Le débat existe depuis des années : le congé maternité devrait-il être allongé ? Si pour certaines personnes qui viennent d’accoucher, le fait de retourner travailler seulement quelques semaines après est un crève-cœur, pour d’autres, ce retour à l’activité peut être salutaire.
Mais, quand bien même le congé maternité a une durée relativement courte en France, faut-il vraiment le voir rallonger, comme le demande par exemple cette pétition désormais présente sur le site de l’Assemblée nationale ?
Allongement du congé maternité, pour quoi faire ?
En France actuellement, les personnes qui viennent d’accoucher et qui sont salariées retournent travailler deux mois et demi — soit 10 semaines — après la naissance de l’enfant. Cette période est en effet assez courte. Notamment pour séparer le bébé de sa figure d’attachement, mais aussi parce que, si allaitement il y a, c’est généralement le moment où les choses se mettent en place et ou la fréquence des tétées atteint son rythme de croisière. Par ailleurs, au bout de 10 semaines, la mère est généralement encore épuisée, l’accouchement étant tout frais, sans compter le fait que le post-partum peut être très difficile à gérer.
Enfin, face à l’avalanche d’arguments complexant et culpabilisant à l’égard des mères qui retournent travailler, tels que « tu vas le laisser à une nounou/à la crèche si jeune ? » ou « tu n’as pas peur qu’il t’oublie ? » ainsi qu’ « un bébé a besoin de sa mère », nombreuses sont celles qui repartent bosser l’âme en peine et le cœur en miette.
En réalité, si la demande d’allonger le congé maternité peut partir d’une bonne intention, c’est surtout une fuite en avant qui ne ferait que renforcer les inégalités déjà existantes.
Ce n’est pas le congé maternité qu’il faut allonger
Dans un monde idéal dans lequel la société serait pensée différemment, le co-parent pourrait avoir un véritable congé allongé, ce qui serait en l’occurrence vraiment utile. Si le congé parental était correctement rémunéré, si de nouveaux modes de gardes étaient créés permettant une reprise sereine du travail, et que la mère n’était pas « obligée » de prendre un congé parental faute de place en crèche (ce qui se produit régulièrement), si la société dans son ensemble était mieux adaptée aux mères et aux parents, on n’en serait pas là.
Allonger le congé maternité pourrait être une bonne chose pour certaines, qui s’épanouissent dans ce rôle et l’embrassent pleinement. Pour d’autres en revanche, cela pourrait être un véritable gouffre psychologique. Ces dernières se retrouvant seules à la maison avec un bébé, la fatigue s’accumulant, aliénées par les tâches du quotidien et la charge mentale qui repose presque essentiellement sur les mères… N’oublions pas que le congé maternité n’a de « congé » que le nom, et n’oublions pas non plus que le suicide est la deuxième cause de mortalité des nouvelles mères en France.
Allongement du congé maternité, le débat est ailleurs
Le débat ne devrait pas, à l’heure actuelle, être celui de l’allongement du congé maternité, puisqu’il impliquerait qu’encore une fois, seules les mères sont en charge des enfants qui naissent, et qu’elles devraient avoir plus de temps pour les élever. Il est ailleurs : il faut une refonte du congé paternité et du congé parental, du congé qui se partage vraiment, qui est équitable et juste, pour que les femmes ne soient plus les seules cantonnées à la maison à la naissance de l’enfant. Il faut que les congés parentaux soient retravaillés complètement, pour qu’ils puissent s’adapter, avec flexibilité, aux besoins des parents.
Cette pétition qui demande l’allongement du congé maternité, bien que partant probablement d’une bonne intention, fait peser une pression supplémentaire sur les femmes, en voulant les enfermer des mois supplémentaires dans un rôle, une mission, qu’elles pourraient partager de façon égalitaire.
Les mères ne doivent plus être les seules à être responsables du foyer, il en va de leur santé mentale et physique. Dans une société que l’on sait patriarcale et qui doit changer, il est primordial que les relais leur étant proposés, par le co-parent ou la société, soient concrets et pérennes, et qu’une véritable refonte soit faite de toute urgence. Arrêtons de tout mettre sur le dos des mères, il n’y a plus de place.
Crédit photo image de une : Getty Images
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