La 18ème marche des personnes transgenres, intersexes et tou•te•s celles et ceux qui les soutiennent a lieu ce samedi 18 octobre. Le cortège partira de la place Stalingrad, à Paris.
Oui, l’Existrans est ouverte à « tou•te•s celles et ceux qui soutiennent » les personnes trans et intersexes, qui continuent d’être victimes de discrimination. D’une part, parce que les mentalités évoluent lentement, et que les démonstrations publiques de transphobie de type Manif Pour Tous n’aident vraiment pas.
D’autre part, parce qu’en l’état actuel de la législation, les personnes trans ont les pires difficultés à obtenir un changement d’état civil, lorsque leur genre d’identification ne correspond pas à leur genre d’assignation à la naissance, et/ou à leur sexe biologique.
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Un parcours du combattant
En clair, une personne née avec des organes génitaux « masculins » est assignée au genre masculin, tout comme une personne née avec des organes génitaux « féminins » sera assignée au genre féminin.
En grandissant, cette personne peut s’identifier à l’un ou l’autre genre, sans pour autant vouloir ou pouvoir changer de sexe. Mais elle ne peut pourtant pas changer de prénom d’usage ni de « sexe » sur ses documents d’identité.
Pour obtenir un changement d’état civil, les personnes trans doivent en passer par un « parcours du combattant de soins », qui inclut notamment :
- un suivi psychiatrique obligatoire
- le suivi d’un traitement hormonal
- une opération de changement de sexe (pour que le sexe de la personne corresponde à son genre) et de stérilisation
Cette liste est non exhaustive, et l’obtention du changement d’état civil est conditionnée par l’appréciation d’un juge administratif.
… Ça va sinon ?! Personnellement, aucun•e juge ni agent de l’État ne s’est jamais préoccupé•e de savoir ce que j’avais entre les jambes, ni si mon appareil reproducteur était en état de marche.
Soutenez les personnes trans !
Le comité organisateur d’Existrans, la marche pour les droits des personnes trans et intersexes, a publié un communiqué de presse détaillant les revendications portées par toutes les associations signataires.
Salomé est transgenre, et voici son témoignage :
Aujourd’hui en France, qui se présente au monde comme « Le pays des Droits de l’Homme », à l’heure où le Danemark s’aligne sur la législation argentine, le compte n’y est toujours pas pour les personnes trans (transgenres, transexuel•le•s) et intersexes.
En 2014, nous n’avons pas accès au changement d’état civil dans des conditions humaines et nos droits s’avèrent inexistants.
A l’heure où nos voisins européens suppriment peu à peu l’obligation de stérilisation, en France, le changement d’état civil n’étant toujours pas encadré, nous sommes à la merci du bon vouloir du juge administratif, lequel demande généralement la preuve de notre stérilisation, et ce malgré une circulaire du Ministère de la Justice et la condamnation de la France par 7 agences de l’ONU. Et demandera souvent à un médecin légiste expert auto-proclamé de donner son avis sur la question.
Ce changement ne peut se faire que par le biais du tribunal administratif et les frais sont à notre charge sans garantie de la réussite de la démarche, la mettant hors d’accès pour les plus précaires d’entre nous. Après le précédent de refus de l’aide juridictionnelle pour raison transphobe, que dire des 3000 à 5000 € ou plus de frais d’avocat requis quand notre identité de genre nous discrimine devant l’emploi, le logement ou même les études, précisément en raison de nos papiers non-conformes à notre apparence, notre vie sociale, notre identité ?
Que faire quand la loi, qui n’intègre pas la notion d’identité de genre, mais seulement le sexe ou l’orientation sexuelle, ne nous protège pas, par exemple, du refus de changement de prénom et de sexe d’un contrat de téléphonie ? Quand les diplômes ne peuvent pas être mis à jour pour protéger notre passé devant un employeur ?
Que dire de notre sécurité qui n’est pas garantie dans l’espace public ? La police refuse notre identité de genre, nous mettant en danger quand, en cas de garde à vue, nous sommes en cellule commune non mixte selon notre état civil. («Beaucoup dans les mouvements « LGBT » parlent de la police comme d’un organe de protection contre l’homophobie. Mais qui sont les « LGBT » que la police protège ?»)
Quand, en cas d’agression, à l’image du cas médiatisé de CeCe MacDonald, 19 mois de prison, notre légitime défense n’est pas protégée et nous expose à un emprisonnement en prison non mixte du genre opposé ?
Aujourd’hui, le compte n’y est pas pour les trans en France. Nos réclamons un changement d’état civil libre et gratuit, dépsychiatrisé et démédicalisé, et des droits.
A l’heure du retour des déferlements de haine de la Manif «Pour Tous» et des actions pour imposer les stéréotypes de genre dans les écoles, à l’heure de la reculade du gouvernement sur les questions LGBT et l’abandon des ABC de l’égalité, venez défendre le droits des personnes trans, la notion d’identité de genre et le refus d’une banalisation encore plus importante de la misogynie sous prétexte de biologie, votre résistance face à la Manif «Pour Tous», et la liberté de tous.
Ou… simplement vous informer de ce qu’est la transidentité et rencontrer des gens comme moi, ou… vous ?
– Merci à Salomé pour son témoignage
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Demander à ce que son état civil corresponde effectivement à son prénom d’usage et à son genre d’identification est loin d’être une requête disproportionnée : c’est tout simplement demander le droit d’exister.
D’où le nom de cette marche de soutien aux personnes trans et intersexes, l’Existrans.
Vous êtes les bienvenu•e•s !
Les organisateurs de la marche le confirme : vous y êtes les bienvenu•e•s !
La marche est bien sûr ouverte à tout le monde, la seule condition est juste d’être ouvert•e sur ces questions et en position de non jugement. L’important pour nous est au contraire que les personnes non trans se sentent également concernées, nous soutiennent, même si elles ne sont pas forcément super militantes à la base.
La marche se terminera sur le parvis de l’Hôtel de Ville (à deux pas de Châtelet), et sera suivie par une prise de parole des associations, puis enfin une soirée de soutien post-marche, à La Mutinerie (dans le 3ème arrondissement, près de Beaubourg).
Rendez-vous samedi à 14 heures, place de Stalingrad, puis à l’« after marche » à partir de 20 heures, à La Mutinerie !
Pour en savoir plus :
- Le site de l’Existrans
- La page Facebook du collectif Existrans
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
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