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Faut-il considérer les incels comme de potentiels terroristes ?

Après la fusillade meurtrière de Plymouth, l’Angleterre s’interroge sur la manière de considérer les incels, ces « célibataires involontaires » qui haïssent souvent les femmes. Les attaques menées par des membres de cette sous-culture misogyne se sont multipliées ces dernières années.  

La misogynie tue. Le 12 août dernier, Jake Davison, 22 ans, a tiré sur cinq personnes avant de se donner la mort à Plymouth, une cette cité portuaire du sud-ouest de l’Angleterre. En six minutes, il a commis la pire tuerie de masse en dehors des attentats perpétrée dans le pays depuis 2010 (12 morts dans une fusillade à Copeland).

Les investigations sur le mobile de l’attaque sont encore en cours mais les activités en ligne de l’auteur du massacre suggèrent qu’il était proche de la communauté des « incels », les « célibataires involontaires »

Depuis plusieurs années, cette sous-culture sexiste et misogyne est associée à plusieurs actes de violences et tueries. D’après le journal The Independent, l’Angleterre pourrait bientôt considérer officiellement les incels comme des terroristes, si d’autres attaques similaires à celle de Plymouth devaient avoir lieu.

Qui sont vraiment les incels ? 

Le mot « incel » est la contraction de l’expression « involuntary celibate », pour « célibataire involontaire ». Il désigne des hommes hétérosexuels qui ne parviennent pas à avoir de relation amoureuse ou sexuelle et tiennent souvent les femmes pour uniques responsables de leur célibat.

Ils se retrouvent en ligne pour partager leur peine, mais aussi leur frustration, répandre leur haine des femmes ou, dans certains cas, pour appeler à la violence. Le principal forum incel compterait près de 13.000 membres, selon Florence Keen, qui mène des recherches sur le sujet au Centre international d’étude de la radicalisation du Kings College de Londres. 

En 2014, le grand public découvrait l’existence de cette sous-culture après l’attaque d’Isla Vista, Californie, par Elliot Rodger. Cet incel auto-proclamé avait abattu six personnes avant de se tuer dans un acte qu’il avait décrit comme « sa guerre contre les femmes » qui ne voulaient pas de lui.

Un tournant pour les incels, qui ont érigé Rodger en « héros », selon Tim Wilson, directeur du Centre d’étude du terrorisme et de la violence politique à l’université de St Andrews.

En 2018, un autre incel, Alek Minassian, a tué dix personnes dont huit femmes en fonçant sur elles avec sa camionnette, à Toronto. Une fusillade perpétrée dans un club de yoga en Floride par Scott Beierle, misogyne notoire, avait aussi fait deux morts. 

Ces attaques interrogent sur la dimension intrinsèquement violente du phénomène incel :

« La mise en garde que je fais toujours est que l’on ne peut pas dire que l’ensemble de la sous-culture incel est violente, cela varie vraiment. Certains glorifient la violence tandis que d’autres [dans ces forums] disent “ce n’est pas ce que nous sommes”. »

Florence Keen à la BBC

Terroristes ou pas terroristes, telle est la question 

L’ombre incel qui plane sur la tuerie de Plymouth a ouvert un débat en Angleterre pour savoir comment considérer les membres de cette communauté. L’examinateur indépendant de la législation sur le terrorisme au Royaume-Uni, Jonathan Hall QC, a ainsi déclaré à la BBC :

« La question est vraiment de savoir si les autorités veulent ou non traiter le phénomène incel comme un risque terroriste. Cela impliquerait de détourner des ressources ou d’y consacrer des moyens. [..] Si nous voyons plus d’attaques de ce genre, alors je n’ai aucun doute que cela sera traité plus sérieusement comme du terrorisme. » 

Traiter les incels comme des terroristes pourrait, dans les faits, conférer plus de pouvoir aux autorités pour enquêter : « Vous avez alors d’autres options qui s’offrent à vous en matière de collecte de renseignements, de poursuites judiciaires pour diffusion de matériel, de possibilités de les tenir pour responsables s’ils complotent les uns avec les autres », a expliqué à la BBC Nazir Afzal, l’ancien procureur en chef au Crown Prosecution Service pour le nord-ouest de l’Angleterre.

Mais pour l’instant, « ce n’est pas l’intention du gouvernement », indique Jonathan Hall. 

En juillet dernier, Caroline Dinenage, la ministre britannique du Numérique et de la Culture, était interrogée sur le projet de loi relatif aux préjudices en ligne pour savoir s’il prendrait en compte le phénomène incel. Elle avançait :

« Le projet de loi rendra beaucoup plus clairs les liens entre ce que les entreprises en ligne disent faire et ce qu’elles font réellement, et les femmes seront mieux soutenues pour signaler les abus et devraient s’attendre à recevoir une action appropriée et rapide de la part de la plate-forme. »

Plus qu’un débat, les femmes attendent des actes. 

À lire aussi : L’aspect terroriste de l’idéologie « incel » reconnu par la justice pour la 1ère fois

Crédit photo : Zachary DeBottis / Pexels


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Les Commentaires

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Avatar de Aesma
19 août 2021 à 23h08
Aesma
Je suis étonnée qu'il n'ait fait nulle part mention de la tuerie de l'École Polytechnique de Montréal qui a eu lieu en 1989, un mascu avait assassiné 14 femmes avant de se donner la mort et avait laisser une lettre d'adieu ambiance "Ouin ouin les féministes ont ruiné ma vie", d'ailleurs ce vieux mec est devenu une icône dans cette communauté nauséabonde.
Mais oui du coup les féminicides de masse ne datent pas d'hier (et je ne compte même pas la chasse aux sorcières) il serait temps de considérer ces mecs comme ils se doivent.
C'est d'ailleurs incroyable de voir comme on est prompt à qualifier de terroriste une personne racisée mais comme on devient frileux lorsqu'il s'agit de mecs blancs - d'ailleurs y a pas que les mascus, actuellement on observe une recrudescence des attentats d'extrême droite donc y a aussi le racisme qui entre beaucoup en compte.
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