Pour mémoire, voici le « crime » commis par les trois Femen :
Femen avait détaché 3 militantes à Tunis en soutien à Amina, la première Femen tunisienne. La jeune femme était elle-même menacée de poursuites pour avoir posté sur Internet une photo d’elle seins nus, arborant l’inscription : « Ce corps m’appartient, il n’est l’honneur de personne ».
Suite à cette action, on était resté plusieurs jours sans nouvelles de la jeune fille, avant qu’elle ne réussisse à prendre contact avec les Femen installées en France, au Lavoir Moderne.
Résumé des faits
Amina a été arrêtée le 19 mai, elle risque jusqu’à deux ans de prison pour profanation (elle avait inscrit « Femen » sur le mur d’un cimetière) ; elle a d’ores et déjà été condamnée à 150€ d’amende pour détention d’un spray d’auto-défense (selon Libération).
Depuis l’arrestation d’Amina, les actions de soutien menées par les Femen se sont multipliées. Trois militantes, deux Françaises et une Allemande, étaient allées à Tunis pour demander sa libération. L’action est typique du mode opératoire Femen : pas de violence, mais beaucoup de détermination et de fermeté dans la posture et les slogans criés par les activistes. Toutes trois ont été emmenées de force à l’intérieur du tribunal.
Elles ont été incarcérées en attendant leur procès, qui s’est ouvert le 5 juin dernier. Elles s’y sont présentées vêtues du sefsari, le voile blanc traditionnel. Plusieurs associations féminines islamistes portées partie civile avaient réagi à ce geste, accusant les 3 militantes de commettre « une atteinte à l’identité tunisienne ». En dépit du renvoi du procès au 12 juin, l’un des avocats des Femen était confiant : aucune des associations ne réclamait de prison ferme.
Elles ont ainsi passé deux semaines en détention provisoire en attendant leur procès pour finalement écoper de 4 mois de prison ferme chacune.
Un verdict disproportionné
Quatre mois de prison ferme est une sentence sévère, d’autant plus sévère si on la ramène au motif censé justifier cette peine : « atteinte aux bonnes moeurs et à la pudeur
». On peut penser ce que l’on veut du mode d’action des Femen, mais elles ne sont pas allées en Tunisie faire de la provocation gratuite : elles sont allées défendre une jeune fille menacée pour avoir revendiqué sur Internet la propriété de son propre corps. Et si l’on en croit l’oncle d’Amina, la jeune fille a effectivement besoin de tout le soutien qu’on pourra lui apporter.
Les trois Femen n’ont rien cassé, elles n’ont agressé personne, elles ont simplement manifesté leur soutien à Amina, selon leur mode d’action habituel et non-violent, seins nus.
Si le parti conservateur au pouvoir en Tunisie espérait calmer les ardeurs féministes par un verdict sévère, il y a fort à parier que cela risque au contraire de déclencher une nouvelle vague de protestations. Inna Schevchenko, leader des Femen en France, l’a d’ailleurs confirmé à L’Express. Elle commente le verdict :
« C’est une décision politique qui confirme le caractère dictatorial de la Tunisie pour qui il est plus simple de mettre des filles en prison que de reconnaître que les femmes ont le droit de disposer librement de leur corps. »
Une décision politique, c’est ce que semble confirmer un avocat islamiste, proche des associations religieuses ayant échoué à rejoindre les parties plaignantes :
« Cette sentence est le minimum qu’on aurait pu leur infliger. J’espère que cela servira de leçon aux Femen et à tous ceux qui chercheront à attaquer les valeurs de l’Islam. »
Pas sûr que « la leçon » ait été reçue, à en croire la réaction d’Inna Schevchenko (dans un entretien à Assiociated Press, repris par le Huffington Post) :
« S’ils croient qu’ils peuvent arrêter le mouvement de libération des femmes en jetant des filles en prison, c’est une des motivations principales de revenir en Tunisie avec davantage d’actions topless, d’aller dans d’autres pays musulmans. »
Plusieurs actions ont d’ores et déjà été menées par les Femen face aux ambassades tunisiennes notamment en France et en Suède.
Marguerite, Pauline et Josephine (source : page Facebook Femen France)
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Les Commentaires
Je parlais de ton discours au niveau des coutumes, relis moi, dans mon dernier message, je n'ai pas du tout dis qu'au niveau du droit tu faisais une distinction: je ne vois pas en quoi j'ai écrasé tes nuances: on est bien d'accord que la loi s'appliquent à tous.
Ce qui me chiffonne dans ton discours, c'est au niveau des coutumes: pourquoi tu expliques que par exemple le fait, en France, pour toi, cracher par terre est:
- acceptable si c'est le fait d'un Français (naturalisé ou non)
- pas acceptable si c'est le fait d'un étranger
(je prends ton exemple des Chinois, qui m'a un peu fait bizarre)
Désolé mais faire une distinction entre Français et étranger avec un truc qui, pour le coup, ne tombe pas sous le coup de la loi, mais est au niveau des coutumes, je ne sais pas comment tu veux qualifier ça en fait: établir une différence de traitement entre citoyen d'un pays et étrangers vivant dans ce pays (et à la défaveur des étrangers)
Pour moi, cracher n'est pas vraiment un truc que j'apprécie: donc si je ne considère pas cela acceptable pour l'un, je ne considère pas non plus cela acceptable pour l'autre.
Pour moi, la nationalité n'a rien à faire là-dedans! Je considère que le respect, c'est pour tous.
Ta pensée de légitimer une séparation entre Français/étrangers quand il s'agit des valeurs n'a choqué personne d'autre visiblement, chouette... désolé de penser que les citoyens de quelques pays que ce soit, doivent, dans un pays donné, être traités au même niveau, au niveau des coutumes, que les locaux, sinon on en vient à des valeurs inégalitaires basées sur Soi vs l'Autre: j'ai plus de droits, moi local, que l'Autre (je ne parle pas des droits basés sur la Loi mais sur la coutume).
J'imagine bien que tu n'es pas xénophobe, mais franchement, relis ton exemple sur les Chinois et la manière dont tu catégorises Français/étrangers avec ce qui est acceptable/pas acceptable.
Instaurer une inégalité entre Français et étrangers au niveau des moeurs, mouaip, tu comprends bien j'imagine pourquoi ça ne m'emballe pas? Ce à quoi ce genre de choses peut mener?
Je le redis, ce discours, à peine instrumentalisé, permet de justifier tout et n'importe quoi sans même avoir besoin de le pousser un peu, j'ai donné assez d'exemples là-dessus.
Si je te suis, j'imagine donc que si les étrangers vivant en France, parfois depuis 20 ans, se voient interdire dans un futur proche de porter une djellaba dans la rue, c'est normal pour toi et tout à fait justifier par cette opposition Français/étrangers au niveau des coutumes françaises à respecter.
(Et pour le coup si tu n'es pas d'accord avec cette idée, je ne vois pas pourquoi ton exemple des Chinois de Chine/naturalisés tiendrait)