À 20 ans, je voyais l’épilation comme un passage obligé avant chaque nouveau rendez-vous amoureux qui pouvait potentiellement finir sous la couette.
Un date qui se planifiait à la dernière minute ? Je cherchais alors frénétiquement un rendez-vous d’urgence pour ratisser le moindre follicule qui osait pousser. Tout y passait : le duvet à peine visible au-dessus de mes lèvres et autour de mon nombril, la touffe de mon pubis, et même les quelques poils qui se battaient en duel sur mes avant-bras !
Le problème n’était pas tant le recours à l’épilation, chacun faisant bien ce qu’il veut de son corps, mais le fait d’y voir une obligation, un rite de passage inévitable pour plaire à mon ou ma partenaire.
Et même si je laisse maintenant mes poils s’épanouir où bon leur semblent, lorsque je me dévêtis devant quelqu’un, il m’arrive encore de me demander si je dois lui faire un disclaimer pour éviter la surprise. Vous le savez, je suis loin d’être la seule…
Le dictature du glabre
Influencée par le porno et un cocktail de normes toutes plus sexistes voire criminelles les unes que les autres, la société s’est habituée au glabre chez les femmes. Tout au mieux, le ticket de métro — aussi entretenu que la pelouse du Stade de France — est toléré.
Si dans une récente étude menée en 2020 et 2021 l’Ifop révèle que 28% des Françaises déclarent pratiquer le « No Shave » (contre 15% en 2013), l’épilation intégrale ne faiblit pas. Parallèlement, le minou imberbe progresse chez les femmes qui subissent toujours une « une pression à l’invisibilité pileuse ».
D’après la même étude, l’injonction à l’épilation intégrale est « deux fois plus pesante pour les femmes (32%) que pour les hommes (14%) » et « 24% des sondées optent pour un maillot intégral contre 14% en 2013 ». Pas étonnant, quand on connaît les diktats qui pèsent sur les femmes, mais désolant, quand on sait que se débarrasser des poils pubiens augmente le risque d’IST…
« Désolée, je ne suis pas épilée »
La tendance est donc au poil, mais les normes et les insécurités sont un frein.
D’après les chiffres de l’Ifop, les femmes s’épilent les poils pubiens par esthétisme (38%), pour faciliter le sexe oral (26%), parce qu’elles aiment les sensations sans poils (27%) ou bien parce qu’elles veulent coller aux préférences de leur partenaire (19%).
Il y a celles qui ne s’épilent pas exprès pour s’empêcher de coucher, comme si les poils étaient un pare-feu contre de potentiels rapports sexuels, un tue-l’amour utilisé comme tactique d’abstinence ; celles qui s’excusent platement quand elles ne sont pas rasées de près ; celles qui se déshabillent en silence, rongées par l’anxiété, en attendant avec crainte la réaction de leur partenaire face à leur touffe ; celles qui ont renoncé à l’épilation mais qui retombent dans les bandes de cire pour ne pas froisser leur partenaire.
« Une fois, je me suis empêchée de coucher avec un mec, même si j’en avais très envie, juste parce que je n’avais pas eu le temps de m’épiler le maillot », confie Julia, 27 ans et consultante en marketing, à Madmoizelle. Une pensée confirmée par les tendances actuelles, puisque l’Ifop déclare que plus d’une femme sur dix a déjà refusé d’avoir un rapport sexuel pour cette raison.
Cette pression que se mettent les femmes ne vient pas de nulle part : « 61% des Français sont d’accord avec le fait qu’une femme doit toujours être impeccablement épilée au niveau des aisselles », selon l’étude, et « un tiers des hommes (32%) préfèrent l’épilation totale des poils pubiens chez les femmes ».
« Je trouve pas ça féminin du tout »
Les lignes bougent, mais il arrive encore que certaines femmes essuient des remarques sur leur pilosité une fois dévêtues. « Sale », « étonnant », « rédhibitoire »… Certains partenaires sexuels n’ont pas leur langue dans la poche, mais la gardent soudainement pour eux quand il s’agit de l’utiliser pour le sexe oral sur des personnes non épilées.
Les femmes de moins de 34 ans seraient 29% à avoir déjà été sommées de s’épiler les poils pubiens par leur partenaire. « Je sais que c’est moyen, mais j’y peux rien, les poils ça me rebute et ça me coupe toute envie, je trouve pas ça féminin du tout », nous raconte Antoine, 31 ans, sans la moindre gêne.
Chacun fait fait fait c’qu’il lui plaît plaît plaît
S’il est évidemment possible de parler de nos préférences à son ou à sa partenaire, ou de discuter de ses habitudes et appréhensions, chacun et surtout chacune doit se sentir libre de disposer de son corps, et de ses poils.
Heureusement, certains commencent à percuter, d’autres y prennent même goût : « 70% des hommes seraient prêts à passer outre le fait que les poils pubiens de leur partenaire soient à l’état brut », rapporte l’Ifop.
« La première fois que j’ai fait l’amour avec mon mec, je n’étais pas épilée. J’étais stressée, mais il n’a pas eu l’air choqué et m’a même complimentée et m’a dit qu’il trouvait ça sexy ! », explique Julia.
Pour répondre à la question que cet article pose : vous ne devriez en aucun cas vous sentir obligée de prévenir votre partenaire sexuel des quelques poils sous vos bras ou entre vos jambes. Et encore moins tout ratiboiser par peur de sa réaction ! Le mieux, c’est toujours d’en parler en amont si vous en ressentez vraiment le besoin, mais « votre corps, votre choix ». Souvenez-vous : le plus important, c’est que vous vous sentiez bien dans votre peau, et que votre partenaire vous accepte comme vous êtes, poilue ou non.
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Crédit photo : cotton bro / Pexels
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