Depuis quelques saisons, la maison Courrèges s’impose de plus en plus sur le devant de la scène mode. Et ce, grâce à son directeur artistique, Nicolas di Felice, qui réinterprète avec succès les lignes space-age imaginé par André Courrèges il y a 60 ans.
Nicolas di Felice résout la quadrature du cercle pour le défilé Courrèges automne-hiver 2023-2024
Nicolas di Felice est sorti diplômé en 2008 de la Cambre (école de mode belge), avant de faire ses armes de 2008 à 2014 chez Balenciaga (époque Nicolas Ghesquière), de 2014 à 2015 chez Dior (circa Raf Simons), puis de 2015 à 2020 chez Louis Vuitton (où il a retrouvé Nicolas Ghesquière). Nommé en 2020 à la direction artistique de Courrèges, il y aiguise désormais son esthétique très belge, au service de l’amour de la géométrie sixties de la maison française.
Nicolas di Felice a ainsi travaillé la forme du cercle (central dans l’ADN de la maison) à toutes les sauces. En forme de découpe (en pleine poitrine, ou pile autour du nombril, par exemple), de maxi pendentifs, de collier miroitant, ou encore pour courber la forme globale du vêtement. En effet, le corps et les manches des vêtements semblaient arrondis, et se fendaient au niveau des flancs afin de pouvoir être portés en cape.
Outre cette belle résolution du problème de la quadrature du cercle, Nicolas di Felice a proposé pour la scénographie une forme de commentaire sur l’addiction de plus en plus partagée aux smartphones. En effet, la première mannequin est arrivée sur le podium les yeux rivés sur son téléphone, rétro-éclairant son visage (« Visage rétro-éclairé, tu regardes tes pouces pas tes pieds », comme chanterait Yelle dans « Coca sans bulles »). En bande-son, une voix d’intelligence artificielle façon Siri répétait en boucle : « Le ciel est-il bleu ? » Jusqu’à ce que, pour la clôture du défilé, la voix a fini par conclure : « Le ciel est bleu. Est-ce que tu me vois ? Je te vois. »
Travailler le reflet (de la lumière et des autres) comme une matière
La palette de couleurs comportait peu de bleu, en l’occurrence : la quarantaine de looks déclinait les nuances de gris, hormis deux en plein milieu. D’abord, un total look rouge composé d’un body seconde peau, avec une découpe pour le nombril, un col montant et des manches mitaines en matière transparente (ce qu’on surnomme déjà le naked top, tendance forte de l’année 2023), sous une jupe ajustée longueur cheville et des bottines en cuir. Puis un total look rose poudré : une robe à manches mitaines, encolure bateau et découpe pour le nombril, complètement transparente, mais porté sur un pantalon pour opacifier les jambes, et donc devenir beaucoup plus portable pour le commun des mortels.
Mais la dernière couleur utilisée par Nicolas di Felice pour ce défilé Courrèges automne-hiver 2023-2024 était sans doute la lumière elle-même puisque les pendentifs en forme de cercle que portaient les mannequins pour les looks finaux la reflétaient si bien (un projecteur était braqué dessus) qu’un rayon éclatant paraissait émaner de leur poitrine et refléter les autres. De là à se dire que, lorsqu’on daigne lever la tête de son smartphone pour regarder droit devant soi, la lumière jaillit de soi, il n’y a qu’un pas. Brillant.
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