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Pour ou contre le blocage des facs ? Des madmoiZelles étudiantes témoignent

Les facs bloquées font couler beaucoup d’encre un peu partout. Dans toute cette cacophonie, Juliette a tenu à savoir ce que vous, lectrices et lecteurs de madmoiZelle, vous pensez de ce mouvement. Voici une sélection des témoignages reçus.

Le blocage des facs, je n’en avais pas encore parlé sur madmoiZelle. En revanche, j’ai déjà abordé la loi ORE dans un articles, à lire ci-dessous.

La réforme d’accès à l’université, ses risques et les critiques

Avant de donner la parole aux madmoiZelles qui ont répondu à notre appel à témoins, un bref état des lieux de la situation.

Facs bloquées, on en est où ?

Dès février 2018, des premiers signes de contestation étudiante envers la loi ORE ont commencé à émerger.

Le mouvement a pris de l’ampleur en mars 2018, et a atteint son pic en avril, avec neuf universités bloquées sur le territoire.

Le Monde tient une carte des établissements bloqués dans cet article, publié le 4 avril et régulièrement mis à jour. Libération s’est également prêté au même exercice.

Sur 70 sites universitaires, moins d’une vingtaine étaient perturbés, dont 4 seulement totalement bloqués à la mi-avril, selon Europe 1.

Parmi les facultés bloquées en France, on compte celles de Montpellier, Strasbourg, Toulouse, Science Po Paris (où le blocage a depuis été levé).

Le campus de La Sorbonne basé à Tolbiac fait partie des facultés où l’engagement et la mobilisation ont été les plus médiatisés. L’établissement situé dans le 13e arrondissement de Paris a été évacué vendredi 20 avril.

Si tu veux tout comprendre depuis le début, je te conseille ce court article du Monde.

Pour ou contre le blocage, et pourquoi ? Vos avis !

Aujourd’hui, ce sont les mad qui donnent leur propre point de vue sur le blocage des facs.

Vous avez été une trentaine à répondre à mon appel à témoins, publié le 18 avril, merci beaucoup pour votre participation !

Voici donc une sélection des témoignages que j’ai réceptionnés. Je ne les citerais pas tous, car certains avis se recoupent.

J’ai choisi de mettre en lumière ceux-ci, ils illustrent fidèlement la diversité des opinions exprimées sur la question des facs bloquées.

Sophie*, 19 ans en Licence 1

Ma fac est bloquée depuis la rentrée de mars. Il y avait encore à ce moment là des jours de cours et d’autres non, mais depuis 3 semaines un peu près, plus aucun cours n’est assuré.

Je suis contre le blocus, pas parce que je suis contre la loi de sélection, mais parce que le blocus nuit à notre volonté d’étudier.

De plus, les AG sont pour ceux qui sont contre la loi, qui ont la même vision qu’eux.

Mais dès que quelqu’un s’interpose pour poser des questions, les contredire, ils se font insulter de fachos et bien d’autres choses…

Une Assemblée Générale c’est, en théorie, une réunion durant laquelle les étudiant·es sont invité·es à s’exprimer et à voter de manière démocratique autour des actions à venir liées au blocus et aux revendications du mouvement (manifestation, pétition, durée du blocage…)

Autre exemple, une fille a préparé un discours écrit pour défendre son droit d’étudier. Elle a été insultée de bien des choses, mais surtout de « privilégiée ». Et c’est un terme qui revient beaucoup.

Pour lutter contre les blocages, à part aller en AG pour voter contre les blocus, il n’y a pas grand-chose à faire. Cependant, le problème c’est que leurs AG étaient en pleine journée donc pas moyen d’y aller sans rater le peu de cours que nous avions.

Dernièrement, il y a deux semaines environ, des profs et des élèves (dont je faisais partie) se sont réunis pour manifester passivement devant la salle où se tenait l’AG avec nos livres et des fleurs, pour avoir ce droit d’étudier.

Quel est mon quotidien aujourd’hui ?

Depuis que la fac est bloquée, je tourne en rond en attendant d’avoir des nouvelles, mais désormais, il est clair que les contrôles continus ne seront pas maintenus (les profs croisent les doigts pour que ce soit reporté en mai avec les partiels).

Maintenant, je continue à bosser, je finis des séries, mais je compte rentrer chez mes parents et revenir en mai, car il n’y a plus grand chose à faire.

J’espère cependant que les partiels seront maintenus. Il est prévu qu’ils se déroulent dans les gymnases mais comme ils sont à côté de la fac, les bloqueurs peuvent très bien bloquer cette partie également.

Elise, 23 ans et en master 2

Je suis étudiante niveau M2 et cette année, je prépare l’agrégation, a.k.a un des concours pour devenir enseignante.

Du coup, étant amenée à enseigner plus tard au lycée ou dans des formations post-bac, je me sens concernée par la loi ORE, en tant qu’étudiante comme en tant que future prof.

Je suis contre Parcoursup, contre la loi ORE, et pour le blocage des facs ! Et je tenais à rappeler que le blocage des facs, ça vient aussi des enseignant·es qui font aussi blocus en refusant de participer à la loterie parcoursup et à la sélection des dossiers.

Moi personnellement, le blocage ne m’arrange pas, je n’ai pas le temps pour y participer, et c’est compliqué de me préparer sereinement au deuxième tour de mon concours dans ces conditions, mais je ne peux pas décemment être contre. Je les soutiens de tout mon coeur !

La loi ORE, je suis contre.

Ça complique mon année, mais si la loi passe, c’est toute ma future profession qui en sera impactée.

Quand on décide de devenir enseignant·e, c’est pour essayer de transmettre un savoir, de donner le goût d’apprendre à celle et ceux qui ne l’avaient pas.

Pour se sentir un peu utile auprès de ces jeunes (qui pour une partie ont pratiquement le même âge que moi, je sais). Pas pour remplir des dossiers et passer des heures sup non payées à naviguer dans une jungle de paramètres et d’algorithmes absurdes.

Si la loi passe, on sait très bien qu’on aura le temps ni de lire attentivement tous les dossiers (côté fac), ni de remplir tous ces critères d’évaluation des lycéens. Et qu’est-ce qu’on fera de celle et ceux eux qu’on n’a pas le temps d’aider pour leur lettre de motivation ?

Quand on suit des formations pour devenir prof, on sait que ça ne va pas être facile, qu’il y aura des élèves en difficulté, à la traîne, déprimé·es, désintéressé·es, mal orienté·es. Mais ce n’est pas la loi ORE qui va nous aider à gérer ça.

Ce qui peut nous aider ? Des fonds, une plus grande autonomie et la plus grande cohésion possible au sein des équipes pédagogiques et des établissements.

Pour atteindre cette cohésion, j’estime qu’il est nécessaire de soutenir toutes celles et ceux qui souhaitent y participer, à leur échelle : lycéen·nes, étudiant·es, profs, par des manifs, des blocages de fac, des universités ouvertes, des communiqués sur les réseaux sociaux, (d’ailleurs j’ai adoré le programme de l’université ouverte de Paris 8 : cours de géo avec une cartographie des mobilisations, cours d’info-com avec une étude critique des médias…)

J’ai pas envie d’avoir honte me mon métier !

Alexia, 22 ans en licence 2

Je m’appelle Alexia et j’ai 22 ans. J’ai d’abord fait une licence de psycho avant de recommencer un cursus. Me voila donc en deuxième année de licence de littérature anglophone à l’université de Nanterre dans la région parisienne.

Je suis contre la loi ORE

La loi sur la réforme à l’université est une aberration à mes yeux. Nous vivons aujourd’hui dans une société d’ores et déjà remplie d’inégalités, selon moi cette loi ne fait que les institutionnaliser, aux yeux de tous.

Alors que notre système éducatif pouvait, à une époque, se vanter d’être ouvert à tous, il deviendra bientôt inaccessible aujourd’hui, ne serait-ce qu’économiquement parlant.

Pour moi, cette loi va encourager les universités à favoriser une certaine élite avec des dossiers qui satisferont leurs attentes. Les universités seront vouées à être encore plus en concurrence qu’elles ne le sont aujourd’hui.

On nous parle de CV et de lettres de motivation, pour des jeunes de 17 ans n’ayant probablement jamais travaillé, ou très difficilement s’ils n’ont pas de liste de contacts à leur portée.

Certains auront de l’aide familiale, lorsque d’autres n’en auront pas, les parents ne possèdent parfois pas la capacité de satisfaire les normes attendues. Pour moi, c’est simple : cette réforme va empêcher une certaine population, une certaine classe sociale d’aspirer à faire des études supérieures.

Elle supprime un choix pour des milliers de jeunes. L’université n’est pas faite pour tous et ne doit pas être l’unique voie mais elle ne serait désormais même plus envisageable.

Des jeunes seraient à la fois systématiquement refusés, mais aussi tout simplement ne seraient même pas encouragés à croire en eux.

Mon avis sur le blocus

Je participe au blocus de mon université, depuis le lundi 16 avril.

Le blocus n’est bien évidement pas une situation idéale et par définition possède des aspects négatifs. Cependant, la mobilisation autour de la contestation de cette loi a lieu depuis de nombreux mois, mais rien n’a fonctionné. Des solutions plus douces ont été utilisées, sans résultat.

Le blocus est de ce fait, le moyen le plus efficace pour avoir une chance de faire reculer le gouvernement.

Il est important de comprendre que les personnes bloquantes ne sont pas une minorité et ne sont certainement pas des personnes extérieures, anarchistes, et ne voulant pas passer les examens.

Nous sommes des étudiants de Nanterre, des étudiants motivées et pour une majorité avec de bons résultats. Nous avons la chance d’être ici et de faire ce qui nous plaît, de nous épanouir au sein de cette université.

Elle est un lieu d’apprentissage, de rencontre, de développement personnel.

Aujourd’hui, je suis plus fière que jamais d’être une étudiante sur le campus de Nanterre Paris 10.

Depuis le début du blocage, il existe une atmosphère profondément paisible de partage et de communauté. Nous sommes tous ici pour un même but : nous battre pour un idéal, pour une éthique, pour l’égalité.

Les médias décrivent des universités dans le chaos, dégradés, avec des bloqueurs hostiles. Ici, chacun est reçu avec bienveillance. Le dialogue est maître. Tous les jours, nous informons des étudiants qui ne comprennent pas ce qui se passe, et je viens personnellement leur répondre : pourquoi la fac est bloquée, quelles sont les lois et les enjeux.

Nous discutons aussi avec des personnes qui ne sont pas d’accord avec le blocage.

En une semaine sur place, jamais je n’ai vu de conflit, jamais je n’ai vu autre chose que de la bienveillance.

Des cours et conférences sont organisées par les professeurs soutenant le mouvement, mais aussi par les étudiants, pour d’autres étudiants. Des cercles de paroles sont mis en place. Des cours d’art, des moments de musiques, la liste est longue.

Le campus vit pour le bien de tous, pour espérer que les générations qui suivent auront la chance de vivre ce que j’y ai vécu. Avec les mobilisés, je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour redonner aux jeunes cette liberté du savoir qu’on cherche à leur arracher.

Vanessa* 18 ans, en licence à Tolbiac

Je suis en filière dite sélective, et je me bats contre la sélection à l’université.

Je pense que l’accès au savoir devrait être universel

, et pas basé sur une quelconque sélection, reposant en plus sur des critères flous.

La loi ORE est pour moi une aberration, qui dissimule à peine une volonté de sélection sociale. Car oui, sélectionner selon le lycée d’origine est une sélection sociale, qui favorisera les gens déjà favorisés à la naissance au détriment de jeunes issus de quartiers plus difficiles ou de banlieues.

Cette réforme est aussi un moyen pour le gouvernement de justifier l’absence de moyens placés dans les facs : il y a sélection donc pas besoin de créer de nouvelles places, malgré la demande croissante.

Le but n’étant évidemment pas de revenir au tirage au sort mis en place par APB, mon aspiration est assez évidente : « du fric pour les facs et les lycées », pour reprendre un des nombreux slogans scandés dans les universités.

Le blocage à Tolbiac

J’ai participé au blocage de Tolbiac jusqu’à notre expulsion , et ce pendant près d’un mois.

Durant ce long laps de temps, nous avons réussi à mettre en place une fac ouverte, le but n’étant évidemment pas de condamner l’accès à la fac, mais au contraire de le démocratiser et d’ouvrir l’accès au savoir à tous.

Ce programme de fac ouverte consistait en de nombreux cours, conférences, débats et ateliers, organisés par des doctorants, maîtres de conférences ou encore journalistes.

L’accès était évidemment libre et ouvert à tous, et ce même quand l’administration fermait les grilles de la fac pour empêcher les entrées.

Les journées d’occupation étaient aussi rythmées par des AG et des comités de mobilisation, pour nous permettre de nous organiser.

Mon avis sur le blocage des facs

Pour moi, le blocage des facs est assez nécessaire. Je sais que cette solution ne fait pas l’unanimité, et qu’elle peut sembler extrême, mais elle permet au contraire de s’organiser.

Empêcher la tenue des cours permet à des étudiants qui auraient peur de manquer quelque chose d’important pour leur année de se mobiliser quand même, d’aller aux AG ou de manifester.

Bloquer une fac est aussi un acte fort, qui évidemment dérange. En l’absence d’une meilleure option, les blocages et les occupations restent une priorité.

Malgré notre expulsion, qui a été violente contrairement à ce que disent les médias et le préfet de police, nous continuerons à nous battre contre la sélection à l’université.

Zoé, 20 ans, en Licence 3 à Nantes

J’ai suivi les AG quand le mouvement a commencé à prendre de l’ampleur. La cause et la ferveur de ses défenseurs m’ont beaucoup touchée.

J’ai fait partie des votants pour le blocus reconductible et non illimité après des semaines de débats.

En revanche, je ne supporte pas les violences, on dit qu’elles ne mènent à rien et j’y crois encore.

Les anti-blocus pourtant conviés aux AG se faisaient ensuite huer et parfois insulter.

La violence monte de tous côtés. La force de convictions des étudiants se transforme beaucoup en rage, c’est pour moi contre-productif car la violence empêche le dialogue et l’ouverture.

Je suis contre la sélection, la méritocratie a ses arguments mais il y a des contextes d’apprentissages compliqués non pris en compte.

La France est un pays privilégié où les gens veulent toujours plus de droits, ce qui est inspirant et louable mais il y a des pays où le droit de manifester finit en meurtre et où les étudiants doivent payer une fortune pour aller à l’université par exemple.

Je suis personnellement pour un sens des priorités et les sans-abris en France et le soutien aux réfugiés sont des causes plus graves car elles amènent de hautes souffrances.

Mais cette convergence des luttes, comme ils l’appellent à la fac, est belle à voir et si on va vers un mouvement pacifique et solidaire où les citoyens réfléchissent ensembles à des améliorations, alors je suivrais.

La forme violente et totalement anti-gouvernementale qu’a pris le mouvement m’attriste énormément.

Mon avis sur le blocus

Je comprend le blocage évidemment, les pétitions et les lettres n’ayant pas fonctionné. Plus le mouvement est grand et osé, plus il a d’impact.

Mai 2018 arrive et tout le monde fait son parallèle à 68 sans réaliser toutes les évolutions de la société depuis.

Mais l’esprit fait chaud au coeur.

Alors je suis, sans trop m’impliquer par peur que les choses prennent une tournure qui porte préjudice. Cela me rend triste.

Et je m’en veux parce que les étudiants engagés donnent beaucoup d’eux mais ils ont tendance à culpabiliser beaucoup ceux qui ne s’engagent pas.

Nous avons encore beaucoup de travail à la fac.

La situation administrative est compliquée : les modalités de validation de contrôle continu ont été transformées en dossiers à rendre, la BU est toujours accessible, les candidatures de masters commencent bientôt dans un climat administratif difficile à gérer partout en France et les partiels sont pour l’instant maintenus, dans moins d’un mois.

Margaux, 19 ans, membre de l’UNEF

Moi c’est Margaux, j’ai 19 ans, je suis en première année de licence. Je pense que l’université ne doit pas être sélective, il y a déjà plein de diplômes post bac pour ça.

On nous parle souvent de ces étudiants qui ne vont pas en cours, ou qui n’ont finalement pas les pré-requis des autres…

Mais pour moi, l’université c’est là où tu peux te tromper, tu as le droit de ne pas savoir où tu en es, ce qui te plaît, ce que tu comprends etc… Et à part l’année sabbatique, il n’y a pas d’autre structure qui permette ça.

En début d’année, j’ai adhéré au syndicat étudiant UNEF. J’ai eu pas mal de formations sur divers sujets et j’ai participé à plusieurs campagnes de sensibilisation.

Pour moi, la mobilisation est très importante et jamais inutile. Et il n’y a surtout pas besoin d’être adhérent à une organisation pour y prendre part.

Malgré mon investissement dans ce genre de mouvement, mes études passent avant tout et je ne rate pas ou presque pas de cours.

Pour moi, un truc important dans la mobilisation est que chacun fasse un truc qui lui plaise, qui l’anime de manière à garder une motivation durable.

Pour ou contre les blocages ?

Grande question. Le blocage est un moyen de se faire remarquer. Non, ce n’est pas idéal, à cause des cours loupés, des vacataires impayés, des diplômes impossibles à récupérer… C’est compliqué.

Je ne me suis pas levée tous les matins à 4h, mais j’ai essayé de participer comme je pouvais. Mon copain étant très impliqué dans la mobilisation (lui, il s’est levé tous les matins) ça m’a permis d’avoir un dialogue autour de ça sur chaque action et on ne sait jamais si ce qu’on fait est bien.

J’ai été très heureuse de voir le nombre d’étudiants sans organisation qui ont participé, et ça m’a prouvé que je n’avais pas besoin de l’UNEF l’année prochaine, dont je n’approuve pas tout, pour continuer à m’engager.

Selon moi, cette mobilisation est une réaction contre les récentes réformes proposées par notre gouvernement et donc on espère rejoindre et faire gonfler le mouvement national.

La fac de Mont-Saint-Aignan a été partiellement bloquée. On n’a pas ou peu bloqué les bâtiments d’UFR aux représentants absents dans notre mouvement (staps et sciences ).

On a eu du mal à s’organiser et à se mettre d’accord mais l’occupation permettait l’ouverture malgré tout aux étudiants et même la tenue de cours dans un premier temps centrés sur la mobilisation de près au loin.

Puis, les profs étaient invités à faire leurs cours normaux à condition de ne pas faire l’appel et d’accepter tout le monde. Je trouve que c’est vraiment un très bon compromis.

Malheureusement, le président de l’université a fermé l’accès au campus de Mon-Saint-Aignan (ce qui pour le coup prive l’étudiant du débat, de cours…) pendant quelques jours.

La question aujourd’hui c’est « bloque-t-on les partiels ? » et je n’arrive pas trop à avoir d’avis là-dessus. Si ça tourne mal ça pourrait être compliqué mais nous verrons de quoi demain sera fait.

Au niveau des répressions, on a vu de loin la police, les étudiants ont été nassé une fois lors d’une manifestation à la venue d’Emmanuel Macron à Rouen.

Lundi 16 avril , 11 « anti bloqueurs » attendaient devant le bâtiment à bloquer mais il n’y avait pas eu de réelles violences.

Mathilde, 19 ans, élue étudiante pour la FAGE à Avignon

On commence peut-être à se connaître, car j’ai fait un stage chez madmoiZelle en janvier. Je suis en troisième année de licence d’espagnol à l’Université d’Avignon.

Je commence à bien connaître le monde de l’enseignement supérieur : cela fait quatre ans que j’y évolue, depuis mes salles de T.D. jusqu’aux rencontres avec les Ministres, puisque comme je te le racontais ici, je me suis engagée au niveau national pour défendre les intérêts matériels et moraux des étudiantes et étudiants.

Ça, c’est pour que tu aies une idée de mon profil et d’où vient le point de vue que j’ai sur les mouvements de mobilisation étudiante actuels.

Justement, ces mouvements je les désapprouve. Je tiens à préciser que je suis une fervente militante pour la liberté d’expression, de manifestation, de rassemblement, pour la mise en place de débats et la possibilité de crier son mécontentement, même – et surtout – quand je ne suis pas d’accord avec les points de vue exprimés.

Dans les blocages d’universités que nous traversons aujourd’hui, ce n’est pas la volonté de signifier son opposition, qui me dérange. Sans faire une tribune politique exhaustive des raisons pour lesquelles les blocages me posent problème, en voici cependant quelques-unes.

L’escalade des violences

L’escalade des violences est un argument qui agace souvent. Et pourtant, il est véridique. L’Université Paul Valéry (Montpellier) est un des nombreux exemples de violences, envers les manifestants et manifestantes – mais les celles-ci existent dans les deux sens.

Les saccages d’autres campus, comme celui de Tolbiac, font également partie des violences selon moi. S’attaquer au bien public, c’est s’attaquer au bien de tous et toutes.

Lorsqu’on demande justement une augmentation des moyens alloués à l’éducation, s’en prendre au patrimoine mobilier de l’université (les frais de réparation sont pour le moment estimés à plusieurs centaines de milliers d’euros pour Tolbiac) ne me semble pas être l’option la plus pertinente.

Le risque qu’il y ait des victimes est augmenté par le simple fait que les forces de police ne sont pas autorisées à entrer dans les universités, ce qui prolonge le temps nécessaire à une intervention policière si celle-ci doit avoir lieu.

D’autres exemples de violences sont à déplorer, et cela m’attriste profondément. Peu importe les opinions de chacun et chacune, si un mouvement étudiant massif devait avoir lieu, j’aimerais qu’il soit un moment de solidarité, de rassemblement et de bienveillance.

Dans un pacifisme royal. La résistance non-violente peut être tout aussi efficace.

La désinformation

Un autre sujet qui fait hérisser mes poils est celui de la désinformation. L’Université est un lieu d’apprentissage, de débat, d’échange, par excellence.

C’est un endroit où le savoir est roi, où on apprend à vérifier ses sources, à lutter contre les théories du complot ou autres fake news.

Alors comment est-on parvenu à laisser passer des insanités pendant les AG étudiantes ?

Parmi les vraies explications sur la loi ORE et le Plan Étudiants – car il est normal que tout le monde ne maîtrise pas le sujet et qu’il faille se l’approprier pour se positionner – des absurdités et des mensonges éhontés se glissent, jusqu’à ne plus pouvoir distinguer le vrai du faux.

Quelques exemples : à Avignon, des militant·es parlent de « suppression de la compensation ». L’information est déjà floue : entre les semestres ? Entre les unités d’enseignement ?

De plus, elle est archi fausse, puisque ladite compensation relèverait de l’arrêté licence de 2011, rien à voir, donc, avec la loi ORE. Du côté de Toulouse, il a été raconté que ParcourSup, la plateforme qui remplace APB, allait instaurer une sélection à l’entrée des études d’infirmier·e, or il y a un concours à l’entrée de ces formations qui sont donc déjà sélectives.

Par ailleurs, l’organisation dont je fais partie est en pleine discussion pour supprimer ledit concours…

Car oui, autre point important, selon moi : tout ne se passe pas dans la rue.

Si la manifestation est importante, il ne faut pas oublier que les élues et élus étudiants portent la voix de la communauté étudiante. La réforme est encore en cours de négociation, et lesdits élus y prennent une pleine place.

Elle comporte d’ailleurs des points satisfaisants, parfois obtenus suite au travail acharné des organisations étudiantes.

Mais les rendez-vous dans les ministères sont moins visibles, et moins vendeurs… C’est peut-être pour cela que l’on ne montre que les « casseurs » ?

L’impossible communication

Bon, ok, je désapprouve les blocus, et politiquement, je ne partage pas les idées de certains groupements qui les organisent.

Mais je ne suis pas fermée au dialogue, et au contraire, je trouve l’opposition et les désaccords sains. Je me suis donc rendue dans des AG au sein de mon université.

Clairement, mes collègues et moi n’étions pas les bienvenus. Nous avons été insultés publiquement, diffamés, menacés, et n’avons pas eu de droit de réponse. J’avoue ne pas avoir vraiment envie de retenter l’expérience.

Je sais que pour ce qui est de mes camarades qui étudient dans d’autres universités, certains ont été victimes de violences, et même de menaces de mort, pour avoir voulu entendre les arguments des étudiants qui s’étaient réunis, et entrer dans le débat.

Mais ce n’est pas uniquement parce que nous sommes étiquetés comme faisant partie d’une certaine orga étudiante que la communication est impossible, et l’exemple de l’Université de Lorraine illustre tout à fait cela.

Suite à un blocage du campus de lettres, la présidence de l’université a mis en place un vote électronique, auquel ont pu participer tous les étudiants concernés, sur la réouverture de l’établissement. Le taux de participation s’est élevé à 42,3%, et plus de 70% des votes ont été favorables à l’arrêt du blocage.

Pourtant, l’organisation ayant mené le blocage a refusé de le cesser et d’entrer dans des négociations.

Si les AG sont censées être un lieu par excellence de démocratie étudiante, je ne crois pas que ce soit le cas aujourd’hui, avec tous ces événements désolants.

Et toi, que penses-tu du blocage des universités ?

Merci à toutes et à tous d’avoir participé à ce témoignage. Maintenant, le débat vous appartient.

Est-ce que vous êtes mobilisé·es dans vos universités respectives ? Pourquoi ?

Quelles sont les réponses que vous aimeriez apporter ? Et à qui ? N’hésitez pas à poursuivre la discussion dans les commentaires, dans le respect et l’écoute mutuelle !

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Les Commentaires

40
Avatar de Une patate
4 juin 2018 à 02h06
Une patate
@Une patate Il n'empêche qu'il est toujours possible de chercher à abroger la loi plutôt que de manifester dans le vide en empêchant les gens de faire ce pour quoi ils ont payé leurs études
J'ai rien à ajouter à la réponse qui t'as été faite du coup.
Maintenant qu'on sait à quel point Parcoursup est de la merde puisqu'on a les résultats, est-ce que ces blocages n'ont réellement aucune utilité, au même titre que les actions en tous genres ? Actualisons le débat. Surtout que des tas de petits étudiants ayant payé des droits d'inscriptions pour des filières qu'ils ne voulaient pas vraiment vont devoir aller sur les bancs essayer de pas foirer leur année en se baignant dans l'alcool du désespoir alors qu'ils avaient une moyenne et un parcours tout à fait valable (oui je dramatise ridiculement, et c'est volontaire). Est-ce que, avec le petit recul que nous avons actuellement, l'abrogation ou le "sil vous plaît monsieur le président" semble toujours utile ?
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