« Fake it until you make it » signifie littéralement : fais semblant jusqu’à ce que ça passe, jusqu’à ce que ça marche.
Dans l’esprit, ça veut surtout dire que toute nouvelle situation est potentiellement inconfortable, et en attendant que la persévérance produise ses effets, souris et fais semblant que tout va bien.
Adopte une attitude positive, cela ne peut que t’aider à te sentir mieux. Jusque là, c’est un excellent conseil.
C’est, par exemple, le credo d’une jeune cadre dynamique projetée dans un nouvel environnement de travail, dont elle ne maîtrise pas les codes.
Avant qu’elle ne prenne ses marques et qu’elle ne trouve ses aises dans ce nouveau monde, elle peut d’ores et déjà feindre l’aisance.
Ce faisant, elle donnera l’impression d’être à l’aise (même si elle ne l’est pas), ce qui lui laissera le temps d’acquérir l’aisance nécessaire au fil de l’eau, sans commencer par donner l’impression d’être complètement perdue à son poste (même si c’est le cas).
Fake it et ne panique pas
« Fake it until you make it », ça veut dire : ne panique pas, si tu te retrouves loin de ta zone de confort. A priori, si t’es là, ce n’est pas par hasard, donc tu dois avoir en toi ou autour de toi les atouts nécessaires pour retrouver ton confort dans cette nouvelle zone.
En cela, « Fake it until you make it » est un excellent conseil. Avant de se dire « je suis nulle, j’arrive à rien, ça va se voir et on va se moquer de moi/me virer », ça vaut effectivement le coup de garder son calme quelques temps, en évaluant plus précisément ce qui est attendu, si on en est capable ou non, et pourquoi.
Mais « Fake it until you make it » est un conseil comportemental, pas une philosophie de vie. J’ai été amenée à me sentir en parfaite imposture à plusieurs reprises dans ma vie.
Mon but à ces moments précis était alors de chercher à comprendre quelles compétences me faisaient défaut pour ne plus avoir le sentiment d’être incapable.
Pour réussir, Fake it ne suffit pas
Faire semblant d’être à l’aise est une mesure cosmétique qui aide à traverser une zone de turbulences, ce n’est pas une solution de long terme.
Entendons-nous bien : tu peux faire semblant d’être à l’aise toute ta vie. Ça t’amènera à rester très superficiel·le dans l’approche de tes sujets, de tes problématiques, et ça ne t’apprendra pas à affronter la difficulté, la déconstruire, la comprendre, la dépasser.
Faire de « Fake it until you make it » son principal credo, c’est prendre le risque de s’enfermer dans la spirale de l’imposteur :
- Je ne suis pas à l’aise dans cette situation
- Je fais semblant, ainsi personne ne remarquera que je galère.
- Je ne demande aucune aide donc je n’en reçois aucune, et je ne suis toujours pas à l’aise dans la situation…
- …Mais je fais semblant, donc personne ne remarque que je galère, ETC.
« Fake it until you make it » est censé te procurer une attitude confiante, le temps :
- D’analyser la situation qui te fait ressentir autant de malaise, de manque d’assurance et de confiance
- D’identifier les problèmes que tu rencontres et de les hiérarchiser (je ne suis pas formée à telle ou telle tâche, je ne possède pas telle ou telle compétence, je n’ai pas accès à tel type d’informations, etc).
- Et enfin : de chercher ou de demander de l’aide.
Tu ne peux pas accéder à la partie « make it » de l’expression, c’est-à-dire à la réussite, uniquement en faisant semblant.
Tu peux donner l’illusion de réussir, car tu arrives à donner l’illusion d’être à l’aise : c’est facile. Mais il y a un monde entre travailler, progresser, réussir, et projeter un semblant de réussite.
« Fake it until you make it », le remède des imposteurs ?
« Fake it until you make it » est le credo des personnes atteintes du syndrome de l’imposteur : ce réflexe qui consiste à douter de ses capacités
lorsqu’on est placé dans une situation nouvelle, ou face à un challenge.
Parfois, ce sont les autres qui nous font douter, mais le résultat est le même : je me sens incompétente à ma place, je me sens en échec, ce qu’on attend de moi est trop dur, je ne vais pas y arriver.
« Fake it until you make it » est un moyen de gagner du temps en attendant que je reprenne mes esprits et que je mette à plat les difficultés réelles que je rencontre, en dehors de mes propres barrières mentales ( de type « je suis bonne à rien »).
Ce n’est pas, et ce ne sera jamais un remède à l’incompétence, seulement à l’illusion de l’incompétence, que tu entretiens peut-être comme une excuse pour ne pas essayer, ou encore une défense contre la peur de l’échec (ou celle de réussir).
Le « Fake it until you make it » dévoyé : un piège à bonnes élèves
J’écrivais il y a quelques semaines sur le syndrome de la bonne élève, qui consiste à toujours attendre les règles à suivre avant d’oser agir par soi-même.
À force de brandir le « Fake it until you make it » comme un super conseil contre le syndrome de l’imposteur, ce credo finit par piéger les bonnes élèves dans l’idée que demander de l’aide serait une faute.
Or le meilleur conseil à se donner n’est pas « apprends à te débrouiller seule et entretiens l’illusion en attendant que ça marche ».
C’est plutôt : « ne panique pas si tu te sens paumée, mets à plat ce qui te pose problème et pendant que tu cherches les solutions, avec l’aide éventuellement nécessaire, montre que tu ne te laisses pas déstabiliser à la première difficulté. »
« Keep Calm and Ask Questions » : mon parachute d’urgence
« Fake it until you make it » ne devrait jamais être un reproche entre anciennes petites filles sages : il n’y a pas de honte à dire « je ne sais pas faire ça », ou « j’ai besoin d’apprendre telle ou telle compétence ».
C’est une manière d’avancer dans la vie, apprendre, et notamment apprendre des autres.
Alors, rends-toi service : si tu comptais réussir tes études et/ou ta future carrière professionnelle grâce au credo « Fake it until you make it », il est encore temps de changer de disque.
Personnellement, je lui préfère « keep calm and ask questions » (Reste calme et pose des questions), qui t’emmènera bien plus loin dans la vie.
Tu peux garder « Fake it until you make it » comme un conseil ponctuel, pour éviter une panique inutile.
Son équivalent français serait alors plutôt « en cas d’urgence, brisez la glace », et la suite devrait être : et demandez de l’aide !
À lire aussi : Sister Sister — Le syndrome de l’imposteur 2/2
BONUS — Défoncer le syndrome de l’imposteur
Éliminer son syndrome de l’imposteur fait gagner 10 000 points de vie (minimum).
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