leur arrive de temps en temps de prendre les plus jeunes enfants pour de gentils débiles.
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Les Commentaires
La définition de colonial n'est pas mal non plus... (et là, pour le coup, pas moyen que ça vienne directement des enfants)